Deux petites filles, Mei, 4 ans, et Satsuki, 10 ans, s'installent à la campagne avec leur père pour se rapprocher de l'hôpital où séjourne leur mère. La famille Kusakabe emménage aidée par une voisine, "Grand-mère" et Kanta son petit-fils bravache. Mei est intriguée par de petites boules sombres, les noiraudes et de mystérieux glands qui tombent dont on ne sait où.
Les petites filles vont rendre visite à leur mère à l'hôpital. Elles sont déçues de la voir encore retenue pour longtemps. Satsuki va à l'école et le père est absorbé par son travail. Mei s'ennuie un peu avec les têtards pour seule compagnie quand elle rencontre soudain un étrange animal, sorte de lapin blanc qu'elle poursuit, jusque sous la maison. Le petit animal blanc fuit alors, accompagné d'un autre un peu plus grand, tout bleu. Mei les poursuit dans un tunnel de verdure et jusqu'au pied d'un grand camphrier. Elle voit un terrier et tombe à l'intérieur en essayant d'attraper un gland. Au bout du terrier, elle découvre une prairie merveilleuse où dort un gros animal en peluche gris. Taquiné par Mei, le gros animal se réveille et baille si fort que Mei l'appelle Totoro et s'endort sur son ventre.
Inquiets Satsuki et son père partent à se recherche et la découvrent dans la forêt sans croire à son histoire de Totoro. Un soir de pluie, Mei et Satsuki attendent leur père à la station de bus mais celui-ci tarde tant que Mei s'endort sur les épaules de Satsuki. Celle-ci voit alors surgir le grand Totoro auquel elle offre un parapluie. Le père tarde toujours à arriver lorsque surgit le Chat-bus qui embarque le grand Totoro. Tout de suite après le père arrive enfin et tous rentre à la maison. S'en suit une période de grande gaîté où Mei, Satsuki et Kanta s'amusent de voir les Totoro commander la pousse accélérée d'arbres buissons et légumes.
Les nouvelles de la maman de Mei et Satsuki ne sont pas rassurantes et Mei décide de lui faire un cadeau, l'épis de mais qu'elle a trouvé. Satsuki n'est pas d'accord et se fâche avec sa soeur qui s'enfuit. Satsuki affolée essaie de la retrouver et croit que sa soeur est morte lorsque l'on retrouve une chaussure près de la rivière. Désespérée, elle sollicite le secours du chat-bus qui finit par retrouver Mei... qui en profite pour déposer l'épis de maïs sur le rebord de la chambre d'hôpital de sa mère.
Perché sur une branche dans le chat bus, les deux fillettes voient leur mère qui semble aller mieux discuter avec leur père... qui découvre l'épis de mais sur le rebord. Sans les voir dans l'arbre, la mère sait que ses enfants pensent à elle et que le cadeau vient de Mei. Ravies les deux fillettes s'en retournent chez elles en chat-bus et le remercient de ce voyage.
Mon voisin Totoro est la version mélancolique de la tragédie réalisée par Isao Takahata le complice de Miyazaki, Le tombeau des lucioles, sorti cette même année 1988. Les deux films mettent en scène deux soeurs (un frère et une soeur) confrontées à la disparition possible (certaine) de leur mère et leur tentative pour affronter cet effroyable manque.
Dans les deux films, les enfants auront recours aux animaux fabuleux de la nature pour apaiser leur craintes. Alors que le bestiaire de Miyazaki est toujours, si ce n'est effrayant, du moins ambivalent, ici les dents du Totoro qui se dévoilent quand il baille sont tout de suite montrées comme inoffensives, proches de celles de Mei et les griffes qui apparaissent à Satsuki ne se montrent aucunement menaçantes. De même, les yeux diaboliques du chat bus qui surgissent dans la nuit se radoucissent dès qu'ils éclairent les deux enfants et sa fourrure laisse apparaître une porte hospitalière
Le petit Totoro blanc fait immanquablement penser au lapin blanc d'Alice qui entraîne Mei dans un terrier où elle se retrouve dans un jardin merveilleux, toute petite devant le grand Totoro. Le lapin blanc se transforme alors en une sorte de gros nounours sans que cette mutation ne génère un non-sens inquiétant. Mei n'est pas harcelée par un monde de cauchemar qu'elle ne comprendrait pas. Au contraire, elle s'endort dans la fourrure protectrice du Totoro.
La beauté de ces apparitions d'animaux étranges vient de leur capacité à se substituer aux peurs qui envahissent les enfants lorsque le chagrin menace d'être trop lourd. Invisibles aux adultes qui font face par la raison à leur peur, les noiraudes, les Totoros ou le chat bus sont des créations imaginaires des enfants qui les accompagnent dans leur marche incertaine contre l'adversité. Les noiraudes occupent la place que la menace d'une maison hantée, nouvelle et inhospitalière fait peser sur Mei. Le Totoro occupe Mei et vient réconforter Sutsuki lorsque son père semble l'avoir abandonnée et, qu'à bout de forces, elle porte encore Mei sur son dos et le chat bus est suffisamment énergique pour éclairer la nuit et accomplir ce voyage dont les enfants espèrent qu'il sauvera leur mère.
Oeuvre bouleversante de mélancolie simple, d'images de campagnes et de forêt paisibles, traversée par des éclats de chagrin apaisés par les animaux les plus doux de l'imaginaire enfantin, Mon voisin Toronto fait figure d'exception dans la filmographie de Miyazaki.
Jean-Luc Lacuve le 23/3/2010
Bibliographie :