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Détail de Autoportrait
(1928-1987)
Pop art
Voir :Andy Warhol cinéaste
 
Gold Marilyn Monroe 1962 New York, MOMA
Boîtes de soupe Campbell 1962 New York, MOMA
Cagney 1962 New York, MOMA
Car Crash (Double Disaster) 1963 New York, MOMA
Double Elvis 1963 New York, MOMA
Ten Lizes 1963 Paris, M.N.A.M.
Autoportrait 1966 New York, MOMA
Marilyn Monroe 1967 New York, MOMA
Chaises électriques 1971 New York, MOMA
Mao 1972 Pittsburgh, Andy Warhol Museum
Oxidation Painting (in 12 parts) 1978 Pittsburgh, Andy Warhol Museum
Leonard de Vinci, Annonciation, 1473 1984 New York, MOMA
Rorschach 1984 New York, MOMA
Camouflage 1986 Pittsburgh, Andy Warhol Museum
Autoportrait 1986 Pittsburgh, Andy Warhol Museum
Camouflage 1987 New York, MOMA

Né à Forest City (Pensylvannie) en 1928, Andrew Warhola est issu d'une modeste famille d'origine tchèque. Il entreprend à partir de 1945 des études de graphisme à Pittsburgh, puis, après l’obtention de son diplôme en 1949, s'installe à New York comme illustrateur pour des revues telles que Vogue ou The New Yorker. Il réalise aussi des décors pour les vitrines de grands magasins : à cette occasion, il peint en 1960 ses premières toiles représentant Popeye ou Dick Tracy. Mais il constate l’année suivante qu’un peintre exposé à la célèbre galerie Leo Castelli, Roy Lichtenstein, s’est déjà approprié ces personnages pour les introduire dans l’art. Il leur préfère alors, à partir de 1962, d’autres poncifs de la société de consommation, tels que les boîtes de soupe Campbell ou les bouteilles de Coca-Cola, qu’il met en image grâce au procédé sérigraphique.

Deux expositions en 1962 marquent l'entrée fracassante d'Andy Warhol dans le monde de l'art. En juillet, à la Ferus Gallery de Los Angeles, il expose ses désormais emblématiques boîtes de soupe Campbell. Présentant chacune une variété différente des 32 soupes de l’entreprise, elles étaient alignées sur une seule rangée sur un rebord qui entourait la galerie. "Les boites sont posées sur des étagères", déclarera plus tard le directeur de la galerie, Irving Blum, à propos de l'installation. Le Moma en résente une variation où Les 32 toiles de l’œuvre sont disposées en quatre rangées de huit boîtes. Répétant une image presque identique, les toiles soulignent à la fois l’uniformité et l’omniprésence de l’emballage du produit et subvertissent l’idée de la peinture comme moyen d’invention et d’originalité.

Les peintures marquent une percée pour Warhol, qui avait auparavant travaillé comme illustrateur commercial : elles comptent parmi ses premières œuvres basées sur des biens de consommation et parmi les premières à adopter la répétition en série. Bien qu'il ait peint chaque toile à la main, elles ont été faites pour sembler produites mécaniquement.

Plus tard cette année-là, Warhol monte une exposition à la Stable Gallery de New York, affichant des sérigraphies revebdiquant leur plate uniformité qui deviendra son style et sa signature. La sérigraphie, à l'époque essentiellement une technique commerciale, permettait un nombre théoriquement infini de répétitions et de variations du sujet choisi. L'exposition comprenait de nombreux portraits de l'actrice Marilyn Monroe, dont le récent suicide a provoqué une onde de choc dans la culture populaire américaine. Dans Gold Marilyn Monroe, Warhol commémore Monroe en projetant son visage sur une toile peinte en or, rappelant l'icône byzantine.

Les stratégies tirées de la gravure, y compris la multiplicité, la mise en miroir, le transfert et la réplication, seront des principes centraux et durables dans l’œuvre de Warhol. Tout au long des années 1960, il continue à exploiter le monde des célébrités pour son art, créant des images de stars et de personnalités publiques si familières qu'elles n'étaient souvent connues que par leur prénom : Elvis, Jackie et, encore une fois, Marilyn. De même, son engagement avec le sujet de consommation de masse débuté avec les boîtes de soupe Campbell trouveront un analogue sculptural dans ses boîtes sérigraphiées avec les étiquettes de jus de tomate de Campbell, de tampons de savon Brillo et de ketchup Heinz. «Plus vous regardez exactement la même chose, plus le sens disparaît, et mieux vous vous sentez vide», remarquait Warhol.

Sa série Death and Disaster, commencée en 1963, teste cette affirmation. Dans des œuvres comme Orange Car Crash Fourteen Times et Electric Chairs, la force de la répétition rendent les scènes à la fois banales et plus profondément traumatisantes. À partir de 1963, Warhol s’entoure d’assistants dans son atelier, la Factory, poussant ainsi à son paroxysme le caractère industriel de son travail.

Warhol était également un cinéaste pionnier et prolifique. Ses célèbres Screen Tests (bouts d'essai), réalisés entre 1964 et 1966, consistent en 472 portraits filmés individuels des visiteurs de son studio légendaire, la Factory. Témoignant de son intérêt éternel pour le portrait, les Screen Tests sont également une nouvelle performance cinématographique, mettant en vedette des non-professionnels dont la seule tâche est de rester silencieux et immobile pendant la durée d'une bobine de film. D'autres œuvres ont remis en question les limites de l'attention du public, comme Empire, un plan fixe de huit heures de l'Empire State Building. Warhol a également participé à la réalisation de longs métrages scénarisés, films cultes de la scène underground de New York qui ont transformé des artistes et marginaux de la Factory en «superstars». Il engage aussi des performances multimédias avec le groupe de rock le Velvet Underground.

En 1967, Warhol crée une société d'impression et d'édition, Factory Additions, grâce à laquelle il publie une série de portfolios de sérigraphies. Marilyn Monroe est la première. Au cours de sa carrière, il réalise près de huit cents images imprimées sur papier.

En 1968, après avoir été grièvement blessé par balle dans son atelier par Valerie Jean Solanas, une féministe radicale, il met fin à l'aventure collective.

En 1971, le magazine New York avait surnommé Warhol «L'Esprit du temps incarné», déclarant: «Les images qu'il laisse seront la trace permanente de l'Amérique dans les années soixante.» Il avait lancé son propre magazine, Interview, en 1969, et dans les années qui ont suivi, il a circulé dans le monde de la célébrité qu'il avait longtemps représenté dans son art. A partir de 1972, quand, après huit ans sans produire de peintures, mais des films, Warhol peintre refait surface (littéralement) avec le portrait de Mao, qui coïncide avec la couverture médiatique d'un voyage de Richard Nixon en Chine. Pendant quinze ans, Warhol va se livrer à l'exercice toujours plus rentable du portrait mondain (Mick Jagger, Calvin Klein) et à une quantité d'autres activités moins rentables.

Pendant ces années, beaucoup de choses ne cadrent plus avec l'image convenue du peintre. On dirait volontiers que son commerce de portraits lui permettait de faire du non-commercial. Par exemple de tourner autour de l'abstraction de différentes manières, ou d'entreprendre un dialogue avec la peinture ancienne. Comme s'il fallait que le peintre trouve ainsi sa légitimité. Les Shadows, des photographies d'ombres non identifiables, sont des grands moments d'abstraction. Les Oxidations (1978) aussi, en dépit de leur fabrication hasardeuse et collective. Les taches et coulures à la façon des expressionnistes abstraits qui les marquent sont le produit de jets d'urine sur un support de peinture au cuivre. Le grand format plein de nuances mordorées, de rouille et de fraîcheur de mousse tient des sous-bois et des nymphéas autant que du dripping de Jackson Pollock

Dans les années 1980, il encourage la jeune génération d’artistes new-yorkais, en collaborant notamment avec Jean-Michel Basquiat. Il revient à la peinture dans des œuvres comme le gigantesque Rorschach ou l'évocateur Léonard de Vinci, l'Annonciation 1473, qui interroge l'histoire de l'art elle-même.

Les Yarn aux tracés embrouillés all over sont encore des abstractions. Les Camouflages aussi. Appliqué à tout, au portrait ou à la Cène de Léonard de Vinci, le camouflage des militaires peut finir en superpositions de formes colorées dignes d'Arp et de Miro, dans l'oubli complet de ce qui est dissimulé.

L'humeur batailleuse d'Andy Warhol, que l'on retrouve dans son portrait préparé comme un guerrier de tribu indienne, éclaire décidément cette fausse confidence de l'artiste prétendant : "Je suis profondément superficiel."

De portrait en autoportrait, de maquillage en camouflage, Warhol ne cesse de se confondre en dédoublements, pertes d'identité et mascarades. Avec rien dessous ? Mais si : tout l'homme, son crâne. La mort. La mort est chez lui une affaire de société, comme il le montrait à travers les séries d'accidents de la route ou les chaises électriques. C'est devenu une affaire individuelle, mécaniquement reproductible. Anonyme.

Quelques paroles justement intrigantes comme : "Je veux être une machine" font comprendre la complexité du personnage et sa constante productivité. Warhol est mort accidentellement à la suite d'une opération bénigne, à 57 ans, en 1987.