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Voir : Peintres japonais

L'histoire de l'art japonais peut se découper en sept grandes périodes qui résultent des conflits militaires du pays.

1 - Périodes Asuka (552-710) et Nara (710-794) soit du 6e au 8e siècle
2 - Période Heian (794-1185) soit du 9e au 12e siècle
3 - Période Kamakura (1185-1333) soit le 13e siècle
4 - Période Muromachi (1333-1573) soit 14e au 16e
5 - Période Momoyama (1573-1603) soit au 16e
6 - Période Edo (1603-1868) soit du 17e au 19e siècle
7 - Période d'avant-guerre (1868-1945)
8 - Période d'après-guerre (1945-2018)

I - Périodes Asuka et Nara (552-794)

La première invasion significative de la culture asiatique continentale qui arriva au Japon se produisit durant les périodes Asuka et Nara, appelées ainsi en rapport avec le nom de l'endroit où siégeait le gouvernement japonais : dans la vallée d'Asuka de 552 à 710 et dans la cité de Nara jusqu'en 784. La propagation du bouddhisme provoque l'impulsion initiale des contacts entre la Corée, la Chine et le Japon, et les Japonais ont reconnu des facettes de la culture chinoise qui ont pu être profitablement intégrées dans la leur : un système permettant de mettre les idées et les sons par écrit ; l'historiographie ; des théories complexes de gouvernement telles qu'une bureaucratie efficace ; mais surtout, concernant les arts, des technologies avancées, de nouvelles techniques de construction, des méthodes encore plus évoluées pour couler le bronze et de nouveaux moyens et techniques de peinture.

Le Hōryû-ji

Les premières structures bouddhiques ayant perduré au Japon et les anciennes constructions en bois de l'extrême Orient se trouvent au Hōryū-ji, au sud-ouest de Nara. Les premiers travaux de construction commencèrent au début du VIIe siècle en tant que temple privé du prince Shōtoku constitué de 41 bâtiments indépendants. Les plus importants d'entre eux sont la salle de culte principale appelée kondō (salle d'or) et le Gojū-no-Tō (pagode à cinq étages) situés au centre d'un espace ouvert entouré d'un cloître couvert. Le kondō, dans le style des salles de culte chinoises, est une structure à deux étages couverte d'un irimoya (toit à pignons de tuiles en céramique).

À l'intérieur du kondō, sur une large plate-forme rectangulaire, se trouvent certaines des plus importantes sculptures de la période. La représentation centrale est un Bouddha Shaka flanqué de deux bodhisattvas, une sculpture en bronze coulée en 623 par le sculpteur Kuratsukuribe no Tori en hommage au prince Shotoku récemment décédé. Les Shi tennō (« quatre rois célestes », gardiens des horizons et de la loi bouddhique), gravés dans le bois aux environs de 650 par Yamaguchi no Atai Oguchi, sont postés aux quatre coins de la plate-forme. Conservé dans un musée érigé en 1941 à cōté de l'ensemble de Hôryû-ji, le temple Tamamushi no zushi , réplique en bois du kondō, est placé sur une haute base en bois décorée par des peintures figuratives sur laque de style centre-asiatique, et d'élytres de coléoptères (appelés tamamushi en japonais). Ces représentations comptent parmi les peintures les plus anciennes retrouvées au Japon

Le Hōryû-ji
Le Hōryû-ji, la pagode

Le Tōdai-ji

Les temples réalisés pendant le VIIIe siècle se concentrent autour du Tōdai-ji de Nara. Construit tel un « quartier général » d'un réseau de temples à travers les diverses provinces, le Tōdai-ji est le plus ambitieux complexe religieux érigé pendant les premiers siècles de culte bouddhiste au Japon. En conséquence, le Bouddha d'un mètre vingt (achevé en 752), ou Daibutsu , est un Bouddha Rushana , figure représentant la bouddhéité, au même titre que le Tōdai-ji qui représentait le centre du bouddhisme impérialement soutenu et sa propagation à travers le Japon. Seuls quelques fragments de la statue originale ont survécu et les actuels Bouddha central et bâtiment sont des reconstitutions de l'époque Edo.

De nombreux bâtiments secondaires sont groupés tout autour du Daibutsuden sur un flanc de coteau légèrement incliné. Parmi eux, le hokke-dō, avec sa représentation principale : le Fukûkensaku Kannon « le bodhisattva le plus populaire »), fabriqué en laque sèche (kanshitsu) dont la technique consiste à recouvrir une forme (en l'occurrence une armature de bois) de bandes de tissu de chanvre imprégnées de laque ; le kaidanin (« salle d'ordination »), avec ses belles statues des Shi Tennō du viiie siècle en terre non cuite.

Le Tōdai-ji, 8e siècle
Le Grand Bouddha de 14,98 m
vu de face, 17e siècle

2 - Période Heian (794-1185)

En 794, la capitale du Japon est officiellement transférée à Heian-kyō, l'actuelle Kyōto et ce jusqu'en 1868. La période Heian désigne une période allant de 794 à 1185, date de la fin de la guerre de Gempei. Cette période est, en outre, divisée en Heian ancien et Heian récent, ou époque Fujiwara, la date pivot étant 894, année où les échanges entre l'ambassade impériale et la Chine cessèrent officiellement. La seconde période est donc nommée en rapport avec la famille Fujiwara alors la plus puissante du pays, qui agissait comme un régent de l'empereur mais qui devint en fait un véritable dictateur civil.


Art de l'Heian ancien

En réaction à la prospérité et au pouvoir grandissant du bouddhisme organisé à Nara, le prêtre Kūkai (plus connu sous son titre posthume : Kōbō Daishi, 774 - 835) voyagea jusqu'en Chine pour étudier le Shingon, une forme de bouddhisme vajrayana qu'il introduisit au Japon en 806. Au centre du culte Shingon, se trouvent divers mandalas, diagrammes de l'univers spirituel qui influença le style de temple. L'architecture bouddhique japonaise adopta donc le stupa dans sa forme chinoise de pagode.

Les temples érigés pour cette nouvelle secte ont été construits dans les montagnes, loin de la cour et des profanes de la capitale. La topographie irrégulière de ces sites obligea les architectes japonais à repenser les problèmes de construction des temples et donc à choisir plus d'éléments de décor autochtones. Des toits en écorce de cyprès remplacèrent ceux en tuiles de céramique ; des planches de bois furent utilisées à la place des sols en terre et un lieu de culte séparé fut ajouté en face du sanctuaire principal pour les laïcs.


Le temple qui illustre le mieux l'esprit des temples Shingon du début du Heian est le Murō-ji (début du ixe siècle), situé en plein milieu d'une forêt de cyprès sur une montagne au sud-ouest de Nara. La représentation en bois du Shaka, le Bouddha « historique », pieusement conservé dans un bâtiment secondaire au Murō-ji, est typique des sculptures du début du Heian, avec son corps imposant, recouvert de drapés prononcés sculptés dans le style hompa-shiki (« vêtements en vague ») et son expression austère et renfermée. La pagode à cinq étages datant de la fin du VIIIe siècle est, avec ses 16,2 mètres de hauteur, la plus petite du Japon.


L'art sous les Fujiwara

Pendant l'ère Fujiwara, le bouddhisme Jōdo (bouddhisme de la Terre pure), qui offrait un salut facile grâce à la croyance en Amida (le Bouddha du Paradis de l'ouest), devint populaire. En opposition, la noblesse de Kyoto développa une société dévouée à la recherche de l'élégance esthétique. Leur monde était si beau et rassurant qu'ils ne pouvaient pas concevoir que le Paradis en fût bien différent. La salle d'Amida, mêlant le religieux et le profane, abrite une image ou plus de Bouddha à l'intérieur d'une structure ressemblant aux « manoirs » de la noblesse.

Le hōdō (« salle du phénix », achevée en 1053) du Byōdō-in un temple dans l'Uji au sud-est de Kyoto, est le type même des « salles Amida » de l'époque Fujiwara. Il se constitue d'une structure principale rectangulaire flanquée de deux ailes de couloirs en forme de L et d'un corridor de queue, situé à la lisière d'un large étang artificiel. À l'intérieur, une unique représentation dorée d'Amida (environ 1053) est placée sur une haute plate-forme. Cette sculpture a été réalisée par Jōchō ( mort en 1057) qui utilisa de nouveaux canons de proportions ainsi qu'une nouvelle technique (yoseg qui consiste à tailler une statue dans plusieurs morceaux de bois et de les assembler par l'intérieur. Sur les murs sont gravés les reliefs en bois coloré de 52 effigies des Bosatsu (Bodhisattva) qui accompagnent Amida dans sa descente du Paradis de l'ouest pour accueillir l'âme des fidèles à leur mort et les ramener dans des pétales de lotus. Cette descente, appelée raigō , peinte sur les portes en bois du hōdō, est un exemple précurseur du yamato-e (style de peinture japonais) car elle contient des représentations des paysages autour de Kyoto. Le hōōdō est actuellement devenu un musée.

Lors du dernier siècle de l'ère Heian, l'emaki (rouleau horizontal illustrant des textes littéraires ou religieux) prend de l'importance. Daté des environs de 1130, les Rouleaux illustrés du Dit du Genji représente une œuvre majeure de la peinture japonaise. Rédigé au début du xie siècle par Murasaki Shikibu, une dame d'honneur de l'impératrice Akiko, cette célèbre nouvelle traite de la vie et des aventures galantes du prince Genji (vers la fin du xe siècle) et du monde de la cour de Heian après sa mort. Les artistes de l'emaki du XIIe siècle élaborèrent un système de conventions picturales qui transmettent visuellement le contenu émotionnel de chaque scène. Dans la seconde moitié du siècle, un style différent, plus vivant, d'illustration narrative devint populaire. Le Ban Dainagon Ekotoba (fin du xiie siècle, collection Sakai Tadahiro), rouleaux qui racontent une intrigue à la cour, dépeint des personnages en mouvement avec de rapides coups de pinceau et des couleurs vives.

Les dieux de l’ancien Japon n’étaient pas représentés sous forme humaine. C’est à partir de l'ère Nara que les sculpteurs des dieux japonais apparurent sous l’influence des dieux bouddhiques. Nyorai signifie « celui qui a atteint l’éveil » (Bouddha) et prend le Shakyamuni Bouddha comme modèle. C’est une existence exceptionnelle possédant des spécificités qui la différencient d’une existence ordinaire. Les plus célèbres sont les statues d’Amida Nyorai assis, d'Yakushi Nyorai assis, et de Shaka Nyorai debout,toutes trois au Musée national de Nara.

Statue de Yakushi Nyorai assis,
Musée national de Nara
IX e siecle
Statue de Shaka Nyorai debout,
Musée national de Nara
IXe siecle
Statue d’Amida Nyorai assis,
Musée national de Nara
XIIe siecle

Les Bosatsu

Le Bosatsu est « celui qui cherche l’éveil » et a pour modèle Bouddha avant qu’il n’atteigne l’éveil ; Le bosatsu était souvent le prince d’un petit royaume. Leur rôle principal est de sauver les gens de leurs difficultés.

Kannon et Jizo sont les plus célèbres. Les myôô sont les Bouddha du bouddhisme ésotérique. C’est un bouddha d’une force à vaincre toute autre force ; figure effrayante car il remet dans le droit chemin ceux qui en suivent pas son enseignement. Le Myôô possède de nombreux bras et visages.

Les Ten

A l’origine, les dieux antiques de l’Inde étaient dévoués au bouddhisme et protégeaient leur enseignement ainsi que leurs fidèles. Ils sont représentés portant des vêtements de soldats ou de nobles chinois : Bishamonte, Kichijoten…

Quatre Rois célestes, shitennō (en sanskrit :Catur maharaja kayikas ; en chinois : sìdà tiānwáng) ; Ce sont les gardiens des horizons et de la loi bouddhique en Chine)

Tamon-ten or Bishamon-ten (Celui qui entend chaque chose) Gardien du Nord, porte une lance, ou un trident avec oriflamme, et une pagode.

Zōchō-ten ou Jocho-Ten(Patron de la croissance) Gardien du sud, tenant un sabre ou une lance

Jikoku-ten (Celui qui maintient les choses" ou “Gardien des terres) Gardien de l’Est, Il tient un sabre et un trident ;

Kōmoku-ten (Celui qui voit tout ) Gardien de l’Ouest : tient un rouleau d'écriture et un pinceau ;

les douze généraux célestes :

Politiquement, la cour impériale et le trône lui-même sont dominés par les nobles de la famille Fujiwara. Mais la cour a des difficultés à contrôler la prolifération des domaines privés (shôen) et à maintenir son ascendant sur l'administration des provinces. En l'absence d'un système militaire centralisé efficace des groupes de guerriers accroissent leur pouvoir, d'abord dans les provinces puis à la cour elle-même, lorsque la famille des Taira s'empare du pouvoir au milieu du XIIe siècle, tel que le décrit Le héros sacrilège (Kenji Mizoguchi, 1955)

3 - Période Kamakura (1185-1333)

Dès le milieu du xiie siècle, les affrontements entre clans marquent toujours plus ou moins l'histoire du Japon féodal dégénèrent en une véritable guerre civile. S'ensuit la réorganisation de l'empire, la cour de Kyoto perd l'essentiel de son autorité, la réalité du pouvoir passe entre les mains de shoguns (« généralissimes ») qui s'installe à Kamakura. Les affrontements se succèdent entre féodaux. Curieusement, ce climat de violence et d'insécurité favorise la plus fabuleuse éclosion artistique connue par le Japon. L'esprit du Zen (dhyana en sanscrit, ch'an en chinois), venu de Chine, et tout pétri de l'idéal du Tao, s'introduit au Japon dès le début du xiiie siècle. Refusant toute scolastique, prônant joyeusement le refus des convenances religieuses au profit d'une soumission invisible à la vraie nature du Bouddha, ignorant superbement la vaine agitation du monde, il convient parfaitement aux hommes qui vivent ces temps difficiles.

En 1180, une guerre civile éclate entre deux clans militaires : les Taira et les Minamoto ; cinq ans après, les Minamoto sortent victorieux et établissent un siège gouvernemental de fait sur le rivage du village de Kamakura qui resta ainsi jusqu'en 1333. Avec le déplacement de pouvoir de la noblesse à la classe guerrière, les arts doivent combler une nouvelle audience : les soldats, des hommes dévoués aux arts de la guerre ; les prêtres engagés à rendre le Bouddhisme accessible aux communs illettrés ; et les conservateurs, la noblesse et quelques membres du clergé qui regrettent le déclin du pouvoir de la cour. Par conséquent, le réalisme, une tendance populaire, et un renouveau de classicisme caractérisent l'art du Kamakura (Kamakura jidai).

Les sculpteurs de l'école dite des Kei, et particulièrement Unkei (v. 1148-1228), créèrent un nouveau style, plus réaliste, de sculpture. Les deux représentations des niō (1203) du nandaimon (grande porte du sud) du Tōdai-ji à Nara illustrent le style dynamique particulièrement réaliste d'Unkei. Les statues, d'environ 8 mètres de haut, ont été sculptées dans de nombreux blocs pendant une période de 3 mois, une prouesse indiquant le développement d'un système d'atelier d'artisans travaillant sous la direction d'un maître sculpteur. Les sculptures polychromes en bois, réalisées par Unkei en 1208, conservées au Kōfuku-ji à Nara et représentant deux sages indiens, Muchaku et Seshin, les légendaires fondateurs de la secte Hossō-shū, constituent les travaux les plus réalistes créés pendant cette période. Ce sont des représentations remarquablement réalistes et individualisées.

1203 : Unkei
Gardien de l'Est
1203 : Unkei
Gardien de l'Ouest

la tendance populaire de la peinture de la période Kamakura trouve un bon exemple avec Le Kegon engi emaki. C’est un emaki (rouleau peint) décrivant la fondation de la secte Kegon-shû. La secte Kegon, l'une des principales de l'ère Nara, connut des jours difficiles avec l'ascendance des sectes Jōdo (Terre Pure). Après la guerre de Gempei (1180-1185), le prêtre Myōe du Kōzan-ji chercha à redonner de l'élan à la secte et fournit un refuge aux femmes rendues veuves par cette guerre. Les veuves de samouraïs, même parmi les nobles, n'avaient plus envie d'étudier autre chose qu'un système de transcription syllabique des sons et des idées et la plupart d'entre elles étaient incapables de lire des textes employant des idéogrammes chinois. Ainsi, le Kegon engi emaki combine des passages de texte rédigés avec un maximum de syllabes faciles à lire et des illustrations qui contiennent des dialogues entre les personnages écrits près de ceux qui parlent, à la façon des bandes dessinées contemporaines. L'intrigue de cet emaki, racontant les vies de deux religieux coréens, appelés Gishō et Gengyō en japonais, qui auraient fondé la secte Kegon-shû, est menée avec entrain et est remplie de scènes fantastiques telles qu'un voyage dans le palais du Roi de l'Océan, et une histoire d'amour poignante.

4 - Période Muromachi (1333-1573)

Pendant la période Muromachi, également appelée période Ashikaga, un changement profond se produisit dans la culture japonaise. Le clan militaire des Ashikaga prit le contrôle du shogunat et renvoya ses quartiers généraux à Kyôto, dans le district Muromachi de la ville. Avec le retour du gouvernement à la capitale, les tendances populaires de l'ère Kamakura prirent fin et l'expression culturelle prit un caractère plus aristocratique et élitiste. Le bouddhisme zen, la secte Ch'an, traditionnellement supposée avoir été fondée en Chine au cours du vie siècle, fut introduit pour la seconde fois au Japon et prit racine.

Grâce aux aventures des profanes et aux échanges avec la Chine organisés par les temples zen, de nombreuses peintures et beaucoup d'objets d'art sont importés au Japon et influencent profondément les artistes japonais qui travaillent pour les temples zen et le shogunat. Non seulement ces imports apportent des changements dans les sujets picturaux choisis, mais ils modifient en plus l'utilisation de la couleur : les tons vifs du Yamato-e cèdent la place aux monochromes (sumi-e) de la peinture à la façon chinoise.

Typique de la peinture du début du Muromachi, la représentation du moine légendaire Kensu (Hsien-tzu en chinois) au moment où il atteint l'Éveil a été réalisée par le prêtre-peintre Kao (actif au début du xve siècle). Ce type d'illustration a été exécuté avec de rapides coups de pinceau et un minimum de détails.

(Hyōnen zu, environ 1415, Kyôto), par le moine-peintre Josetsu, marque un tournant dans la peinture du Muromachi, caractérisé par une reconnaissance de l'importance du paysage.

Les principaux artistes de l'ère Muromachi sont les prêtres-peintres Shûbun et Sesshû . Shûbun, un moine du temple Shôkoku-ji de Kyôto, a réalisé Lecture dans un bosquet de bambou (Chikusaidokushozu 1446, Musée national de Tokyo), un paysage réaliste avec un profond recul dans l'espace. Sesshû, contrairement à la majorité des artistes de la période, put se rendre en Chine et étudier ainsi la peinture chinoise à sa source. Le Sansui Chokan (Long rouleau de paysage, v. 1486, Collection Mori, Yamaguchi), l'une de ses œuvres les plus accomplies, dépeint un paysage continu à travers les quatre saisons.

Le fondateur de l'école, Kanō Masanobu (1434–1530), est contemporain de Sesshū, et élève de Shūbun. Certains spécialistes écrivent que, bien que Kanō Masanobu ait maîtrisé des éléments de la peinture chinoise et du style de Shūbun, il était finalement doté d'un talent assez médiocre et manquait à la fois de l'originalité et de la créativité de son maître. Kanō Masanobu, qui vit presque centenaire, est le premier à défendre un style d'esprit résolument au sein de l'École Kanō,. Mais c'est au prix de la liberté. Les artistes travaillent désormais pour la cour du shōgun, où le grave Confucius détrône l'insouciant Lao Tseu. À la peinture intimiste des moines zen, succède un art plus monumental et surtout plus décoratif. Dans le même temps, l'influence chinoise cède du terrain.

Quoi qu'il en soit, Masanobu devint peintre officiel à la cour du shogun (il dirige l'atelier de peinture, ou edokoro, du bakufu), et c'est cette haute position qui donna à l'école Kanō influence et prestige. Les artistes qui le suivirent améliorèrent son style et ses méthodes, et, en moins d'une génération, l'école prospéra avec Kanō Motonobu (1476- 1559); Kanō Shōei (1519-1592) et connait son apogée avec

Un autre développement majeur de cette période, et notamment pour l’architecture, fut l'apparition de la cérémonie du thé (chanoyu) et de la maison dans laquelle elle a lieu. Le but de la cérémonie est de partager un moment avec des amis qui apprécient les arts et de purifier son esprit des tracas de la vie quotidienne tout en recevant un bol de thé avec grâce et raffinement. Le style rustique de la maison de campagne fut adopté pour les pavillons de thé, mettant l'accent sur les matériaux naturels tels que des rondins de bois couverts d'écorce ou de la paille tressée.

5 - Période Momoyama (1573-1603)

Pendant la période Azuchi Momoyama, une succession de chefs militaires tels qu'Oda Nobunaga, Toyotomi Hideyoshi et Tokugawa Ieyasu tentèrent d'apporter la paix et la stabilité politique au Japon après une période de presque cent ans de faits d'armes. Nobunaga, initialement chef de guerre mineur, acquit suffisamment de pouvoir pour prendre le contrôle du gouvernement en 1568 et, cinq ans plus tard, pour évincer le dernier shogun Ashikaga.

La bataille de Nagashino (Kagemusha d'Akira Kurosawa) :
Ieyasu Tokugawa et Nobunaga Oda vainqueurs de Katsuyori Takeda

La bataille de Nagashino a lieu en 1575 au château de Nagashino dans la province de Mikawa. Le château, commandé par Sadamasa Okudaira, un vassal d'Ieyasu Tokugawa, était depuis le 17 juin assiégé par Katsuyori Takeda parce qu'il menaçait les lignes de ravitaillement des Takeda. Ieyasu et Nobunaga Oda envoyèrent des troupes pour lever le siège et Katsuyori Takeda fut vaincu. La victoire de la tactique d'inspiration occidentale d'Oda, et son usage des armes à feu contre la charge de cavalerie des Takeda est souvent considéré comme une évolution majeure dans l'art de la guerre japonais, et beaucoup la citent en tant que première bataille « moderne » du Japon. Paradoxalement, alors que la charge de cavalerie des Takeda représente la guerre traditionnelle à l'ancienne, elle fut inventée moins d'une génération auparavant par Shingen Takeda, le père de Katsuyori. Néanmoins, alors que d'autres avaient utilisé des armes à feu avant, Nobunaga Oda était le premier à concevoir des palissades en bois et des décharges tournantes de coups de feu qui ont mené à une victoire décisive à Nagashino.

Toyotomi Hideyoshi prit les commandes à la mort de Nobunaga (1582) mais ses plans pour instaurer des règles de succession héréditaire du pouvoir furent contrecarrées par Ieyasu qui établit le shogunat Tokugawa en 1603.

Paravent au cyprès Kanō Eitoku, vers 1585

Kanō Eitoku (1543-1590), petit fils de Kanō Motonobu (1476-1559), redonne vigueur à l'école Kano. Sa manière, trait incisif, emploi fréquent de la couleur, sens du détail précieux, est portée à son plus haut point de virtuosité. Eitoku, s'il excelle dans un art qui sait mêler avec discrétion encre et couleurs légères, cède aussi à la mode imposée par la cour de Momoyama et se lance trop souvent dans de vastes compositions décoratives. Son art constitue le sommet de la période artistique Momoyama, et, alors que bien des écoles se spécialisent dans un seul style, un seul support ou une seule forme, l'école Kanō, elle, excelle dans deux domaines différents. Les peintres Kanō travaillaient souvent sur de grandes surfaces, pour peindre des scènes de nature représentant des oiseaux, des plantes, de l'eau, ou d'autres animaux, sur des portes coulissantes ou des paravents, couvrant l'arrière-plan de feuille d'or. L'un des plus fameux exemples peut en être trouvé au château Nijō à Kyōto.

Cependant, l'école était tout autant renommée pour ses paysages monochromes à l'encre de Chine sur soie. Les peintres Kanō qui utilisaient l'encre composaient des tableaux très plats, mais ils savaient impeccablement équilibrer la composition entre les premiers plans détaillant des descriptions réalistes d'animaux et autres sujets, et l'arrière-plan souvent formé de nuages ou d'autres éléments abstraits, voire uniformes. L'utilisation d'un espace négatif pour indiquer la distance, et pour impliquer de la brume, des nuages, le ciel, ou la mer était tiré de styles traditionnels chinois, que les artistes Kanō surent utiliser avec brio. Il est à remarquer les coups de pinceau énergiques et les images hardies ainsi obtenues au moyen d'un type de peinture pourtant souvent subtil et retenu. Également, il existe un contraste entre ces peintures monochromes à l'encre habilement peintes et les formes artistiques beaucoup plus tapageuses — mais non moins belles — que les artistes à la suite de Kanō Eitoku ( Kanō Mitsunobu (1565-1608), Kanō Takanobu (1571-1618), Kanō Tannyū (1602-1674)) surent créer sur les murs ou les paravents.

6 - Période Edo (1603-1868)

Le shogunat Tokugawa acquit un contrôle incontesté du gouvernement en 1603 avec son engagement à rétablir la paix et la stabilité économique et politique du pays, ce qui a dans l'ensemble été un succès. Le shogunat survécut jusqu'en 1868, quand il fut obligé de capituler face à la pression des nations occidentales pour l'ouverture du pays au commerce international.

L'un des thèmes prédominants de l'époque d'Edo aussi appelé la période Tokugawa, fut la politique répressive du shogunat Tokugawa et les tentatives des artistes d'échapper à ses restrictions. Les traits principaux qui la caractérisent sont la fermeture du pays (sakoku) aux étrangers et aux attributs de leurs cultures, et la prescription de codes stricts du comportement touchant à tous les aspects de la vie, comme sur la façon de se vêtir, la personne que l'on épouse ou les activités que chacun peut ou doit pratiquer.

En 1543, les portugais avaient débarqué au Japon sur l'île de Tanegashima (sud de Kuyshu) avec les pères jésuites venus de Macao, Antonio da Mota, Antonio Peixoto et Francisco Zeimoto. En 1563, le jésuite Portugais Luis Frois s'établit au Japon où il restera jusqu'à sa mort en 1598 à Nagasaki où débutent les persécutions contre les chrétiens. Le siècle chrétien du Japon correspond ainsi à la période 1543-1640 au cours de laquelle les jésuites portugais ont le monopole de l'évangélisation. En 1640, le shogun ferme le Japon aux étrangers et met tout le monde dehors sauf quelques marchands hollandais autorisés à faire du commerce à Nagasaki seul et unique port ouvert aux européens (gaijin) à condition qu'ils ne fassent aucun prosélytisme religieux.

Dans les premières années de la période Edo, cependant, l'impact de la politique Tokugawa ne s'est pas complètement fait sentir et certains des plus fins ouvrages architecturaux et picturaux du Japon ont été produits : le Palais de Katsura à Kyōto et les tableaux de Tawaraya Sōtatsu, fondateur de l'école Rimpa.

Le Palais impérial de Katsura, imitation du palais du Prince Genji, contient un groupe de shoin qui combinent des éléments de l'architecture japonaise classique avec des innovations. La totalité du complexe est entourée d'un splendide jardin avec des chemins de promenade. La cité d'Edo fut répétitivement frappée par les flammes, ce qui favorisa une architecture simplifiée facilitant les reconstructions. Le bois de construction était ramassé et conservé dans les villes avoisinantes à l'approche de l'hiver, lorsque le temps aride facilite la propension des incendies. Quand un feu était maîtrisé et éteint, ce bois était envoyé à Edo et des rangées entières de maisons étaient rapidement reconstruites.

Dans le cadre de la politique des sankin-kōtai des shoguns, les daimyos firent construire de larges maisons et des parcs pour les visiteurs, autant pour leur plaisir que pour celui des invités. Kōrakuen est un parc de cette période qui a perduré et qui est ouvert au public pour des promenades d'après-midi.

En peinture, Sōtatsu a élaboré un superbe style décoratif en recréant les thèmes de la littérature classique en utilisant des figures et des motifs de la nature, brillamment colorés, disposés sur des fonds de feuilles dorées. La paire de paravents Vagues à Matsushima (Freer Gallery of Art, Washington, D.C.) est l'un de ses travaux les plus renommés. Un siècle plus tard, Kōrin retravaille le style de Sōtatsu et crée des œuvres splendides dans un genre qui lui sera propre. Ses plus fameuses sont probablement les paravents représentant des pruniers avec des fleurs rouges et des fleurs blanches (musée d'art MOA, Atami).

L'école d'art la plus célèbre en Occident est celle de l'ukiyo-e ou "images du monde flottant", celles du kabuki et du quartier des plaisirs. Les impressions d'ukiyo-e commencèrent à être produites à la fin du xviie siècle, mais c'est en 1764 que Harunobu créa la première impression polychrome. Les artistes de la génération suivante, incluant Torii Kiyonaga et Kitagawa Utamaro (1753-1806), créèrent des représentations élégantes et parfois perspicaces des courtisanes.

Trois beautés de notre temps
Kitagawa Utamaro (1793)

Les Trente-six vues du mont Fuji (1831-1833) comptant en réalité 46 estampes, dont La Grande Vague de Kanagawa (1831), sont les œuvres les plus connues de Katsushika Hokusai (1760-1849). Que ce soit dans ses peintures, dessins, gravures, livres illustrés ou manuels didactiques, Hokusai fait preuve d’une virtuosité sans égale et d’une imagination débordante, confinant parfois au fantastique et délivrant une vision mystique de la nature. Le peintre japonais, mort à 89 ans, laisse derrière lui près de 30 000 dessins.

Pendant le XIXe siècle, la figure principale est Utagawa Hiroshige (1797-1858), créateur de paysages romantiques et sentimentaux. Les angles singuliers et l'aspect à travers lesquels il voit souvent les paysages, ainsi que le travail de Kiyonaga et d'Utamaro avec leur insistance sur les plans plats et leurs forts contours linéaires, eurent un profond impact, appelé japonisme, sur les artistes occidentaux tels qu'Edgar Degas ou Vincent van Gogh.

Le sanctuaire Kameido Tenjin
Utagawa Hiroshige (1856)
L'île Tsukuda vue du pont Eitaibashi
Utagawa Hiroshige (1857)

Une autre école de peinture, contemporaine à l'ukiyo-e, le Bunjin-ga ou école Nanga a un style fondé sur la peinture de lettrés chinois. Alors que les artistes d'ukiyo-e choisissent de représenter une vie échappant aux restrictions du shogunat Tokugawa, les artistes du Bunjin-ga se tournent vers la culture chinoise. Ce genre est bien représenté par les œuvres d'Ike no Taiga et Yosa Buson, mais aussi Tanomura Chikuden et Yamamoto Baiitsu .

D'autres peintres, souvent éloignés de Edo et Kyoto seront redécouverts plus tard ainsi les "excentriques" Itō Jakuchū, Soga Shohaku et Nagasawa Rosetsu


7 - Période d'avant-guerre (1868-1945)

La dynastie Tennō, rétablie au pouvoir en 1868, la culture européenne inonde le Japon. Son mariage avec l'art japonais produisit des constructions remarquables telles que la gare de Tokyo et la bâtiment de la Diète nationale (Kokkai-gijidō) qui existent encore de nos jours.

Les mangas furent également dessinés dès la période d'avant-guerre, grandement influencés par les caricatures des journaux français et anglais qui critiquaient les événements du moment et s'amusaient souvent de la politique. Mais c'est à la fin du xxe siècle qu'ils se diversifient, atteignant des tirages énormes et une diffusion internationale (voir Osamu Tezuka, Hayao Miyazaki).

En peinture, le Japon accepta l'influence occidentale et, en 1876, l'École d'Art Technologique ouvrit ses portes, employant les Italiens Vincenzo Ragusa, Edoardo Chiossone et Antonio Fontanesi pour enseigner les méthodes européennes. D'autre part, un mouvement inverse, mené par Okakura Kakuzo et l'Américain Ernest Fenollosa, encourageait les artistes japonais à conserver les thèmes et les techniques traditionnels tout en créant des œuvres plus en accord avec les goûts contemporains. C'est l'opposition entre deux volontés artistiques, yō-ga (peinture de style occidental) et nihonga (peinture japonaise).


8 - Période d'après-guerre

En la période d'après-guerre (sengo), ce sont surtout l'art et l'architecture américains qui influencèrent le Japon. Bien que la crainte des tremblements de terre restreignent considérablement la construction de gratte-ciel, les progrès technologiques permettent aux Japonais de construire des immeubles de plus en plus hauts et larges et d'apparence plus artistique. Les graphismes de jeux vidéo combinés au développement de l'informatique constituent également un nouveau style d'art.

Le besoin de reconstruire le Japon après la Seconde Guerre mondiale provoqua une grande stimulation auprès des architectes japonais et les immeubles japonais contemporains se classent parmi les plus fameux du monde en termes de technologie et de conception de la forme. L'architecte japonais le plus connu est Kenzo Tange dont l'ensemble sportif de Yoyogi, construit en 1964 pour les Jeux olympiques de Tokyo) lui valut une réputation internationale, se sert à la perfection des concepts de forme et de mouvement et du choix des matériaux.

Meredith Lacuve, le 10 novembre 2018.

Sources: Wikipedia, cours et conférences