Après la guerre de Cent Ans, la France connaît enfin la paix. Louis XI découvre la presse à imprimer. Accompagné de Frollo, son conseiller, il assiste à la fête annuelle des fous. Le poète Pierre Gringoire, auteur de pamphlets, y joue l'une de ses pièces. Esmeralda fait partie des gitans qui envahissent alors toute l'Europe. Sa danse retient l'attention du peuple. Mais l'apparition de Quasimodo, le sonneur de cloches de Notre-Dame, sourd et difforme, l'effraie. Rassemblé sur le parvis de la cathédrale, le peuple l'élit « roi des fous ».
Après la fête, Esmeralda se réfugie dans Notre-Dame, où les soldats ne peuvent pénétrer. Frollo, en qui elle a éveillé le désir, la chasse de l'église et ordonne à Quasimodo de s'emparer d'elle. Le bossu la traque dans les rues de Paris. Les cris de la jeune fille attirent l'attention de Phoebus, le capitaine des gardes, dont elle tombe amoureuse.
Quasimodo est livré aux soldats. Entre-temps, Gringoire découvre les mendiants rassemblés, sous la conduite de leur chef, Clopin, dans la "Cour des Miracles". Prenant pitié de lui, Esmeralda accepte de "l'épouser" pour qu'il échappe à la pendaison.
Exposé au pilori, Quasimodo reçoit cinquante coups de fouet. Seule Esmeralda soulage ses souffrances en lui apportant à boire. Une fois relâché, le bossu retourne dans les tours de Notre-Dame. Ensorcelé par Esmeralda, Frollo la surprend dans les bras de Phoebus. Il le poignarde puis s'accuse du meurtre auprès de son frère, l'archevêque de Paris, et fait jeter Esmeralda en prison. Accusée de sorcellerie, la jeune fille plaide l'innocence mais, soumise à la torture, passe aux aveux. Alors qu'on la conduit à la potence, Quasimodo l'enlève et la met à l'abri dans la cathédrale, où elle bénéficie du droit d'asile. Frollo tente de faire annuler ce privilège.
De son côté, Gringoire distribue des pamphlets pour alerter le peuple. Inquiet, l'archevêque révèle au roi l'innocence d'Esmeralda. Frollo s'accuse. Les mendiants prennent la cathédrale d'assaut. Du haut des tours, Quasimodo les bombarde de pierres et d'huile bouillante. Clopin est tué. Quasimodo s'empare de Frollo, qui poursuivait Esmeralda, et le précipite dans le vide.
Claude surgit ensuite pour apprendre à Esmeralda que le roi l'a pardonnée et que son peuple peut aller partout où il veut en France. Il lui demande de remercier Quasimodo qui l'a protégé et Gringoire dont les imprimés l'ont libéré. Ce dernier emmène son épouse. Quasimodo assiste au départ du couple. Enlaçant une gargouille, il déclare : "Pourquoi ne suis-je pas fait de pierre comme toi ?". Un travelling arrière les fait devenir tout petits, perdus dans l'imposante cathédrale.
Dieterle poursuit le travail de relecture de l'oeuvre de Hugo amorcée par Worsley en 1923. Jehan devient Frollo et l'intrigue est simplifiée avec la disparition des personnages de Fleur de Lys et de la mère d'Esmeralda. La simplification conduit aussi à rendre mortel le coup de poignard donné à Phoebus par Frollo... Ce qui permet un happy end totalement étranger à Hugo mais dont bénéfice cette fois non seulement Esmeralda mais Gringoire.
La dimension tragique du roman disparaît pour ne garder que la vision humaniste, politique et historique de Hugo. Le prologue déroule un long carton :
"A la fin du XVème siècle, le Moyen-Âge s'achève. L'Europe connaît de grands bouleversements. La France ravagée par la guerre de Cent ans a trouvé la paix. Sous louis XI, le peuple se reprend à espérer, à rêver de progrès. Mais superstition et préjugé lui font souvent obstacle. Ils cherchent à étouffer l'esprit d'aventure de l'humanité".
Puis, le film s'ouvre sur une discussion entre Louis XI et Frollo. Le roi ne cessera d'affirmer sa foi dans le progrès technique comme dans le progrès humain. Il est un passeur entre l'ancien monde et le nouveau. Ainsi désignant Notre Dame de Paris peut-il déclarer :
"Face à nous se trouve l'ancien. Dans chaque village se dressent semblables cathédrales, triomphants édifices du passé, veillant sur nos logis comme de puissants gardiens, vivifiant la foi chrétienne. Chaque arc, chaque colonne, chaque statue est une page de notre histoire qui glorifie l'histoire de la France. Les cathédrales ont écrit le passé ; la presse écrit notre temps. Je ne m'y opposerais pas".
Car Frollo, représentant de l'obscurantisme des temps anciens, veut interdire les livres en France "comme les sorciers et les gitans" et se trouve donc à l'origine du drame.
Le roi ne se contente pas de venter la presse du Gutenberg et de contrecarrer à la manière de Hugo (livre 5, chapitre 2) la formule de Frollo : Ceci tuera cela : Le livre tuera l'édifice. Il voudrait encourager le voyage de Christophe Colomb, preuve pour lui que la terre est ronde. Il se montre aussi généreux avec les gitans. En ce sens, il est un messager du progrès comme le poète Gringoire qui déclame : "Le vieux ne peut jamais durer, le neuf réclame sa place. C'est folie de s'attacher au passé. Croyez en l'avenir".
Le film vaut aussi pour le merveilleux équilibre de l'interprétation. Charles Laughton, sans éclipser l'interprétation tragique de Lon Chaney, compose un Quasimodo terriblement humain et sensible. Maureen O'Hara, contrairement à Patsy Ruth Miller, bien trop années 20, est belle à damner tous les hommes. Alan Marschall compose un Phoebus écurant de fatuité. Cedric Hardwicke, Thomas Mitchell et Edmond O'Brien sont parfait en Frollo, Clopin et Gringoire.
Jean-Luc Lacuve le 18/09/2007
Editeur : Montparnasse : VO, VOST anglais et VF |
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Supplément : Présentation par Serge Bromberg (5 minutes). |