Narbonne en hiver, dans les années soixante. Un jeune homme pauvre, Daniel, mène avec ses copains une vie désœuvrée. Avec son ami Dumas, ils voudraient acheter un duffle-coat, vêtement à la mode, cachant leurs vieux vêtements qui les auraient rendus présentables pour l'hiver. Impossible sans cela d'aller au France ; ils sont tolérés au 89. Pour draguer les filles, Daniel a trouvé un stratagème. Il est le fils d’un marchand de canon et est brouillé avec lui pour des raisons politiques. Il ne peut trouver du travail car son père donne de mauvais renseignement sur lui. Avec Dumas, ils volent des livres ou cherchent de l'argent perdu par les clients du marché couvert. Daniel erre dans un cinéma où l'on passe Les 400 coups, Le chevalier des sables, Pinocchio et un film d'aventure avec Kirk Douglas. Il se souvient avoir échoué à "frayer" avec Martine puis avoir failli être tabassé par son petit ami, le boxeur. Il essaie de frayer avec Rosette. Avec, Maurice au contraire de Dumas, il ose aborder les filles, ainsi le soir autour d'un banc.
Un photographe cherche deux Pères Noël pour inciter les enfants à se faire photographier, les jeudis et les dimanches jusqu’à Noël, 1 000 francs par jour. Un rapide calcul montre à Daniel qu'il peut gagner jusqu'à 7 000 francs et, avec les traditionnels lotos du café, atteindre les 10 000 francs pour l'achat du duffle-coat. Il pose ainsi, déguisé en Père Noël, dans une rue commerçante de la ville, apostrophant les passants et les passantes. Enveloppé dans une vaste houppelande, le visage masqué par une fausse barbe blanche, il joue son rôle avec conviction, liant volontiers conversation avec les promeneurs, nombreux en ce temps de Noël. Il caresse sans vergogne toutes les filles qui se font prendre en photo sans que jamais aucune ne proteste. Il croit même que Martine s'abandonne contre lui. Jeanine, à laquelle il a donné rendez-vous au palais du travail le soir, s'attendait à trouver quelqu'un d’autre. Elle se laisse un peu embrasser mais se dégage vite et refuse de le voir à nouveau. Il en conclut que "Le retour à la vie civile s'annonçait mal".
En trichant un peu au loto, Daniel parvient à s'acheter le duffle-coat le 26 décembre, sans attendre Dumas. Celui-ci, vexé, prétend qu'un loden c'est mieux et refuse l'invitation pour le réveillon. Daniel invite sans succès Martine au réveillon. Daniel avec son duffle-coat est admis à la terrasse du France.
Le soir du réveillon, Dumas les quitte avant qu’ils aillent au restaurant. A la sortie, ils constatent que la vitrine des chemises de luxe a été fracassée, sans doute par Dumas. Tous les trois, déjà passablement saouls s'éloignent dans la rue en criant à tue-tête : "Au bordel ! Au bordel !".
Dans Cinéastes de notre temps, et pourtant ils tournent (ORTF, 4 août 1966), l'émission dirigée par Janine Bazin et André S.Labarthe, Jean Eustache regrette de n'avoir pas pu faire jouer les personnages réels qui lui ont inspiré le film ; il se moque de la prétention des producteurs à modifier en une seule lecture ce qu'il a mis des mois à réfléchir. Sans producteur, Godard lui a donné les chutes de pellicules non utilisées pour Masculin-Féminin. Godard auquel, il montre le film, décide d'assurer la postproduction, d'éponger les dettes du film et de régler les factures et de tirer les copies pour la distribution. Il devient le producteur du film qui sera hélas mal distribué, par un incapable.
Jean Eustache ajoute que les filles qui se font prendre en photo, c'est écrit mais vérifie par le cinéma vérité ; ce sont des passantes qui ne savent pas qu'elles sont filmées et se laissent un peu caresser ; c'est dans le scénario mais vérifié par le cinéma vérité.
Editeur : Carlotta Films, avril 2024. Éditions 6 Blu-ray ou 7 DVD, restauration 4K : 80€. Du côté de Robinson (1964), Le père Noël a les yeux bleus (1965), La rosière de Pessac (1968), La rosière de Pessac 79 (1979), Numéro zéro (1971), La maman et la putain (1973), Mes petites amoureuses (1974), Une sale histoire (1979), Le Jardin des délices de Jérôme Bosch (1979), Offre d'emploi (1980), Les photos d'Alix (1980). | |
Suppléments : Près de trois heures d'archives télévisées et radiophoniques exclusives, sur le tournage des films, au Festival de Cannes, interviews plateau, interviews-fleuves de Jean Eustache et La soirée, Un projet de film inachevé écrit en totalité par Jean Eustache, tourné en 16 mm sans son ; Odette Robert, version réduite de Numéro zéro ; le dernier des hommes, postface, Les critiques André S. Labarthe, Jean Domarchi et le metteur en scène Marc’O y débattent du film de Friedrich Wilhelm Murnau. Un livre de 160 pages : projets de films + très nombreux entretiens + textes et analyses… |