I - Deux films de fiction seulement pendant la guerre
La guerre du Viêt Nam dure dix ans, de 1965 à 1975. Et pendant
ces dix ans, Hollywood ne produit que deux films sur la guerre du Viêt
Nam dont seul Les bérets
verts de John Wayne en 1968 n'a pas sombré dans l'oubli. Hollywood
se montre donc très timide sur la guerre du Viêt Nam contrairement
à ce que l'on dit.
II - Les films métaphores
S'il n'y a que deux films, dont le premier est fort peu intéressant, qui abordent directement la guerre, tout le long de celle-ci, il y a des films métaphores. C'est à dire des films qui ne parlent pas du Viêt Nam explicitement, qui parlent d'autres conflits, mais qui sont porteurs de références explicites pour les spectateurs.
L'archétype du film métaphore est The big shave (1967). C'est la mauvaise conscience de l'Américain moyen contre la guerre du Viêt Nam qui retourne les objets du quotidien contre lui. "Je me suis presque convaincu" affirmera plus tard Martin Scorsese, "que c'était un film contre la guerre du Viêt Nam, que ce type qui se rase méticuleusement et qui finit par s'ouvrir la gorge était un symbole de l'Américain moyen de ce temps. C'est pour ces implications politiques que j'ai utilisé en fond sonore la version originale de I can't get started, celle de Bunny Berigan en 1939. Je voulais même terminer sur des stock-shots du Vietnam, mais ils étaient inutiles".
Le contexte peut être les guerres indiennes. Deux films sont particulièrement marquants : Le soldat bleu (Ralph Nelson, 1970) et Little big man (Arthur Penn, 1970). Ce sont des films pro-indiens qui dénoncent l'attitude des armées américaines pendant la guerre. Le contexte peut aussi être celui du thriller. Dans La dernière maison sur la gauche (1972), Wes Craven dit avoir été marqué par les images sadiques de guerre diffusées par la télévision et qu'il trouvait absentes des écrans de cinéma.
Les guerres mondiales sont aussi un contexte favorable pour évoquer le conflit du Viet Nâm dans l'esprit du spectateur. Johnny got his gun (Dalton Trumbo, 1971), est situé lors de la première guerre. Il en est de même pour Le roi de coeur (Philipp de Broca, 1966), échec cinglant en France mais vu comme une fable en faveur de la paix qui devient un véritable phénomène cinéphile en Amérique dans les années 70. L'incident de Nankin (mars 1927) est évoqué dans La canonnière du Yang-Tsé (Robert Wise, 1966) qui est sans doute le premier film compris comme une opposition explicite à l'intervention américaine. Les douze salopards (Robert Aldrich, 1967), Abattoir 5 (George Roy Hill, 1969), Catch 22 (Mike Nickols, 1970) le sont au cours de la guerre de 45 et Mash (Robert Altman, 1970) pendant la guerre de Corée. Mais le comportement des militaires américains y est dénoncé à chaque fois avec la même virulence.
III - De grands films documentaires
S'il n'y a que deux films hollywoodiens, il y a par contre des documentaires très importants. Très longue analyse politique sur les raisons de l'intervention et l'histoire du Viêt Nam dans Viêt Nam, année du cochon (1969). Le film de Emile de Antonio circule dans les universités. Puis Vétérans du massacre de My Lai de Joseph Strick (1971) qui rassemble cinq témoignages du massacre du 16 mars 1968 où cent dix soldats américains éxécuteront cinq cents vietnamiens, hommes femmes et enfants et les mutileront sans essuyer en retour un seul coup de feu. Ce sera ensuite Winter soldier, film collectif de 1972 non signé, qui rassemble des témoignages de vétérans du Viêt Nam : ce qu'ils ont fait, ce qu'ils ont subit. Le film circule sur les campus universitaires et n'est pas interdit. Les curs et les esprits, en 1973 de Peter Davis, reçoit l'oscar du meilleur documentaire. C'est une reconnaissance officielle pour un film qui démonte pourtant la politique suivie avec des témoignages d'hommes politiques. C'est enfin Milestones (1975), de John Douglas et Robert Kramer.
IV - Le rôle de la télévision et de la photographie
Ce n'est pas la première guerre télévisée en direct. C'est en effet technologiquement impossible. Le direct n'existe pas. Les opérateurs filmaient sur support film. Il fallait ensuite développer et transporter les bobines aux Etats-Unis. Mais les films, diffusés par les chaînes 48 heures plus tard au mieux, étaient perçus à l'époque comme du direct. C'était de l'événement concret qui était filmé.
Le statut d'un opérateur de télévision, comme de tout journaliste accrédité auprès de l'état-major américain, était celui d'officier de l'armée américaine. Il est donc libre de s'incorporer à toute unité combattante se dirigeant vers le front. Il pouvait aller où il le souhaitait et assister aux combats à ses risques et péril. les opérateurs ramenèrent ainsi des scènes de guerre jamais vues et filmées en direct (diffusé en différé). Malgré l'attitude de l'état major qui s'y oppose, les films sont diffusés. La leçon a été terrible : les gouvernements ne laisseront plus jamais libres les journalistes ni à Grenade ni au Panama ni durant la guerre du Golf pas plus que les Anglais ne laisseront libres les journalistes durant la guerre des Malouines.
Le 16 mars 1968, 120 soldats américains pénètrent dans le village de My Laï, au viêtnam, soupçonné d’abriter un état-major du Viêt-cong. Suivant à la lettre les ordres du capitaine Medina — « Personne ne doit sortir vivant » —, les jeunes soldats tuèrent sans essuyer le moindre tir cinq cent soixante-sept civils, dont des femmes enceintes et des enfants. Il fallut attendre novembre 1969 pour que ce massacre, le plus important jamais perpétré par l’armée américaine, soit révélé par les médias. Plus de quarante appelés, ainsi que leurs chefs, furent poursuivis en justice. Le procès est controversé. Les uns s’indignent que des soldats américains se soient comportés comme des barbares, les autres de les voir tout simplement dans le box des accusés. Seul le lieutenant William Calley, chef de l’opération, sera condamné à perpétuité, pour le meurtre de 109 civils, avant d’être libéré trois ans plus tard.
Le 8 juin 1972, le photographe Nick Ut est sur la route menant au village de Tran Bang, tenu depuis 3 jours par les troupes du Nord-Vietnam et assiégé par les Sud-Vietnamiens. La plupart des habitants du village ont déjà fui les lieux et se tiennent sur la route, à quelques kilomètres, dans l’espoir de retourner chez eux après la fin des combats. Alors que tout indiquait qu’il n’y avait plus un Nord-Vietnamien dans le village, l’armée sud-vietnamienne décide néanmoins de bombarder le village au napalm. Sur la route, aux avant-postes, se tient une petite armada de soldats, de photographes, cameramen et autres journalistes, tous dans l’attente du « spectacle » annoncé... La photo ne paraitra que le 12 juin dans le New York Times. Sa parution ne fut pas retardée par des problèmes techniques (on disposait déjà de moyens de transmission, à l’époque). Cela peut nous paraître surréaliste aujourd’hui, mais de très vives discussions se sont engagées entre rédacteurs pour savoir si on avait le droit de publier la photo d’une personne nue !
V - Les chefs-d'oeuvre de l'après guerre
Dès la guerre du Viêt Nam terminée, Hollywood fait des films sur celle-ci et des films hostiles contrairement aux deux seuls films faits durant la guerre : Le retour (Hal Ashby, 1978) Voyage au bout de l'enfer (1978), Apocalypse now (1979) de Coppola sont des films majeurs, des ensembles analytiques complets sur cette guerre.
Sources :
Principaux films sur la guerre du Viêt Nam :
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Da 5 bloods | Spike Lee | U.S.A. | 2020 |
Pentagon papers | Steven Spielberg | U.S.A. | 2017 |
Rescue dawn | Werner Herzog | U.S.A. | 2006 |
Outrages | Brian de Palma | U.S.A. | 1990 |
Né un quatre juillet | Oliver Stone | U.S.A. | 1989 |
Good morning Vietnam | Barry Levinson | U.S.A. | 1988 |
Full metal jacket | Stanley Kubrick | U.S.A. | 1987 |
Platoon | Oliver Stone | U.S.A. | 1986 |
Birdy | Alan Parker | U.S.A. | 1984 |
Rambo | Ted Kotcheff | U.S.A. | 1982 |
Apocalypse now | Francis Ford Coppola | U.S.A. | 1979 |
Voyage au bout de l'enfer | Michael Cimino | U.S.A. | 1978 |
Retour | Hal Ashby | U.S.A. | 1978 |
Le merdier | Ted Post | U.S.A. | 1978 |
L'ultimatum des trois mercenaires | Robert Aldrich | U.S.A. | 1977 |
Milestones | Robert Kramer | U.S.A. | 1975 |
Les curs et les esprits | Peter Davis | U.S.A. | 1974 |
Winter soldier | film collectif | U.S.A. | 1972 |
Les visiteurs | Elia Kazan | U.S.A. | 1972 |
La dernière maison sur la gauche (métaphore) | Wes Craven | U.S.A. | 1972 |
Johnny got his gun (métaphore) | Dalton Trumbo | U.S.A. | 1971 |
Vétérans du massacre de My Lai | Joseph Strick | U.S.A. | 1971 |
Viêt Nam, année du cochon | Emile de Antonio | U.S.A. | 1969 |
Model shop | Jacques Demy | U.S.A. | 1969 |
Le 17e parallèle : la guerre du peuple | Joris Ivens | Hollande | 1968 |
Les bérets verts | John Wayne | U.S.A. | 1968 |
Loin du Vietnam | film collectif | France | 1967 |
Les douze salopards (métaphore) | Robert Aldrich | U.S.A. | 1967 |
The big shave (métaphore) | Martin Scorsese | U.S.A. | 1967 |
Le roi de coeur (métaphore) | Phlippe de Broca | France | 1966 |
La canonnière du Yang-Tsé (métaphore) | Robert Wise | U.S.A. | 1966 |
Le conflit armé La guerre du Viêt Nam confronte :
Après l'échec de la tentative française pour conserver l'Indochine, le pays fut coupé en deux par une zone démilitarisée (DMZ), par les accords de Genève. L'organisation politique des deux parties du Viêt Nam fut marquée par des gouvernements d'idéologie et de politique opposées. La guerre débuta sous la forme d'une guerre civile pour savoir si le Viêt Nam resterait définitivement séparé ou s'il deviendrait unifié sous la RDVN. |
Les combats commencèrent en 1957, avec un soutien et des interventions sino-soviétiques et surtout américaines. Le Viêt Nam du Sud et ses alliés ont donné au conflit une image basée sur des principes et une stratégie anti-communiste : l'expansion du communisme devait être stoppée conformément à la doctrine américaine du containment, afin d'empêcher un « effet domino » en Asie orientale.
Le Viêt Nam du Nord et le Viêt-Cong en ont fait, quant à eux, une lutte pour réunifier le pays et pour repousser une agression étrangère impérialiste semblable à une poursuite de la Première Guerre d'Indochine.
Après quinze ans de combats et d'un lourd bilan humain, l'intervention majeure et directe des États-Unis prit fin avec la signature des accords de Paix de Paris en 1973. Les combats s'achevèrent avec la chute de Saïgon.
Après la victoire du Nord, le Viêt Nam fut uni et devint la République Socialiste du Viêt Nam, dotée d'un gouvernement composé essentiellement du parti communiste et basé à Hanoï.