(1746-1828)
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Surréalisme |
Le parasol | 1777 | Madrid, Prado |
Reine Marie-Louise à cheval | 1799 | Madrid, Prado |
Reine Marie-Louise portant une mantille | 1799 | Madrid, Prado |
La maja nue | 1800 | Madrid, Prado |
La maja vêtue | 1800 | Madrid, Prado |
La famille de Charles IV | 1801 | Madrid, Prado |
Les désastres de la guerre | 1810 | Madrid, Prado |
Majas au balcon | 1812 | New York Metropolitan |
Le 2 mai 1808 à Madrid : L'insurrection | 1814 | Madrid, Prado |
Le 3 mai 1808 à Madrid : Les éxécutions | 1814 | Madrid, Prado |
Autoportrait (A soixante-neuf ans) | 1815 | Madrid, Academia S. Fernando |
Une manola : Léocadie Zorrilla | 1820 | Madrid, Prado |
Vision fantastique ou Asmodée | 1820 | Madrid, Prado |
La procession à l'ermitage Saint-Isidore | 1820 | Madrid, Prado |
Saturne dévorant ses enfants | 1823 | Madrid, Prado |
Portrait de Ramón Satué | 1823 | Amsterdam, Rijksmuseum |
Le sabat des sorcières | 1824 | Madrid, Prado |
La laitière de Bordeaux | 1827 | Madrid, Prado |
Né en 1746 à Fuendetodos, près
de Saragosse, Francisco de Goya était le fils de Gracia Lucientes et
de José de Goya, maître doreur à Saragosse, où
il était employé par les chanoines de la basilique du Pilar
et dont les relations de travail ainsi que son oncle ont contribué
à la formation artistique du futur peintre. Malgré les difficultés
financières de ses parents, il est admis à l'Académie
de Dessin de José Luzán à Saragosse de 1759 à
1763. Le jeune Francisco a également vécu à Madrid, où
il échoue plusieurs fois, entre 1763 et 1766 au concours de l'académie
San Fernando, fondée en 1753.
Les années 1766-1771 correspondent à une période mal
connue de la vie du peintre, où Goya est vraisemblablement resté
à Madrid pour parfaire sa formation sous l'égide de Francisco
Bayeu (1734-1795), un autre artiste de Saragosse protégé par
Raphaël Mengs et devenu "peintre de Chambre" en 1767. Malgré
les péchés de jeunesse évoqués dans sa correspondance
ultérieure, Goya a surtout dû mettre à profit sa présence
dans la capitale pour s'imprégner des chefs-d'uvre contenus dans
les collections royales, et notamment les fresques vigoureuses et lumineuses
de Tiepolo au Palais royal. Il se présente à différents
concours mais n'a aucun succès.
Après un séjour en Italie (notamment à Rome et à
Parme où il participe au concours de l'Académie, obtenant une
mention spéciale du jury pour sa peinture Hannibal contemplant pour
la première fois l'Italie au passage des Alpes bien que ses "tons
heurtés" lui soient reprochés) en 1771, il revient à
Saragosse, où il reçoit ses premières commandes grâce
au prestige de son voyage en Italie où il a pu étudier les grands
maîtres. Entré, à l'instar de son père, au service
des chanoines du Pilar, il est choisi pour décorer le plafond d'une
chapelle. Terminée en juillet 1772, cette fresque ouvre la voie à
d'autres commandes du même genre.
Il épouse, en juillet 1773, la sur du peintre influent Francisco
Bayeu Josefa Bayeu3, âgée de 26 ans. Il a plusieurs enfants avec
elle mais tous meurent en bas âge, à part l'un d'entre eux :
le second, Francisco Javier de Goya, né le 2 décembre 1784.
En 1775, Goya s'établit à Madrid (où il vécut,
entre 1779 et 1819, dans la rue de Desengaño) et y obtint, probablement
par l'entremise de Francisco Bayeu, sa première commande importante
: des cartons (modèles de tapisserie) pour la Manufacture royale de
Santa Barbara. Ces tapisseries, destinées à décorer les
salles à manger du prince des Asturies (futur Charles IV) aux palais
de l'Escurial et du Prado, occupèrent Goya jusqu'en 1778 et furent
suivies, entre 1778 et 1780, par une nouvelle commande du même type
destinée à fournir des tapisseries pour la chambre à
coucher et l'antichambre de ce même prince au Prado.
Ayant obtenu l'autorisation de graver les uvres de Diego Velázquez,
Goya réalisa des aquatintes bientôt remarquées par Charles
III. Cette étude des tableaux du grand maître du Siècle
d'Or exerça une influence décisive sur l'uvre du protégé
de Bayeu.
Entré ainsi au service de la famille royale, Goya s'intégra
aux cercles des ilustrados, ces "intellectuels" progressistes influencés
par les idées des Lumières. Il rencontra ainsi le juriste Jovellanos,
lié à Pedro de Campomanes et à José Moñino
y Redondo de Floridablanca (dont Goya réalisa un portrait en pied en
1783), le graveur Sepulveda ou le financier basque François Cabarrus.
À nouveau sollicité par les chanoines du Pilar pour peindre
une coupole de la basilique, il se heurta à la jalousie croissante
de Bayeu qui, après avoir exigé en vain des corrections aux
travaux de son beau-frère, était allé dénoncer
aux commanditaires l'attitude récalcitrante de Goya, qui fut alors
obligé de s'exécuter (1780-1781). Cette déconvenue devait
l'éloigner durablement de Saragosse comme de son puissant beau-frère.
C'est en 1783 qu'il entra au service de Don Luis, un frère du roi,
réalisant pour lui plusieurs portraits de famille dont une Famille
de don Luis (1784), un portrait de groupe baigné d'un clair-obscur
intimiste inspiré de Rembrandt.
Don Luis mourut l'année suivante, mais Goya retrouva un mécène
en la personne du marquis de Peñafiel, futur duc d'Osuna, qui l'emploiera
à plusieurs reprises.
Fort de ces hautes protections, il devint, le 4 mai 1785, directeur adjoint
de la peinture à l'Académie de San Fernando (il remettra par
exemple un rapport sur l'enseignement de l'art en octobre 1792, sorte de manifeste
révolutionnaire dans lequel il explique qu'il n'y a pas de règles
en peinture et que cette dernière est une connaissance du monde).
Le 25 juin 1786, Francisco de Goya est nommé
peintre du roi d'Espagne avant de recevoir une nouvelle commande de cartons
de tapisseries pour la salle à manger royale et la chambre à
coucher des infantes du Prado. Cette tâche, qui l'occupa jusqu'en 1792,
lui donna l'occasion d'introduire certains traits de satire sociale (évidents
dans Le Pantin ou Le Mariage) qui tranchent déjà fortement avec
les scènes galantes ou complaisantes des cartons réalisés
dans les années 1770.
En 1788, l'arrivée au pouvoir de Charles IV et de son épouse
Marie-Louise (pour lesquels le peintre travaillait depuis 1775) renforça
la position de Goya à la Cour, le faisant accéder au titre de
peintre de la Chambre dès l'année suivante.
Cependant, l'inquiétude royale vis-à-vis de la Révolution
française de 1789 (dont Goya et ses amis partageaient certaines idées)
provoqua la disgrâce des Ilustrados en 1790 : Cabarrus fut arrêté,
Jovellanos contraint à l'exil, et Goya temporairement tenu éloigné
de la Cour.
En novembre 1792 il tomba gravement malade lors d'un voyage à Cadix
(il s'agissait peut-être d'une forme de méningite). Après
plusieurs mois de maladie qui le laissèrent temporairement et partiellement
paralysé, il resta physiquement faible et définitivement sourd.
Il apprit à lire sur les lèvres et le langage des signes. Cet
événement qui le coupa du monde extérieur fut probablement
à l'origine du changement de ses peintures qui devinrent plus noires.
Après la mort de Francisco Bayeu, en 1795, Goya sollicita le titre
de premier peintre de la Chambre porté par son défunt beau-frère.
Il n'obtint pas satisfaction mais, à la même époque, il
fut élu directeur de la peinture à San Fernando, poste qu'il
abandonna deux ans plus tard en raison de ses problèmes de santé.
La même année, il rencontra la duchesse d'Albe dont il réalisa
plusieurs portraits (La Maja nue lui est attribuée à tort) et
dont il fut, dit-on (en se basant sur un séjour commun du peintre et
de la duchesse à Sanlúcar, en Andalousie), l'amant.
C'est au tournant du siècle que Goya réalisa ses plus fameux
chefs-d'uvre.
Parmi ceux-ci, il faut inclure plusieurs commandes royales, telles que la
coupole de la chapelle royale de San Antonio de la Florida, à Madrid
(1798) ou le célèbre portrait de groupe de La famille de Charles
IV (1800), où le peintre rend hommage aux Ménines de Vélazquez.
Il est alors à l'apogée de sa carrière et le titre de
Premier peintre de la Chambre vient enfin récompenser ses efforts.
Il travailla également pour l'ambitieux Manuel Godoy, dont il immortalisa
la maîtresse et future femme, Pepita Tudó, sous les traits de la
sulfureuse Maja nue (v. 1799-1800) et de la Maja vêtue.
Mais ce point culminant de la carrière de Goya est aussi marquée
par une grande déception : ses Caprices (Los Caprichos), un recueil
de gravures à l'eau-forte et à l'aquatinte publié en
février 1799, sont censurés sous la pression de l'Inquisition.
L'artiste y avait en effet glissé, parmi des images sinistres et énigmatiques
mêlant la bamboche populaire au fantastique préromantique, de
violentes attaques contre l'archaïsme d'une société espagnole
où l'Église exerçait encore une influence liberticide
à l'aube du XIXe siècle.
L'invasion française de 1808 joua un
rôle crucial dans la vie de l'artiste. Favorable aux idées libérales
apportées par les Français mais blessé dans son patriotisme,
Goya hésita en effet pendant un certain temps entre la résistance
incarnée par la Junte centrale de Séville et les idées
de 1789 portées par le roi Joseph, frère de Napoléon
Ier. L'année 1810, pendant laquelle il commença à graver
Les Désastres de la Guerre, un réquisitoire féroce contre
les exactions françaises, tout en réalisant le portrait de Joseph
Ier, montre bien le tiraillement qu'il ressentit alors et qui lui valut, quelques
années plus tard, une réputation d'afrancesado.
En juin 1812, Josefa Bayeu, son épouse, meurt à l'âge
de 65 ans. Deux mois plus tard, Wellington fit son entrée dans Madrid.
Goya réalisa alors le portrait de celui qui avait vaincu les Français,
manifestant ainsi son rejet de l'occupant français et son ralliement
à la légitimité nationale (et, surtout, libérale)
incarnée par les Cortes et le Conseil de régence de Cadix.
Ainsi, quand ces dernières institutions décidèrent d'organiser
un concours pour commémorer l'insurrection madrilène du 2 mai
1808, Goya s'empressa de proposer de "perpétuer par le moyen du
pinceau les plus notables et héroïques actions de notre glorieuse
insurrection contre le tyran de l'Europe". C'est ainsi que l'artiste
peignit les célèbres Deux
mai et Trois mai (1814).
Le retour d'exil de Ferdinand VII allait cependant sonner le glas des projets
de monarchie constitutionnelle et libérale auxquels Goya adhérait.
S'il conserva sa place de Premier peintre de la Chambre, Goya s'alarma de
la réaction absolutiste qui s'amplifia encore après l'écrasement
des libéraux par le corps expéditionnaire français en
1823. Inquiété par l'Inquisition pour avoir peint La
Maja nue de Godoy, frappé à nouveau par la maladie qui l'avait
laissé sourd, écuré par la politique réactionnaire
de son souverain de maître, Goya fixa ses angoisses et ses désillusions
dans les fameuses Peintures noires dont il décora les parois de la
"maison du sourd" (située dans les environs de Madrid et
achetée par le peintre en 1819).
Ce contexte sombre explique pourquoi Goya, prétextant un voyage de
santé, quitta l'Espagne le 24 juin 1824 pour s'installer à Bordeaux,
lieu d'exil d'autres afrancesados libéraux. Il y fut bientôt
rejoint par sa compagne Leocadia Weiss et la fille de celle-ci, Rosario (qui
était probablement la propre fille de Goya, ce dernier ayant vécu
avec Leocadia depuis 1813). C'est dans cet exil français (ponctué
de quelques séjours en Espagne) qu'il réalisa un recueil de
lithographies sur le thème de la tauromachie intitulé Les Taureaux
de Bordeaux (1825) et faisant suite aux estampes de la Tauromachie parues
en 1816.
Âgé de 82 ans, Goya meurtt à Bordeaux dans la nuit du 15 au 16 avril 1828. L'artiste fut inhumé dans le cimetière des Chartreux dans un caveau où reposait déjà son compatriote Martin Goicocchea, beau-père du fils du peintre et ancien maire de Madrid. Lors de l’exhumation en 1899, dans l’impossibilité de reconnaître les corps, ils furent renfermés tous deux dans le même cercueil et transférés dans le mausolée à la sacramental de San Isidro à Madrid.