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Loulou
est une jeune femme qui ne s'encombre d'aucun préjugé et vit
pour l'amour et le plaisir. Ses amis sont nombreux. Elle en a de tous les
âges et de toutes les conditions. Elle est présentement la maîtresse
en titre du Dr Schön, propriétaire de plusieurs journaux. Ce jour
là Schön fait grise mine en annonçant son prochain mariage
avec la fille du ministre de l'intérieur. Il lui dit que sa liaison
avec elle mettrait sa carrière en péril. Avant qu'il n'arrive,
Loulou avait reçu la vieux Schigolch qu'elle présente à
Schön comme son plus ancien mécène. Une fois Schön
parti, Schigoch fait monter Rodrigo Quast, un trapéziste célèbre
qui propose à Loulou d'être sa partenaire.
Loulou réussit par ses intrigues à faire rompre le docteur Schön, avec sa fiancée et à s'en faire épouser, tout en poursuivant ses autres liaisons. Le soir même des noces, son mari la surprend avec son propre fils. Il tend un révolver à l'infidèle, pour qu'elle se supprime. Mais au cours de la dispute, c'est lui qui est tué. Accusée de meurtre, Loulou est acquittée grâce à des protecteurs influents. Elle continue à mener une vie aventureuse avec son beau-fils, qui se ruine au jeu pour elle. Elle échoue finalement dans les bas-fonds de Londres, avec des compagnons de débauche. Un soir de brume et de cafard, elle racole un inconnu qui n'est autre que le maniaque Jack l'Éventreur. Celui-ci l'entraîne dans sa mansarde et la poignarde.
La
rencontre de Pabst et de Louise Brooks fut avant tout celle d'un chorégraphe
et d'une danseuse, le film offrant l'aspect sur les plans visuel, littéraire
et métaphysique, d'une danse d'amour et de mort. Les significations
que trouvèrent les exégètes au personnage de Loulou (et,
à travers lui, à la personnalité de Louise Brooks) sont
nombreuses, variées, parfois contradictoires. Elles reflètent
la subjectivité variée des spectateurs en proie à l'énigme
de ce visage lisse, encadré pat le célèbre casque de
cheveux noirs, que la succession changeante des émotions ramène
toujours à une impassibilité troublante. Incarnation libertaire
et anarchiste de l'amour fou et de la révolte sans compromis contre
la société, féministe avant la lettre ou bien héroïne
incandescente de mélodrame, victime des hommes et d'une morale en putréfaction,
Loulou a survécu triomphalement à toutes ces interprétations.
Le milieu social et les décors du film sont réalistes mais ils
sont progressivement envahis par des éclairages expressionnistes qui
finissent par toit engloutir. Loulou elle-même est une créature
lumineuse dont la lumière sert à éclairer et à
révéler les ténèbres d'autrui et du monde qui
l'entoure. L'annihilation finale de Loulou, antithèse tragique à
l'ascendant qu'elle exerçait sur les personnages masculins (et parfois
féminins) de l'intrigue, débouche par delà le dénouement
sur une ultime victoire remportée dans la mémoire des spectateurs
et dans l'éternité.
Jacques Lourcelles. Dictionnaire du cinéma