Introduction : Sur des images de guerre et un entretien avec Fidel Castro, le commentaire définit la guerre du Viêt-nam comme une lutte des riches (les États-Unis) contre les pauvres (Viêt-nam).
Première partie :
1. Bomb Hanoï ! (Joris Ivens): La vie à Hanoï sous les bombes.
Des femmes fabriquent des abris personnels avec une « technique de pauvre » mais une riche inventivité. Ces abris sont enfoncés dans le sol, le long des trottoirs et disposent d’un couvercle en ciment. Un travelling balaie les trottoirs du centre-ville et révèle des centaines d’abris circulaires. Suit une séquence montrant les Hanoïens qui courent vers les abris, y descendent et ne ferment le couvercle que lorsque les bombes se mettent à tomber.
2. A parade is a parade ! (William Klein) Trois manifestations liées à la guerre du Viêt-nam : Humphrey à Paris, le Jour des anciens combattants à New York, le 1er mai à Wall Street. Le point de vue s’ouvre à la contradiction. Les slogans s’opposent : « Humphrey assassin » scandé par la foule à Paris, « Big firms get rich. GIs die » sur une pancarte à Wall Street mais aussi « Better dead then (sic) red » (Plutôt mort que rouge) ou « Victory now » sur les pancartes des partisans de la guerre.
3. Johnson pleure (Joris Ivens) : Des comédiens vietnamiens donnent aux villageois le spectacle de la défaite américaine. plans rapprochés de femmes et d’enfants vietnamiens : l’une porte une lourde palanche tout en serrant son enfant contre elle, une grand-mère toute petite et toute cassée porte un bébé sur son dos, des enfants courent. La population d’un village du Nord se réunit en arc-de-cercle pour assister à une représentation de théâtre populaire : deux acteurs psalmodiant et chantant leur texte interprètent Johnson et Mac Namara. Sans comprendre le vietnamien, on saisit l’esprit satirique du propos. Les spectateurs applaudissent,
4. Claude Bidder (Alain Resnais) : Un intellectuel monologue et fait entendre la voix de la mauvaise conscience avec des remarques acerbes sur la guerre dAlgérie. Dans un long monologue, Bernard Fresson, entouré de livres et de journaux entassés dans son bureau, exprime ses réflexions sur la guerre, ses engagements d’ancien résistant contre les Allemands, ses convictions, ses contradictions, sa mauvaise conscience. Face à lui, sa femme écoute et ne dit pas un mot. « C’est facile une guerre. On se bat plus pour des idées mais pour venger son copain. C’est la vendetta ! » « Jusqu’à la fin des temps, je continuerai à tuer les Allemands et à aimer les Américains. Sauf que les Américains sont les Allemands des Vietnamiens. Tout se complique. »
5. Flash Back : Origines historiques de la guerre et déclaration
d'Ho Chi Minh. Une voix off raconte l’engrenage des faits qui conduisent à la guerre.
– Dès 1949, les Américains aident financièrement la France engagée dans la guerre d’Indochine.
– Février 1951 – Ho Chi Minh dénonce ce soutien des E-U à la France.
– Avril 1954 – Dien Bien Phu est sur le point de tomber, la France fait appel aux E-U qui ne bougent pas. « La paix n’est à leurs yeux qu’une trêve. »
– 20 juillet 1954 – Les Accords de Genève : la guerre française est terminée ; la guerre américaine a commencé. Le général Giap doit abandonner un tiers des terres conquises. Le Vietnam est coupé en deux au niveau du 17ème parallèle. La réunification est prévue dans les deux ans. Les Vietnamiens se souviendront de ce marché de dupes !
Jusqu’en avril 1956, tous les pouvoirs français au Sud sont transférés aux Américains qui installent des mandarins catholiques aux postes de commande et instaurent un bastion anticommuniste.
– Fin 1956 – Les Américains revanchards organisent la répression anticommuniste au Sud. Le Nord souffre de pénurie alimentaire.
– 1958 – La lutte armée part du Sud avec la constitution du Front National de Libération ou Viet-Cong, terme péjoratif utilisé par les adaversaires. Ngo Dinh Diem, le premier ministre organise la répression.
– Septembre 1960 – Lors de son 3ème congrès le PCV (parti communiste vietnamien) soutient le Viet-Cong.
– 1er novembre 1963 – Ngo Dinh Diem est assassiné.
– De 1962 à 1965 – Les Américains souffrent dans leur lutte contre la guérilla viet-cong.
– Février 1965 – Devant l’impossibilité de gagner la guerre au Sud, les Américains décident de la porter au Nord.
Deuxième partie :
1. Camera eye (Jean-Luc Godard): Comment parler
des bombes quand on ne les reçoit pas sur la tête ? Comment faire
que la forme soit à lintérieur du contenu ?Jean-Luc Godard est derrière sa caméra et parle du Vietnam dont on ne voit pas d’images. Il a voulu se rendre au Nord-Vietnam mais n’en a pas obtenu l’autorisation. Il aurait voulu parler des effets de la défoliation, des effets sur le corps des femmes des bombes à fragmentation. Il ne lui reste plus qu’à se laisser envahir par le Vietnam. « Créer un, deux, trois… de nombreux Vietnam. »
en France cette nécessité
prend la forme de grandes grèves.
2. Victor Charlie : C’est le nom donné au Viet-Cong par les GIs. Le chanteur et compositeur folk Tom Paxton, résume le but de la Guerre des E-U. : « Protéger le Vietnam des Vietnamiens. » Puis la journaliste Michèle Ray donne son point de vue, du côté viet-cong. En effet pendant trois semaines, elle a été prisonnière du Viet-Cong et a vécu « la peur, le manque d’air, le sol qui tremble pendant les bombardements, les tunnels ». « J’étouffe, je me sens écrasée par la force des Etats-Unis », « Je suis derrière la caméra mais mon cœur est en face avec ce gosse.
3. Why we Fight : Discours du général Westmoreland, commandant en chef des forces américaines au Vietnam. Il expose la thèse officielle des États-Unis.
4. Fidel Castro : Fidel Castro expose les principes de la guérilla et exalte l'exemple donné par les Vietnamiens. « La réponse à la bombe atomique n’est pas une autre bombe atomique mais la guérilla. »
5. Ann Uyen : Uyen, Vietnamienne de Paris et Ann, femme de Norman Morrisson, expliquent le sens du sacrifice du quaker américain. Norman Morrison, né le 29 décembre 1933 à Érié et mort le 2 novembre 1965 à Washington, est un quaker américain célèbre pour s’être immolé par le feu à l’âge de 31 ans afin de protester contre l’engagement américain dans la guerre du Vietnam.
6. Vertigo : Manifestation des pacifistes américains le 15 avril 1967 à New York. Grande démonstration de masse au pic de la mobilisation contre la guerre du Vietnam. Love, Peace : ces mots sont scandés par la foule. Plus de 500 000 personnes défilent avec des pancartes « Stop the war now »
Conclusion : La société des riches sent bien qu'elle a perdu la guerre contre les pauvres, mais cette guerre se poursuit et les bombes continuent à tomber.
Un groupe de cinéastes (Joris Ivens, William Klein, Claude Lelouch, Chris Marker, Alain Resnais, Agnès Varda, Jean-Luc Godard) décide d’affirmer leur soutien au peuple vietnamien en lutte contre les USA et de provoquer une prise de conscience de l'opinion publique française.
Le but n’étant pas de réaliser un documentaire sur le Vietnam, mais d’ouvrir une réflexion sur cette guerre impérialiste, chacun réalise individuellement une partie comme autant de points de vue, rassemblées (montées) par Chris Marker pour un exposé collectif sur ce conflit.
Le film mobilisa six réalisateurs, sept reporters et cent-cinquante collaborateurs divers qui travaillèrent tous bénévolement et ne souhaitèrent pas signer individuellement les images ou les textes fournis à l'uvre collective. On trouve dans le film des documents sur la guerre elle-même, des témoignages et des interviews. Le style reportage, très affectif (Joris Ivens) alterne avec des épisodes plus distanciés, provoquant questions et réflexions, de portée plus intellectuelle (Jean-Luc Godard).
Bien que son nom figure au générique, les images tournées par Agnès Varda ne furent pas conservées dans le montage définitif, supervisé par Chris Marker. " Mon sketch sera une femme qui vit à Paris et fait un petit délire, confondant la démolition des vieux quartiers du 20e avec un bombardement américain sur Hanoï". (in "Varda par Agnès"). Seules quelques-unes de ses images furent réinjectées dans le sketch de Godard.
Au printemps 1967, lors des réunions préparatoires au projet, un autre cinéaste avait proposé, quant à lui, de raconter la brève idylle entre un soldat américain et une prostituée de Saïgon. Sans doute jugé trop sentimental, le sujet fut collectivement écarté. Il émanait de Jacques Demy, le réalisateur de Lola.
Loin du Vietnam fut présenté aux festivals de Montréal et de New York, puis en avant-première à Besançon. Sorti sur les écrans parisiens en décembre 1967, il n'eut pas l'impact désiré. Son aspect factuel - construction éclatée, aspect saccadé, éternel balancement entre reportage et réflexion - dérouta un grand nombre de spectateurs. Plus grave : élaboré dans l'euphorie quelques mois plus tôt, le film semblait arriver trop tard. En six mois, la quasi-unanimité s'était faite autour de la condamnation du génocide des Vietnamiens