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Redacted

2007

Thème : Guerre d'Irak

(Revu et corrigé). Avec : Patrick Carroll (Reno Flake), Daniel Sherman (B.B. Rush), Rob Devaney (Barton McCoy), Izzy Diaz (Angel Salazar), Gabe Blix (Kel O'Neill), Mike Figueroa (Sergent Vazques), Shatha Haddad (la journaliste), Suhail Abdel Hussein (Le père de Farah), Paul O'Brien (le père de Barton), Hiyam Abdel Karim (La femme enceinte), Julie Thiery (la narratrice du barrage). 1h30.

Des soldats en garnison au check point de Samara. Le soldat Salazar filme leurs journées en caméra DV. Il espère que son film lui servira de passeport pour une école de cinéma.

Sous l'autorité du sergent les jours se passent tant bien que mal. Mais la tension monte. Un automobiliste pressé franchit le barrage. Les soldats tirent sur la voiture. La passagère était une femme enceinte que son frère conduisait à l'hôpital pour accoucher. Une journaliste nous informe que ni la mère ni le bébé n'ont pu être sauvés. B. B. Rush et Reno Flake sont les auteurs des tirs. Ils n'ont aucun remord.

faute d'effectifs suffisants, leur permission est refusée. Les soldats doivent continuer de fouiller tous ceux qui passent par le check point.

Un soir, le sergent conduit son groupe à la recherche d'armes chez un habitant. Le père est arrêté. Le lendemain au cours d'une banale inspection de terrain, le sergent saute sur une mine cachée dans un vieux ballon.

Au camp, B. B. Rush et Reno Flake ont maintenant pris l'ascendant sur les autres soldats. Ils proposent le viol collectif de la jeune irakienne que Rush fouille éhontément tous les matins et qui habite la maison où le père a été arrêté. L'intellectuel du groupe et Mac Coy refusent. Salazar aimerait bien pouvoir filmer cela.

Au cours du viol, Flake tue toute la famille irakienne. L'armée est soupçonnée mais personne ne dénonce personne. Le père de McCoy lui déconseille de dénoncer ses camarades.

Salazar est enlevé par des irakiens d'Al-Qaeda. Ils filment son exécution. La cassette où il est égorgé passe sur Al-Jezira.

Mc Coy finit par dénoncer B. B. Rush et Reno Flake qui invoquent la légitime défense.

De retour au pays où il est fêté comme un héros, McCoy raconte l'effroyable viol auquel il a assisté.

Des photos de morts irakiens victimes de la guerre défilent à l'écran.

Redacted s'appuie sur dix sources d'images différentes : un journal en vidéo HD, un documentaire français, des images de vidéosurveillance, un journal intime en ligne sur you Tube, un entretien en webcam, une cassette d'Al-Qaeda, des reportages télévisés en direct, des images de cinéma narratives (le retour de McCoy) ou métaphoriques (empruntée à La Horde sauvage : une Amérique en scorpion au dard arrogant tué par la multitude des fourmis) et finalement des photos de cadavres de la guerre dont De Palma a dû masquer le visage.

Lecteur attentif des oeuvres de Hitchcock et surtout des home movies (Greetings, 1968, Home movies, 1980), on pouvait espérer de la part de De Palma une réflexion sur les filtres à travers lesquels nous voyons et acceptons les événements mondiaux, sur le pouvoir de l'image médiatisée et l'influence exercée par la présentation des images sur ce que nous pensons et ce que nous croyons.

Le message de De Palma n'est hélas pas à la hauteur du dispositif déployé. Il consiste en cette banalité que la pression de la guerre sur de jeunes hommes, racaille de la société américaine, à des conséquences désastreuses.

A l'inverse d'Eastwood qui dans Mémoires de nos pères déchiffrait le mensonge d'une photo en creusant les traumatismes de l'Amérique, De Palma fait exploser un minable fait divers en de multiples sources d'images.

Un faux film post-moderne...

Les images utilisées ou, plus exactement, reconstruites par De Palma ne sont pourtant pas des images plus justes. Elles ne constituent pas la garantie d'un surcroît de vérité par rapport à celles de la fiction hollywoodienne. Elles produisent au contraire l'idée d'un pastiche de la réalité, d'un faux dispositif contrôlé par un metteur en scène omniscient.

Le faux documentaire français est emphatique dans son commentaire et sa musique et esthétisant dans ses couleurs et ses plans de soleils couchants. Ce pourrait être un pastiche d'un reportage arty pour Arte ou un pastiche du documentaire des frères Naudet sur le onze septembre. Enfin pour un reportage, filmé de l'extérieur comment expliqué le plan subjectif vu depuis la voiture où la femme enceinte va être tuée?

Le son des caméras de vidéosurveillance est d'excellente qualité et non pas déformé et souvent à peine audible comme il devrait l'être. L'effet de réel que l'on pourrait attendre d'une source supposée neutre et plate est également détruit par le fait que la caméra est calée sur les bonnes informations données au bon moment sur la préparation du viol et plus tard sur l'intimidation de B. B. Rush envers Mc Coy.

Les faux reportages télévisés ignorent la règle du contre-champ interdit. On voit mal dans un vrai reportage télévisé, la caméra s'attarder sur le visage de la reporter après la déclaration désespérée et rageuse du père après le massacre de sa famille.

...Pour un vrai désespoir moderne.

Il semble donc que De Palma n'ai pas voulu jouer la carte d'un surcroît de réalité dû au recyclage des nouvelles images. Sans soute a t-il voulu subvertir encore davantage le sous genre du film d'atrocité de guerre qu'il avait déjà abordé avec Outrages, réalisé il y a presque vingt ans. Dans ce film, le gentil soldat Eriksson s'opposait au méchant sergent Tony Meserve responsable du viol et du meurtre d'une jeune vietnamienne. Meserve, interprété par Sean Penn, et la hiérarchie étaient de réels adversaires pour Eriksson. Certes il n'y avait pas de réconciliation entre la brute protectrice et l'intellectuel sentimental comme on avait pu en voir tant dans le film de guerre classique mais, du moins, l'opposition était solide.

Ce que décrit aujourd'hui de Palma c'est un monde qui communique sans savoir bien discerner le vrai du faux. Les soldats se pastichent eux-mêmes en se filmant ou en interprétant un curieux happening après la mort de Salazar. B. B. Rush et Reno Flake, déguisés avec des têtes de canards rendent hommage à leur copain. Soudain Flake raconte une scène de son enfance avec son frère qui n'a rien à faire ici. Ce sera le seul moment de vérité capté par le film.

Jean-Luc Lacuve le 14/03/2008

 

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