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(1593-1652)
Baroque

Au XVIIe en Italie, des femmes peintres se font connaître. Plus connue que Fede Galizia ou Elisabetta Sirani, Artemisia Gentileschi est une figure extrêmement romanesque. Après le scandale de son viol par un ami de son père, elle a su conquérir une liberté qui lui a permis de mener une véritable carrière d’artiste. Elle a travaillé principalement à Rome, Florence et Naples. En 1616, elle devient la première femme membre de la célèbre Académie de peinture de Florence.

Suzanne et les vieillards 1610 Saint-Louis, Musée des Beaux-Arts du Missouri
Danaé 1612 Saint-Louis, Musée des Beaux-Arts du Missouri
Judith décapitant Holopherne 1614 Naples, musée du Capodimonte
Autoportrait en sainte Catherine d'Alexandrie 1617 Londres, National Gallery
Autoportrait en joueuse de luth 1618 Hartford,, Wadsworth Atheneum Museum
Judith décapitant Holopherne 1620 Florence, Galerie des Offices
Yaël et Sisra 1620 Budapest, musée des Beaux-Arts
La conversion de Marie Madeleine 1620 Florence, galerie palatine
Judith et sa servante avec la tête d'Holopherne 1625 Detroit, Musée des Beaux-arts
Vénus et Cupidon 1630 Richemond, Musée des Beaux-Arts de Virginie
Autoportrait en Allégorie de la peinture 1639 Windsor, Collections royales

Artemisia Gentileschi est née en 1593. Elle est la fille aînée d’Orazio Gentileschi, un des plus grands peintres de la Rome baroque et proche du Caravage. Elle a sans doute appris la peinture dès son plus jeune âge dans l’atelier de son père. En 1610, elle a 17 ans, Artemisia signe sa première œuvre autonome, une « Suzanne et les vieillards ». Son père l'a sans doute peinte avec elle mais a laissé sa fille signer pour lancer sa carrière.

Quelques mois plus tard, la jeune fille est violée par un collaborateur de son père, le peintre Agostino Tassi. Ils auraient eu une relation pendant plusieurs mois, le peintre promettant de l’épouser pour sauver son honneur. Mais Tassi est déjà marié et Orazio Gentileschi le dénonce. Un procès s’ensuit, particulièrement pénible pour la jeune peintre. Il dure sept mois et le scandale affecte sa réputation, même si son violeur est condamné aux galères.

La situation d’Artemisia est inédite dans l’Italie de l’époque. Une femme est mineure à vie, dépendant forcément d’un père ou d’un époux. Elle ne peut pas signer un contrat, toucher un paiement sans la garantie d’un tuteur. Elle ne peut pas voyager seule. Et pour figurer sur la liste des salariés du Grand duc de Toscane, elle doit être mariée avec un homme qui exerce la même profession qu’elle.

Selon Alexandra Lapierre, qui a écrit une biographie romancée, « Artemisia » (Editions Robert Laffont), c’est pour cette raison que son père la marie dès la fin de l’année 1612 à un de ses assistants, un « peintre médiocre ». En tout cas, Pierantonio Stiattesi la laissera exercer son art en toute liberté.

Le couple quittre très vite Rome pour Florence et c’est là que vient la reconnaissance. Artemisia travaille pour les Médicis et réussit à s’inscrire à l’Académie du dessin de la capitale toscane, un exploit inédit pour une femme.

Elle peint des nus, œuvres osées pour l’époque, qu’on cache derrière un rideau. Elle prend sans doute pour modèle son propre corps, dont elle observe le reflet dans un miroir. Elle se peint d’ailleurs souvent elle-même, on reconnaît ses traits dans de nombreuses toiles.

Artemisia représente essentiellement des figures féminines. « Cet univers au féminin devient son cheval de bataille. C’est comme ça qu’elle crée son mythe », explique Francesco Salinas.

Ces figures sont souvent des héroïnes, des femmes fortes, comme Cléopâtre qui se suicide, Suzanne, ou Judith qui décapite Holopherne. On a parfois voulu voir dans la violence de ses sujets (le sang coule abondamment dans ses œuvres) des allusions à son passé.

Artemisia revient en 1620 à Rome. On se bouscule pour se faire peindre par elle et le succès se confirme. La peintre a un amant, un noble florentin. Après Rome, elle se rend à Venise, à Naples et même à Londres. Artemisia est très douée, elle est capable de s’adapter à différents styles. Après le naturalisme caravagesque de ses années romaines, sa peinture s’éclaire et s’allège à Florence avant de virer au clair-obscur en vogue à Naples.

Elle passe la fin de sa vie à Naples, où elle dirige un grand atelier. Puis elle tombera dans l’oubli. « Elle était inconnue parce que, au XVIIIe siècle, tous ces peintres étaient oubliés. On ne voulait plus de cette peinture réaliste », remarque Francesco Solinas. L’artiste est revenue au jour au XXe siècle, et son personnage, romanesque à souhait, a inspiré auteurs et cinéastes. La biographie romancée « Artemisia » d’Alexandra Lapierre (1998) est rééditée aux éditions Pocket. Et le film « Artemisia » d’Agnès Merlet (1997) avec Michel Serrault et Valentina Cervi ressort sur les écrans à l’occasion de l’exposition Artemisia, 1593-1654, Pouvoir, gloire et passions d’une femme peintre, au Musée Maillol, à Paris en 2012..