Editeur : Wild Side Video, février 2012. Master restauré. Format Image 1.77. Format son : Anglais & Français Mono. Sous-titres : Français. Durée : 1h27. 15 €.

Suppléments :

  • La loi des désirs : entretien avec Bernard Eisenschitz (13') -
  • Galerie photos - Bande-annonce

Carl Buckley (Broderick Crawford) tue l'amant de sa femme Vicki (Gloria Grahame). Témoin de la scène, elle avoue le meurtre à Jeff Warren (Glenn Ford), un collègue de Carl. Pour ne pas compromettre Vicky dont il s'est épris, Jeff garde le silence. Les amants décident alors de tuer le mari…

DÉSIRS HUMAINS réunit à nouveau Gloria Grahame et Glenn Ford, le couple inoubliable du film précédent de Fritz Lang, Règlement de comptes. Bien que le film soit nominalement un remake de l'adaptation libre par Jean Renoir du roman de Zola La Bête humaine, Lang remodèle entièrement le récit, l'adapte à ses méthodes et ses obsessions. Il le situe au présent des Etats-Unis, au cœur d'une période de conformisme qu'il voit avec lucidité et amertume. Loin des métropoles, il tourne certains de ses plus beaux extérieurs. Une gare et une petite ville américaine typiques. Lang met l'accent sur les mensonges des femmes, seule condition de leur survie, et la faiblesse des hommes, qui leur fait commettre l'irréparable.

La loi des désirs : entretien avec Bernard Eisenschitz (13')

Après le grand succès de Règlement de comptes, c'est le deuxième film de Fritz Lang pour Jerry Wald à la Colombia, un producteur pour lequel il a beaucoup d'estime. Wald aimait beaucoup La bête humaine de Renoir tiré du roman de Zola où le crime est lourdement lié à l'hérédité, à l'alcoolisme et à la sexualité. Wald y voit la matière d'un film pour Lang mais ce sont pourtant ces mêmes ingrédients qui se heurtent à la censure : dans un film américain, il est alors impossible d'avoir un héros soumis à des pulsions sexuelles. Il y aura ainsi huit versions successives du scénario dont la paternité revient, après de nombreux détours, à Alfred Hayes, homme de gauche, coscénariste pour Paisa de Rossellini.

Lang revoit le film de Renoir en avril, alors qu'il termine Règlement de comptes, pour un tournage qui ne débutera qu'en décembre. Il admire Renoir dont il a fait un remake de La chienne avec La rue rouge et où le meurtre de la femme joue aussi un rôle important.

Cependant, face à l'impossibilité de travailler la matière de Zola et de Renoir, Lang va garder quelques péripéties du scenario mais les traiter de manière très personnelle, différente et même opposée à celles de Zola-Renoir.

Les conducteurs sont ainsi très tranquilles à l'intérieur de machines, monstres d'aciers dépourvus de toute familiarité avec leur conducteur. Lorsque le mari vieillissant découvre que sa femme a été l'amant de son parrain (protecteur), l'incident est traité très différemment. Chez Renoir, la curiosité malsaine du mari domine. Sa femme aurait pu être la fille de son protecteur mais il découvre qu'elle a été sa maîtresse, comme sa mère. Chez Lang la brutalité du mari domine. Les personnages masculins sont invariablement monolithiques. Jeff Warren est un conducteur de train qui retrouve un conducteur de train et est destiné à épouser la fille de ce conducteur de train. La seule chose qui le distingue, s'est qu'il tombe amoureux d'une femme mariée. Le choix de Glen Ford pour l'interpréter renforce sa position de faire valoir du désir d'une femme. Lang aurait préféré lui opposer Rita Hayworth mais doit se contenter de Gloria Graham qu'il apprécie peu. Il lui invente des poses (pied levé), des costumes variés ce qui surajoute au talent de l'actrice qui sans cesse semble regarder, surveiller, toujours à l'affût. C'est une femme qui s'accroche à quelque chose qui lui permet de surnager, qui aspire à la survie dans un milieu dans lequel elle étouffe, entre une télévision et une cage à oiseau. Les rails, vus depuis la fenêtre et le bruit des trains l'enferment. Elle veut partir mais Jeff Warren la laisse tomber dès qu'il la prend au piège de ses mensonges. Il se conforme à une société sans humanité autre que la vie normale la rejette pour ses mensonges (elle dit toujours sa vérité mais ment). Il est cet archétype de l'Amérique contemporaine, ce héros sans gloire de la guerre de Corée qui revient dans une petite ville où tout se sait (Tourné en Californie mais impression d'une ville du nord des environs de Chicago).

Le film sera un échec public et critique. On le compare à la bête humaine sans comprendre ce que Lang a voulu y mettre. Celui-ci cherche alors des producteurs indépendants à New York et en Allemagne. Il réalisera encore trois chefs-d'œuvre aux Etats- Unis mais dans des conditions de production très difficiles. La MGM ne croit guère en ce petit film d'aventures qu'elle croit être Moonfleet et Lang connaitra les pires difficultés avec son producteur de La cinquième victime et de L'invraisemblable vérité.

 

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Désirs humains de Fritz Lang