Lignes formes couleurs

Editeur : Montparnasse, avril 2008. Format 4/3 - Couleur - Son mono et stéréo - VF - Zone 2 - PAL - 2 DVD 2 - 5 h 12 min (12 épisodes de 26 minutes). 30 € le double DVD.

 

Les six épisodes du DVD 1 :

  • LA LUMIERE, L’OMBRE ET LE REFLET. Peindre avec la lumière.
  • LE MODELE. Le peintre et le modèle, un couple millénaire.
  • SUPPORT. L’invention du tableau.
  • PIGMENTS. Les couleurs de la terre, de Lascaux à Picasso.
  • LE SCENARIO. Raconter une histoire en peinture).
  • PORTRAIT - AUTOPORTRAIT. A la conquête de la figure.

Les six épisodes du DVD 2 :

  • LA TOUCHE. La main du peintre.
  • LE DESSIN. La ligne d’où tout surgit
  • SURFACES. La peinture envahit les murs
  • L’ATELIER. Le laboratoire de l’art
  • LE PAYSAGE. L’invention de la nature
  • SOUS L’IMAGE. Les secrets bien gardés de la couche picturale

La série Lignes formes couleurs revendique une approche encyclopédique de l’histoire des techniques de la peinture. Chacun des films proposés revisite les plus grands chefs-d’œuvre de la peinture (Le déjeuner sur l’herbe de Manet, La Madeleine pénitente de Georges de La Tour, La rencontre de Courbet, Le radeau de la méduse de Géricault, Arbre de Rembrandt, La balançoire de Renoir....) sous des angles méconnus. L’occasion de regarder sous un autre angle de célèbres tableaux de maîtres analysés dans leurs moindres détails.

Moins pointus que les commentaires de la série Palettes, l’ensemble constitue une encyclopédie qui conserve un aspect ludique et accessible à tous. Les voix de Nicole Kaufmann, Georges Trillat remplacent celle de Marcel Cuvelier. On regrette l'absence du nom des tableaux et de leur auteur, parfois nettement moins célèbres que ceux cités plus hauts, en fin d'épisode.

 


LA LUMIERE, L’OMBRE ET LE REFLET. Peindre avec la lumière
Autoportrait de Jan van Eyck dans l'armure de saint Georges dans la Vierge du Chanoine van der Pael

La lumière est donnée par le fond d'or comme les vitraux elle se veut une émanation de la lumière divine. Les images représentées appartiennent un autre monde. Les corps de Jésus et des saints ne sont pas faits de chair et de sang. C'est pourquoi l'ombre portée est inséparable des corps terrestres et absente pour les saints seuls les visages, les vêtements et les mains sont légèrement modelés par lumière et ombre afin de rendre compte des volumes.

Avec la découverte de la perspective l'ombre portée commence à apparaître. La fuite en Egypte de Giovanni di Paolo, 1436.
Avec Le retable de saint Pierre de Conrad Witz, même La sainte famille porte son ombre.
Dans la Chapelle d'Arrezo (1452), Pierro maîtrise parfaitement les ombres, de la croix, des casques et l'éclat des armures l'ombre. Mais la peinture à fresque permet mois d'éclat lumineux que la peinture à l'huile, celle de Jan van Eyck qui dans le Chanoine van der Pael fait son autoportrait comme un reflet dans l'armure du saint Georges. Il semble tenir un pinceau.
Comme la lumière se réfléchit sur les armures, le peintre réfléchit sur son œuvre, sur sa place, sur ce qu'il est.
la lumière qui provient de la fenêtre gauche, illumine le lustre fait briller le miroir et projette des ombres. Dans Saint Eloi et les deux fiancés de Petrus Christus, la pose de trois-quarts indique que c'est un autoportrait du peintre, il tient un faucon qui a l'œil perçant, miroir métaphore de l'œil du peintre. Le Parmesan (1530) se peint avec les déformations étranges du miroir convexe.

L'atelier du peintre a longtemps été une verrière orientée au nord où la lumière est plus stable et à dominante gris-bleue. La Lumière provient de la gauche car le peintre droitier déplace son pinceau de gauche à droite comme pour l'écriture et ainsi l'ombre du pinceau ne porte pas sur ce qui se peint.

Quelques exceptions cependant. Dans La vocation de saint Matthieu du Caravage, l'éclairage vient de droite pour cette scène placée à gauche dans Chapelle Contarelli de Eglise saint Louis des Français de Rome alors que l'éclairage est zénithal pour la scène centrale. C'est seulement pour la scène de droite que la lumière vient de la gauche. Caravage veut donner l'illusion que les trois tableaux sont éclairés par la même source du lumière : le petit vitrail situé au-dessus de l'autel ou, de façon plus symbolique, la lumière du ciel elle-même.


Caravage plaçait ses modèles dans une pièce sombre et les éclairait d'une lumière haut placée. Caravage est le premier a instaurer la violence du clair-obscur. La lumière chez Georges de la Tour éclaire les émotions des personnages. Chez Gothard de Vedig, la lumière de la bougie éclaire sans heurt les objets, les teintes sont douces, presque monochromes.

Chardin dépouille la mise en scène des objets. Ceux-ci, soigneusement choisis, donnent l'impression de temps suspendu et de sérénité : marrons pommes, cuillère et gobelet d'argent. Diderot en fait l'éloge dans Le salon de 1767

Au XIX, c'est la femme qui porte la lumière allégorique. Jules Lefèvre et sa Vérité tentant un miroir réfléchissant le soleil ou Bartholdi et La Liberté éclairant le monde. Les lumières modernes de la ville se mêlent avec les étoiles chez Van Gogh, avec les jeux de pluie chez Pissaro.
Monet cherche la lumière pure, la vibration des couleurs dans ce qu'il appelle ses paysages d'eaux. Ce qui compose habituellement le paysage : les lointains ou le ciel est absent. Même les bandes d'arbustes seront bientôt supprimées. Restent les reflets d'arbres de nuages et de ciel dans l'eau où flottent les nymphéas.

En 1861, Eugène Chevreul range les couleurs du spectre selon un cercle chromatique. Van Eyck avait la connaissance intuitive des couleurs complémentaires lorsquil peint L'agneau mystique avec ses complémentaires du rouge et du vert ...que l'on retrouvera jusque dans Les coquelicots de Monet. la nature aime opposer le rouge et le vert. Dans Impression soleil levant, c'est l'opposition du bleu et de l'orange. Opposition du jaune du soleil et du bleu de l'ombre dans La pie de Monet ou La balançoire de Renoir.

Signac s'affranchit de la reconstruction du réel et cherche à obtenir un maximum de coloration et de lumière Il éclaircit la palette lumière du sud. Severini joue des couleurs juxtaposées. Malevchi nie la couleur en opposant noir et blanc.


 


LE MODELE. Le peintre et le modèle, un couple millénaire.

Selon Pline, Zeuxis dans la Grèce du IVème siècle cherche une image de la beauté. Il demanda quelles belles jeunes filles se trouvaient à Crotone. Il fit de son tableau un chef-d'œuvre de beauté en rassemblant ce qu'il y avait de mieux en chacune des jeunes vierges de la ville.

Pourtant l'idéal est aussi variable que le goût ainsi des éphèbes successifs vers 580, 550, 500, -450 Polyclete modèle vivant, -350 Praxytele (modèle plus élancé)
Pline raconte l'histoire de Phryné pour la vénus pudique. La déesse de la Victoire sur l'acropole (408) opère un mouvement souple du corps pour remettre sa sandale.

Dans la Rome antique, le modèle change de sens. Ce n'est plus un être vivant mais un modèle déjà crée par un artiste grec. Dans la peinture chrétienne, le nu n'est plus qu'une dépouille mortelle marquée par le péché, celles d'Adam et Eve. Les corps nus sont aussi ceux des saints martyrisés. Ce ne sont pas des modèles vivants mais des exemplats, des copies de modèle sur parchemin transmis par les ateliers d'enluminures. Une exception au XIIème siècle l'Eve de la cathédrale d'Autain.

En 1425, Masaccio peint les premiers beaux nus : Adam et Eve chassés du paradis suivi bientôt à distance par Van Eyck avec Le polyptyque de Gand. La sensualité du David de Donatello est avivée par le port des bottes et du chapeau. 30 ans après, la découverte de L'Apollon du belvédère, copie romaine d'une sculpture grecque, révolutionne l'art du nu masculin.

Ficin conseille son élève Lorenzo de Medicis en 1478 pour sa commande du Printemps et ses trois grâces auprès de Botticelli, inspiré des ménades des sarcophages. Sa Venus sortant de l'eau est la sœur de la vierge chrétienne. Elle inspire notamment Chranach en 1509 et Lorenzo di Credi.
Mais c'est La Venus endormie de Giogione qui devient le modèle absolu du nu couché. Titien s'en inspire pour sa Venus d'Urbino, du Pardo, Chranach, Velasquez la retourne, Goya, Courbet, Manet, Rrenoir, Matisse

 

Les modèles célèbres

Pline rappelle que le roi Alexandre avait chargé Appelle de peindre nue, par admiration pour sa beauté, la plus chérie de ses maîtresses nommée Campaspe. L'artiste tout en travaillant devint amoureux d'elle et Alexandre, qui s'en aperçu, la lui donna

Le frère Filippo Lippi, âge de cinquante ans avait reçu commande d'un retable pour un couvent de Prato. En 1456, tandis qu'il y travaillait, il s'éprit d'une jeune religieuse de 22 ans, Lucrecia Butti. Il la fit poser pour la figure de la Vierge, la séduisit et finit par l'enlever. Il vécurent en concubinage, eurent deux enfants dont le futur peintre Philipino Lippi. Le peuple légalisa leur union, les relevant de leurs vœux en raison du grand talent du peintre et la belle Lucrecia continua à poser pour la figure de la vierge.

Raphaël amoureux de la Fornarina qu'il peint dévêtue. Ingres reprendra le thème de Raphaël et de son modèle le peintre amoureux de son modèle mais de quel modèle s'agit-il ? La femme qui pose devant lui ou l'image de cette femme qu'il a lui-même créée ?

Le peintre allemand Lewis Corinthe represente en 1903 la fusion du peintre et de son modèle nouvel avatar du mythe décrit par Ovide dans Les métamorphoses :

"Pygmalion sculpta donc dans l'ivoire à la blancheur de neige un corps auquel il donna une beauté qu'aucune femme ne peut tenir de la nature. Et il conçut de l'amour pour son œuvre. Venus le comprend, l'entend. Pygmalyon s'approcha de sa statue et lui donna des baisers. Il lui sembla que sa chair devenait tiède. La vierge sentit les baisers qu'il lui donnait et rougit. Elevant un regard timide, elle vit celui qui l'aimait."

Le mythe de Pygmalion porte ainsi les thème de l'amour du fruit de ses mains et de son imagination, d'une beauté que la nature elle-même ne pourrait créer.

Gérôme, Magritte en 1928 avec La tentative impossible reprennet ce thème ainsi que Picasso avec Le peintre et son modèle,1914. Le peintre a délaissé sa toile et regarde, les yeux perdus dans un songe, la femme qui pose. De vivant dans le tableau, ne figure que le modèle qui a absorbé toute la couleur.

Mario Minnetti, peintre sicilien, compagnon du Caravage est peint dans La diseuse de bonne aventure. Il figure aussi dans La vocation et Le martyre de saint Matthieu. Le saint du cycle est un modèle qui servira aussi pour Abraham dans Le sacrifice d'Abraham.

Edouard Manet et Victorine Meurant. Manet est frappé par l'allure de cette jeune fille de 18 ans qu'il croise dans la foule. Sa peau laiteuse de rousse accroche bien la lumière, il en fait un portrait. Elle a dix-huit ans. Elle sera son modèle pour une dizaine de grands tableaux. Manet a peint Victorine en chanteuse des rues, en costume d'Espada, elle est la femme au perroquet. Elle sera aussi en 1873 une jeune mère de famille posant devant la grille de la gare saint Lazarre. Mais c'est auparavant avec deux tableaux célèbres et scandaleux que Victorine a trouvé ses plus grands rôles : le déjeuner sur l'herbe et Olympia

Renoir rencontre Aline en 1880, elle n'a pas vingt ans. Elle deviendra sa femme et son modèle principal pour Le déjeuner des canotiers, La baigneuse blonde à Saurantes après la découverte des fresques d'Herculanum et Pompei et celles de Raphaël à Rome, La maternité, Les grandes baigneuses


Pour rendre la vibration du sang sous la peau, on a soupçonné Titien de mêler à ses pigments son sang ou son sperme. Passionné par la photographie, Delacroix l'avait utilisée pour fixer la pose de ses modèles des 1847. Degas photographie aussi ses modèles.

 

J.-L. L. le 27/04/2008

 

Ciné-club de Caen

 
présentent
 
Lignes, formes couleurs par Marie-José et Alain Jaubert