Roy, aristocrate de la caste de "Zamindar", propriétaire terrien oisif, médite. Assis, sur la terrasse de son palais, le regard vide, braqué sur l'horizon marin, il songe à sa grandeur passée. À cette époque, imbu de la noblesse de sa caste, de ses droits, et de ses vertus, le Maharajah satisfaisait à sa passion pour la musique et la danse en organisant des réceptions toujours plus ruineuses dans le salon de musique. Un plaisir qu'il partage avec Khoka, son fils unique, lequel doit bientôt recevoir l'initiation sacrée, cérémonie encore plus prestigieuse que les précédentes. Les fêtes se succèdent. Son épouse et son fils partent au chevet d'un parent. Mais un soir, le fidèle serviteur Ananta annonce à son maître qu'ils ont péri noyés dans les graves inondations qui viennent de ravager la région, détruisant une partie de ses terres.
Désespéré, le Maharajah mène alors une vie de reclus, allant même jusqu'à fermer son salon de musique. Un jour cependant, la rivalité sourde et tacite qui l'oppose à Ganguli, usurier enrichi, représentant de la classe bourgeoise grossière et inculte, le conduit à l'ouvrir à nouveau... au grand désespoir de son intendant. Roy va en effet dépenser les maigres revenus de la dernière récolte. Les meilleurs musiciens et la plus grande danseuse du pays animent la soirée. Comblé, mais ruiné, le Maharajah s'enivre. Au petit matin, il part sur son cheval vers la plage. Quelques instants plus tard, il fait une chute mortelle et son fidèle Ananta s'étonne de voir couler sur le visage de son maître un sang qui ressemble au sien.
A la fois somptueux et extrêmement austère, Le salon de musique fait le portrait complexe et ambigu d'un passionné de la musique qui trouve dans cette passion le moyen d'assouvir son immense orgueil et de s'adonner à un narcissisme inné : narcissisme de caste et de classe. Sa passion, telle qu'il la conçoit, est essentiellement autodestructrice car elle le prive de toute énergie, de tout lien avec le monde extérieur et -défaut dans doute rédhibitoire aux yeux de Satyajit Ray- de toute humilité.
Cela étant, le personnage inspire à l'auteur et au spectateur une compassion et une sorte de respect quasi fraternels, qui donnent à l'uvre sa vibration unique.
Le noir et blanc utilisé avec un luxe raffiné et discret, comme on ne le verra sans doute jamais plus, les lents mouvements d'appareil qui nous font pénétrer dans l'âme du personnage comme dans une ville dévastée et fascinante, la composition de l'acteur Chhabi Biswas montrent en Satyajit Ray un artiste au sommet de son art. Les séquences finales (le dernier concert, la nuit d'ivresse du héros et sa chute de cheval) sont parmi les plus parfaites qu'il ait tourné.
Le salon de musique fut découvert très tard en France. Il revient au Ciné-club d'Antenne 2 de l'avoir fait connaître au public français en 1979 précédant sa sortie commerciale en 1981.