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(1922-2019)
30 films
   
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Jonas Mekas nait le 24 décembre 1922 dans le village de Semeniškiai, près de Biržai en Lituanie. D'une famille de fermiers, il fait, encouragé par un oncle pasteur, des études secondaires et il s'essaie à la poésie.

Le pacte Hitler-Staline du 23 août 1939 permet l'occupation de la Lituanie par Union soviétique. Jonas Mekas écrit un poème violemment anti-stalinien. Si bien que, lorsqu'en 1941, l'Allemagne envahit la Lituanie lors de sa vaste offensive vers Moscou, Jonas Mekas et son frère ne peuvent rester longtemps dans la résistance, partagée entre nationalistes et communistes. Ils tentent de fuir vers la Suisse mais voyageant clandestinement, ils se trompent de trains et prennent la direction de l'Allemagne. Ainsi en 1944, ils sont pris par les nazis et envoyés dans un camp de travail près de Hambourg ; tous deux s'en échappent.

Après la guerre, personnes déplacées en Allemagne, ils étudient les lettres, découvrent le cinéma. La Lituanie occupée par les Soviétiques, Jonas et son frère se demandent où aller. Ils pensent à Israël qui vient juste de déclarer en 1948 la naissance de son Etat, l'Egypte, peut-être pour rejoindre à pied la Terre promise, mais les places sont chères et les quotas limités pour les Lituaniens. On leur propose Sydney, ce sera finalement Chicago. Ils n'arriveront jamais à Chicago. Adolfas et Jonas débarquent à New York en 1949. Ils n'iront pas plus loin parce que c'est New York, et que cela ressemble à un point d'ancrage, l'univers, tout l'univers des possibles.

De Brooklyn à Manhattan

Une semaine après son arrivée en Amérique, Jonas Mekas achète la Bolex, caméra 16mm, et regarde ce quartier de Brooklyn, Williamsburg, où il a débarqué avec Adolfas. "Ces gens-là attendent, comme en transit. Ils ne comprennent pas encore qu'ils ne reviendront jamais dans leur pays d'origine". Alors, il faut s'y faire, s'organiser une vie. Jonas Mekas observe, la misère, la pauvreté, l'errance, la vie, la solitude. Le noir et blanc, les visages d'enfants, des épiciers, des voisins. Sans savoir encore précisément, il commence là un journal. C'est dans Williamsburg, Brooklyn qu'il s'attachera, bien plus tard, en 2003, à reprendre ses images de 1950 pour en restituer l'atmosphère dans ce court métrage de 15'.

Williamsburg, Brooklyn (2003, 15'), reprise des images tournées en 1950

Ce retour en arrière avait déja été mis en forme dans les premières images du journal filmé qu'il montera en 1976 pour la période de 1950 à 63 dans Lost, Lost, Lost : "La période que je décris à travers ces six bobines de film fut une période de désespoir, de tentatives pour planter désespérément des racines dans cette terre nouvelle, pour créer des souvenirs. À travers ces six douloureuses bobines, j'ai essayé de décrire les sentiments d'un exilé, mes sentiments pendant ces années-là. Elles portent le nom de Lost, Lost, Lost , titre que nous voulions donner, mon frère et moi, à un film que nous voulions faire en 1949 et qui aurait suggéré notre état d'âme en ces temps-là. Le film décrit l'état d'esprit d'une "personne déplacée" qui n'a pas encore oublié son pays natal mais qui n'en a pas encore "gagné" un nouveau. La sixième bobine est une transition, elle montre comment nous commençons à respirer, à trouver quelques moments de bonheur. Une nouvelle vie commence..."

Lost, Lost, Lost (1976) : "Une semaine après notre arrivée en Amérique (Brooklyn) nous avons emprunté de l'argent et acheté notre première Bolex"

La suite de sa biographie est à chercher dans la première bobine de Reminiscences of a journey to Lithuania, monté en 1973 "Cette œuvre est composée de trois parties. La première est faite de films que j'ai tournés avec ma première Bolex à notre arrivée en Amérique, surtout pendant les années 1950 à 53. Ce sont les images de ma vie, de celle d'Adolfas, de ce à quoi nous ressemblions à l'époque; des plans d'immigrants à Brooklyn, pique-niquant, dansant, chantant ; les rues de Williamsburg."

Reminiscences of a journey to Lithuania, (1973), Williamsburg dans Brooklyn en 1950

"I left Brooklyn to go to Manhattan". La vraie vie peut enfin commencer. Jonas rejoint les cercles de poètes, lit de la poésie, va au cinéma, s'entoure de jeunes gens de son âge. L'exil prend fin. Une forme de tristesse aussi peut-être. Une renaissance, et une adhésion à la ville, à son décor, ses rues, ses immeubles, Central Park.

Jonas Mekas crée en 1955 la revue Film Culture et défend, à partir de 1959, dans ses articles du Village Voice, l'idée d'une Nouvelle Vague américaine. Instigateur du New American Cinema Group (1960), qui réclame des films rudes, mal faits peut-être, mais vivants, il prêche d'exemple en tournant Guns of the trees (1961) puis avec le Living Theatre, The Brig (1964). Mekas, toujours avec sa caméra 16mm et son magnétophone y enregistre en un après-midi une représentation de la pièce du même nom du Living Theatre qui raconte avec âpreté et réalisme le traitement sadique et dégradant auquel sont soumis dix marines punis et mis au cachot. "Je n'avais jamais vu la pièce avant de monter sur la scène. Dans le filmage, j'ai voulu appliquer les techniques de ce que l'on appelle le cinéma vérité, à une représentation théâtrale. Je voulais, peut-être, ébranler, quelques mythes et mystifications du cinéma vérité : qu'est ce qui est vrai au cinéma ?"

The Brig (1964)

L'authenticité abrupte du film lui permet de remporter le grand prix du documentaire au festival de Venise. Mais l'échec public de ce rêve de cinéma indépendant dans le système l'amène à se radicaliser : il devient avec fougue et générosité, par ses actes et ses articles, le principal animateur du cinéma underground notamment grâce à la Film-Maker's Cooperative qu'il a cofondé en 1962. Notes on the Circus (1966, 12') ou Cassis (1966, 4') appartiennent encore au genre expérimental où il importe de saisir l'éclat de la lumière, la fulgurance du moment et où montage et transparences occupent une place importante.

L'épanouissement dans le journal filmé

Walden (Diaries, notes and sketches) (1969) marque la volonté de Mekas de réaliser et de montrer ce qui sera connu comme un "journal filmé", sa décision de faire, tout seul, un film encore plus long qu'un long métrage comme un défi non seulement aux codes d'Hollywood mais aussi aux traditions corporatistes du cinéma aussi bien américain qu'européen. Walden, journal filmé en six bobines entre 1964 et 1968, est dédié à Lumière à l'innocence d'une première fois face au monde avec le cinématographe. Dans Walden, Mekas met en relief des personnalités importantes de la scène artistique new-yorkaise des années 60 mais il s'agit avant tout de mettre en avant un regard sur un lieu en se réclamant de la tradition poétique de Henry David Thoreau (1817-1862). Le poète philosophe publia Walden en 1854. Le livre oscille entre l'essai et le récit autobiographique d'une expérience mené par l'écrivain qui, pendant deux années a vécu retiré du monde dans une cabane qu'il a lui-même construite près de l'étang de Walden dans le Massachusetts.

Walden (1969)

Ainsi avec Walden (Diaries, notes and sketches) commence l'oeuvre majeure de Jonas Mekas : son journal filmé qui regroupe de longs assemblages de scènes pointillistes, filmées par petites giclées rapides les moments significatifs de sa vie. ("Rimbaud avait ses illuminations, moi j'ai mes éliminations" dirat-il pour commenter son travail de condensation). Il poursuit ce journal avec Reminiscence of a journey to Lithuania (1972), "commande" de la télévision allemande qu'il accepte avec pour seul financement le remplacement de sa vieille Bolex fatiguée. Mais il peut ainsi rejoindre sa mère dont il est séparé depuis 25 ans et, le mur n'etant pas encore près de tomber, qu'il sait ne plus revoir. Comme tous ses journaux filmés, celui-ci est emprunt d'une immense joie de vivre où danses et accordéons se succedent. Dans le commentaire réalisé a posteriori des pointes de nostalgie et de mélancolie se font toutefois entendre. Il monte aussi Lost Lost Lost, 1976 ; Paradise not yet lost, 1980 ; He stands in a desert, Counting, the seconds of his life, 1985..

En 1970, Jonas Mekas crée avec P. Adams Sitney, Anthology Film Archives, cinémathèque new-yorkaise du film expérimental. Juste avant de mourir, son ami Jerome Hill lui avait fait cadeau d'une île deserte. Celle-ci menaçant d'être engloutie, Jonas Mekas la revend pour 25 000 dollars afin d'investir dans un bâtiment capable d'abriter l'Anthology Film Archives. Après avoir été concurencé par la mafia pour un premier bâtiment, il achète celui situé au 32 de la Seconde Avenue, dans Manhattan. Le soutient d'Agnes B. et d'autres riches amis, lui permet de financer cette structure.

As I was moving ahead occasionally I saw brief glimpses of beauty (2000) couvre les journaux filmés de 1970 à 1999. "Cela couvre mon mariage, la naissance de mes enfants, on les voit grandir. Des images de la vie quotidienne, des fragments de bonheur et de beauté. Les voyages en France, Italie, Espagne et Autriche. Les saisons, comme elles passent à New York, la vie à la maison, la nature. Rien d'extraordinaire, rien de spécial, des choses que nous vivons tous au cours de notre vie. Il y a beaucoup d'intertitres qui reflètent mes pensées de l'époque. La bande sonore est constituée de musiques et de sons enregistrés pendant la même période que les images, avec des improvisations d'Auguste Varkalis au piano. Quelquefois, je parle dans mon micro pendant que je suis en train de monter, au présent, avec le temps qui a passé. Ce film est aussi mon poème d'amour dédié à New York, ses étés, ses hivers, ses rues, ses parcs"

Avec Self-Portrait (1980, 20') Jonas Mekas inaugure son utilisation de la caméra video qui va devenir pour lui aussi importante que le 16mm dans les années 90. The Education of Sebastian or Egypt Regained (1992, 6h00) en est le premier Chef-d'oeuvre. Il simplifie le tournage, aimant poser la caméra pour s'y livrer à un commentaire en directe, moins teinté de nostalgie que dans ses films cinéma. Dans les années 2000, Jonas Mekas élabore aussi un site internet très documenté et dynamique.

En 2012, le Centre Pompidou lui consacre une rétrospective, la Galerie du Jour une exposition photographique, et les éditions Potemkine un très beau coffret DVD. Cette même année, la Serpentine Gallery organise une exposition de ses travaux récents, et le British Film Institute une programmation de ses films.

Jonas Mekas décède le 22 janvier, à New York, à l’âge de 96 ans.

Bibliographie-sitographie :

Filmographie :

Courts-métrages :
1963 : Film Magazine of the Arts
1964 : Award Presentation to Andy Warhol
1966 : Notes on the Circus (12'), Cassis (4'), Hare Krishna (4'), Repport from Millbrook (12').
1968 : Time and fortune Vietnam newsreel (4').
1980 : Self-Portrait (20'- video)
1981 : Travel songs (25').
1982 : Scenes from the Life of Andy Warhol : Friendships and Intersections
1990 : Self Portrait
1991 : Quartet number one (8').
1992 : Zefiro Torna or Scenes from the Life of George Maciunas (Fluxus)
1995 : Imperfect three-image films (6').
1997 : Happy Birthday to John
1998 : Song of Avignon (5').
1999 : This Side of Paradise (35')
2000 : Mozart, Wien and Elvis (3').
2003 : Williamsburg, Brooklyn (15').
2009 : 42 One Dream Rush
2009 : I Leave Chelsea Hotel (4')
2010 : WTC Haikus
2011 : Mont Ventoux (3')
2012 : Happy Easter Ride (18')
2012 : Reminiszenzen aus Deutschland (25')

 

Longs-métrages :

1961 Guns of the trees
Avec : Adolfas Mekas (Gregory), Frances Stillman (Barbara), Ben Carruthers (Ben), Argus Spear Juillard (Argus), Frank Kuenstler (Frank), Louis Brigante (Luis). 1h15.

Deux couples, un blanc, l'autre noir vivent à New York avec le spectre de la bombe atomique qui plane au dessus d'eux. Ils essaient de comprendre pourquoi leur amie, Barbara, une jeune femme, s’est suicidée.

   
1964 The brig

Avec : Warren Finnerty, Jim Anderson, Henry Howard, Tom Lillard (les gardiens), James Tiroff, Steven Ben Israel, Gene Lipton, Rufus Collins, Michael Elias (Les Marines punis). 1h08.

Scène du Living Theatre. Sur scène, un cachot où sont enfermés dix prisonniers sous la surveillance d'un sergent-chef, d'un sergent et de deux caporaux. Nous sommes le 7 mars 1957, camps d'infanterie de Marines à Fuji au Japon, 4h30. N°2 est tiré de son lit par le caporal. "Je suis une épave" doit-il répéter pendant qu'il est frappé de violents coups de poings au ventre. Le sergent et les deux caporaux réveillent ensuite les dix prisonniers qui, continuellement, demandent l'autorisation de "passer la ligne", séparation tracé au sol entre le cachot et les toilettes ou le cachot et l'espace d'exercices....

   
1969 Walden
(Diaries, Notes & Sketches). 16 mm. Filmé en 1964-1968, monté en 1968-1969. 3h00.

Depuis 1950, je n'ai cessé de tenir mon journal filmé. Je me promenais avec ma Bolex en réagissant à la réalité immédiate : situations, amis, New York, saisons. Certains jours, je tournais dix plans, d'autres jours dix secondes, d'autres dix minutes, ou bien je ne tournais rien... Walden contient le matériel tourné de 1964 à 1968 monté dans l'ordre chronologique....

   
1972 Reminiscences of a journey to Lithuania

1950-71/1972 16 mm couleur et n&b. 1h22.

Film composée de trois parties. La première est faite de films tournés avec par Mekas avec sa première Bolex à son arrivée en Amérique, surtout pendant les années 1950 à 53. La seconde partie a été tournée en août 1971, en Lituanie. La troisième partie débute par une parenthèse sur Elmshorn, un faubourg de Hambourg, où la famille de Mekas apassé un an dans un camp de travaux forcés pendant la guerre.

   
1973 This Side of Paradise : Fragments of an Unfinished Biography
  16 mm couleur et n&b. 0h35.

« De façon imprévue, comme ont pu l'être les moments clés de ma vie, j'ai eu la chance à la fin des années soixante et au début des années soixante-dix, de pouvoir passer plusieurs étés en compagnie de Jackie Kennedy, de sa sœur Lee Radziwell, de leur famille et de leurs enfants. Le cinéma constituait une part intégrale, inséparable et à vrai dire un élément clé de notre amitié.
A cette époque, la mort tragique prématurée de John F. Kennedy était encore très proche. Jackie voulait donner quelque chose à « faire » à ses enfants afin d'adoucir la transition, la vie sans leur père. Elle pensait qu'une caméra pourrait amuser les enfants. Peter Beard, qui exerçait alors la fonction de tuteur de John Jr. et de Caroline pour leur enseigner l'histoire de l'art, suggéra à Jackie que j'étais l'homme qu'il lui fallait pour initier les enfants au cinéma. Jackie accepta. Et c'est ainsi que tout a commencé.
Les images de ce film proviennent toutes, à quelques exceptions près, des étés que Caroline et John Jr. ont passé à Montauk, en compagnie de leurs cousins Anthony et Tina Radziwell, dans une maison que Lee avait loué à Andy Warhol pour quelques étés. Andy passa lui-même quelques week-ends là-bas, dans l'un des cottages, de même que Peter Beard, que les enfants avaient adopté comme leur grand frère ou comme le père qui leur manquait.
Ce furent des étés de bonheur, de joie et une continuelle célébration de la vie et de l'amitié. Ces journées furent comme des Petits Fragments de Paradis. » - Jonas Mekas

   
1976 Lost, Lost, Lost

1949-63/1976 16 mm couleur et n&b. 3h00.

Filmé en 1949-1963, monté en 1976. Avec Jonas et Adolfas Mekas (premières années à New York) et la communauté immigrée lituanienne; Robert Franck tournant The Sin of Jesus, LeRoy Jones, Allen Ginsberg, Franck O'Hara au Living Theater; manifestations pour la paix; à la Film-Maker's Cooperative; tournage de Hallelujah the Hills, vues de New York; séminaire Robert Flaherty; portrait de Tiny Tim; ouverture de Twice a Man (par Gregory Markopoulos); la campagne vue par Jonas Mekas, d'une part, et Ken Jacobs, d'autre part.
« ...La période que je décris à travers ces six bobines de film fut une période de désespoir, de tentatives pour planter désespérément des racines dans cette terre nouvelle, pour créer des souvenirs. À travers ces six douloureuses bobines, j'ai essayé de décrire les sentiments d'un exilé, mes sentiments pendant ces années-là. Elles portent le nom de Lost, Lost, Lost, titre que nous voulions donner, mon frère et moi, à un film que nous voulions faire en 1949 et qui aurait suggéré notre état d'âme en ces temps-là. Le film décrit l'état d'esprit d'une « personne déplacée » qui n'a pas encore oublié son pays natal mais qui n'en a pas encore « gagné » un nouveau. La sixième bobine est une transition, elle montre comment nous commençons à respirer, à trouver quelques moments de bonheur. Une nouvelle vie commence.. » - Jonas Mekas, 31 mars 1976

   
1978 Notes for Jerome

 

1966-78 16 mm couleur. 0h45.

« Pendant l'été 1966, je passais deux mois à Cassis, invité par Jerome Hill. Je lui fis une brève visite de nouveau en 1967 avec P. Adams Sitney. Les premiers métrages de ce film datent de ces deux premières visites. Plus tard, après la mort de Jerome, je revins dans sa maison en 1974. C'est ce qui constitue l'épilogue de mon film. D'autres personnages apparaissent, tous des amis de Jerome : Taylor Mead, Bernadette Lafont, Charles Rydell, Barbara Stone, David Stone et leurs enfants, Noel Burch, Judith Malina, Julian Beck et la troupe du Living Theater, Mme Chaliapin, Jean-Jacques Lebel, Michel Fontayne, Alec Wilder, P. Adams et Julie Sitney, et aussi la plus proche et plus ancienne amie de Jerome dont j'ai oublié le nom mais qu'il appelait toujours Rosebud. La bande-son date de cette période et a été enregistrée à Cassis... Le texte de ma chanson lituanienne est : « Le soleil se couche, le ciel est rouge, je suis assis au bord de la mer et je fredonne pour moi-même. » C'étaient des étés solitaires, je pensais beaucoup à la maison. Voilà pourquoi ce film, cette élégie pour Jerome est dédiée « au vent de Lituanie ». Parfois, cependant, j'ai l'impression que Jerome était aussi exilé que moi. » - Jonas Mekas, 27 octobre 1978

   
1978 In between
 

1964-68/1978 16 mm couleur. 0h52.

« Le matériel de ce film a été fourni par le métrage non utilisé dans Walden. Une partie se place entre (« in between ») Lost, Lost, Lost et Walden. La plus grande partie du film montre New York et quelques prises de vues de voyage. Ce sont des amis new-yorkais : Richard Foreman, Amy Taubin, Mel Lyman, Peter Beard, David Wise, Andrew Meyer, Salvador Dali, Jerome Hill, David et Barbara Stone, Adolfas Mekas tournant Double Barrelled Detective Story, Diane di Prima, Allen Ginsberg, Norman Mailer, Ed Sanders, Gordon Ball, Henri Romney, Jack Smith, Shirley Clarke, Louis Brigante, Jane Holzer, etc. C'est l'œuvre d'une époque. Le son a été enregistré à peu près au même moment. Un peu de musique de radio, quelques disques, ma propre voix, des voix d'amis. Mel Lyman jouant du banjo sur le toit de la 23e rue, a été enregistré avec le vent soufflant dans le micro. » - Jonas Mekas

   
1979 Paradise not yet lost

 

(Oona's Third Year). 1977-1979 16 mm couleur. 1h37.

« Le film se divise en six parties. La première se passe à New York et nous y voyons de nombreuses scènes quotidiennes à la maison et en ville, et également notre fille Oona qui a trois ans. D'autres sujets aussi : concert de Peter Kubelka; visite à Marie Deren, la mère de Maya; parade de St Patrick's; printemps à Central Park; etc.
La deuxième partie, très brève, se passe en Suède pendant notre visite à Anna Lena Wibom.
La troisième partie se passe en Lituanie pour le 90ème anniversaire de ma mère avec ma femme Hollis et Oona, alors âgée de deux ans et demi. Oona rencontre ses cousins, on boit de la bière faite à la maison, on se promène à travers les bois, on cueille des champignons et des fraises sauvages, on s'amuse.
La quatrième partie se passe en Autriche, on rend visite à Peter Kubelka et à Hermann Nitsch à Prinzendorf, on goûte le vin de Hermann, on parle aux ânes de Peter, on visite Saint-Nicolas à Kremsmuenster, puis nous allons en Italie avec Peter à la recherche du vin de Michel-Ange, le Canaiola.
La sixième partie est le retour à New York; visite à Willard Van Dyke; 3ème anniversaire d'Oona, incendie à Broome Street, encore des scènes d'intérieur, début des tempêtes d'hiver.
C'est un diary film, mais c'est aussi une méditation sur le thème du Paradis. C'est une lettre à Oona pour l'aider, un jour, à se souvenir de ce qu'était le monde autour d'elle quand elle avait trois ans. Une époque dont elle n'aura que quelques petits fragments de souvenirs dans sa mémoire. Un guide romantique pour lui rappeler les valeurs essentielles de la vie, dans un monde artificiel, commercial, (un) poison pour le corps et l'esprit. » - Jonas Mekas, novembre 1979).

   
1983 Cup/Saucer/Two Dancers/Radio

 

1965-83 16 mm couleur. 0.h23

Cup/Saucer/Two/Dancers/Radio (1964), hapenning de Kenneth King, est un essai de style « pop art », dans lequel tous les éléments cités dans le titre ont leur importance. Phoebe Neville, vêtue d'un soutien-gorge et d'une guêpière, avec bigoudis, portant des chaussons de danse pour marcher sur les pointes, un poste de radio collé à l'oreille. King, vêtu de sous-vêtements et d'une cravate noire, fait de la gymnastique suédoise. Ils renversent sur leurs corps un mélange de couleurs avec une tasse à café, s'embrassent sans émotion et caressent mutuellement leurs corps de façon mécanique, alors que des airs de rock'n roll viennent comme commentaires ironiques de la scène, sur laquelle s'élève une voix explique la structure de la danse. Mekas, qui, en 1965, a enregistré un spectacle de ce mouvement de danse post moderne, en a fait un film extraordinaire, avec des couleurs qui passent du doux au vif, et un centre d'intérêt encadrant objets et parties du corps si fortement, que le spectateur, en accord avec le thème d'aliénation de l'homme, est forcé de comprendre la totalité de la danse en réunissant ces fragments dans son esprit. - (Sally Banes, The Village Voice, 18 octobre 1983)

   
1985 He stands in a desert counting the seconds of his life

 

1969-85 16 mm couleur. 2h40.

«A l'origine, j'avais l'intention d'appeler ce film Sketches anthropologiques. Il consiste d'une part en scènes, activités, happenings, évènements extérieurs ou presque de ma vie que j'ai observé avec un peu de distance. D'autre part, certains passages touchent ma vie privée; je les ai inclus pour équilibrer et réchauffer le matériel impersonnel... Le film est composé de 124 petits sketches, d'une durée de 30 secondes à 2 minutes. Ce sont les portraits des gens avec lesquels j'ai passé du temps, des lieux, des saisons, des orages et des tempêtes de neige, des amis cinéastes comme Hans Richter, Roberto Rossellini, Marcel Hanoun, Adolfo Arrieta, Henri Langlois, Alberto Cavalcanti, Peter Kubelka, Ken Jacobs, Kenneth Anger, les frères Kuchar, Robert Breer, Willard Van Dyke, Hollis Frampton, ou juste des amis comme John Lennon, Jackie Onassis, Lee Radziwill, John Kennedy Jr. et Caroline, Tina et Anthony Radziwill, Peter Beard, Andy Warhol, Richard Foreman, P. Adams Sitney, Yoko Ono, Raimund Abraham, Hermann Nitsch, Allen Ginsberg, George Maciunas, sans compter tous les autres et les rues et les parcs de New York - brèves escapades dans la nature, hors de la ville - rien de spectaculaire... Célébrations de la vie qui s'enfuit à l'instant même et qui n'est retenue que dans ces sketches brefs et personnels. "Vous tenez un journal intime et le journal vous tiendra", dit Mae West à Peter Beard. » - Jonas Mekas

   
1990 Mob of angels : A baptism
 

vidéo. 1h00.

« Une seule prise continue. J'ai vidéographié le baptême d'un enfant par un membre d'un groupe de percussions intitulé The Mob of Angels. C'est une troupe de femmes jouant des percussions dans la tradition des rythmes sacrés de la Méditerranée antique. Le tournage commence dans la rue. J'entre dans le lieu où le baptême se déroule, je l'enregistre, puis je sors dans la nuit de cette rue de New York. Entre-temps, je raconte des histoires, je parle de la vie et de l'éternité. » - Jonas Mekas.

   
1991 Scenes from the life of Andy Warhol : friendships and intersections

 

1965-82/1991 16 mm couleur. 0h37.


Ce film est constitué d'images que Mekas a filmées pendant tout le temps où il a connu Andy Warhol. Ces images n'avaient pas été jusqu'alors montées, et par conséquent, pas montrées non plus. Le film s'ouvre sur l'un des premiers concerts du Velvet Underground au Dom alors que sur scène Edie Sedgwik et Gerard Malanga muni de son fouet, dansent. Le son est strident, rauque, et accompagne admirablement les éclats de concert, puis d'une fête dans un appartement. Et puis sur ces images, la voix de Jonas Mekas se fait entendre : « So long Andy, see you again for sure ». Ainsi Jonas Mekas fait alterner des séquences qui mettent en scène le personnage public, l'artiste - la très belle séquence sur la rétrospective Warhol au Whitney Museum, avec des séquences intimistes, Warhol à la plage, ou avec des amis. À côté de ces images, Mekas recourt, comme à son habitude, à des intertitres qui peuvent être des évocations poétiques, ou des réflexions, sur le film que l'on voit. Le film devenant - comme c'est souvent le cas chez Mekas - d'une part un document sur des événements vécus et d'autre part une quête nostalgique d'un passé irrémédiablement perdu. Passé qui n'est pas forcément celui que nous proposent les images. Le film est ce qui permet de renouer avec les souvenirs, et par conséquent avec les émotions et qui sait, peut-être aussi, avec la fraîcheur du regard pour les gens et pour le monde. Ce regard ne peut-être que nostalgique. « So long Andy... » - (Yann Beauvais)

   
1992 The education of Sebastian or Egypt regained

 

vidéo couleur. 6h00.

Vidéo qui retrace un voyage mental et physique à travers cinq mille ans de l'histoire de l'Egypte... Tout ce qu'on y voit est très personnel et se déroule sans hâte, sans beaucoup de signification pour les autres peut-être, mais d'une importance cruciale pour moi, un enregistrement qui n'est pas destiné au public mais à partager avec des amis pendant une soirée, ou deux peut-être. Sans doute, est-ce une lettre à mes amis sur mon retour à Ithaque, un cadeau pour Sebastian, cela pourrait lui servir de guide pour ses premiers voyages. Que le destin lui en fournisse de meilleurs ! - (Jonas Mekas).

   
1997 Scenes from Allen's Last Three Days on Earth as a Spirit
 

vidéo couleur. 1h07.

« Enregistrement vidéo de la veillée mortuaire d'Allen Ginsberg, dans son appartement. Dormant maintenant pour toujours, on voit Allen dans son lit, entouré de ses amis proches. La levée de son corps. Je raconte ma dernière conversation avec Allen, trois jours plus tôt. Puis, c'est le dernier adieu au Temple boudhiste, à New York, en présence de ses amis : Peter Orlovsky, Patty Smith, Gregory Corso et de beaucoup d'autres. » - Jonas Mekas

   
1997 Letter to Friends ... From Nowhere... Video Letter # 1

 

vidéo couleur. 1h28.

« 12 croquis de mes voyages, de ma vie quotidienne, de mes amis : le travail très romantique que je fais à l'Anthology, Ben Vautier en conférence à Budapest, le musée du graffiti dans le Bronx, Peter Kubelka au Mont Saint-Michel, en décembre 1992, et la fabrication d'une omelette, à l'ancienne... Je ne sais pas si c'est du cinéma, c'est juste une lettre, pour vous mes amis » - Jonas Mekas.

   
1997 Birth of a Nation

 

Avec : P. Adams Sitney, Peter Kubelka, Hollis Melton, Ken Jacobs, Harry Smith, Henri Langlois, Annette Michelson, Hollis Frampton, Steven Dwoskin, Kenneth Anger, Jacques Ledoux, Saul Levine, Pascale Dauman, Michael Snow, Ricky Leacock, Stan Brakhage, Bruce Baillie, Chantal Akerman, Sally Dixon, Adolfas Mekas, Nelly Kaplan, Malcolm Le Grice, Barbara Rubin, Anna Karina, Gregory Markopoulos, Robert Beavers, Robert Kramer, Jerome Hill, Donald Richie, Leni Riefenstahl, Louis Marcorelles, Viva, Paul Shrader, Shirley Clarke, LaMonte Young, George Maciunas, Alberto Cavalcanti, Jim McBride, Peter Bagdanovich, Rosa von Praunheim, Hans Richter, Roberto Rossellini, Lionel Rogosin, Robert Haller, Storm De Hirsch, Marcel Hanoun, Bruce Conner, Paul Sharits, Carolee Schneemann, Adolfo Arrieta, Louis Brigante, Charles Chaplin, Len Lye, Tati, Allen Ginsberg, Valie Export, Hermann Nitsch, Andy Warhol, Jack Smith, Robert Breer. 1h25.

"Cent-soixante portraits, apparitions, sketches et aperçus de l’avant-garde, de réalisateurs indépendants et d’activistes du cinéma de 1955 à 1996. Pourquoi Birth of a Nation ? Parce que les films indépendants forment une nation. Nous sommes cernés par la nation du cinéma commercial à la manière des indigènes d’Amérique et d’autres pays, cernés par le pouvoir dominant. Nous sommes invisibles, mais nous constituons une nation essentielle du cinéma. Nous sommes le cinéma." Jonas Mekas.

   
2000 Gimme some truth : the making of John Lennon's Imagine Album

Avec : Lennon, Yoko Ono, Phil Spector. 1h03.

Imagine, album solo de l'ex-Beatle John Lennon est immédiatement considéré comme un chef-d'oeuvre lors de sa sortie en 1971. Le producteur-réalisateur Andrew Solt avait filmé son processus créateur en 16mm. La veuve de Lennon, Yoko Ono a donné son accord pour intégrer ces archives au clip Imagine, précédemment intégré au documentaire de 1988 : Imagine: John Lennon.

   
2000 As I was moving ahead occasionally I saw brief glimpses of beauty

1970-2000 16 mm couleur. 4h48.

« Mes journaux filmés de 1970 à 1999. Cela couvre mon mariage, la naissance de mes enfants, on les voit grandir. Des images de la vie quotidienne, des fragments de bonheur et de beauté. Les voyages en France, Italie, Espagne et Autriche. Les saisons, comme elles passent à New York, la vie à la maison, la nature. Rien d'extraordinaire, rien de spécial, des choses que nous vivons tous au cours de notre vie. Il y a beaucoup d'intertitres qui reflètent mes pensées de l'époque. La bande sonore est constituée de musiques et de sons enregistrés pendant la même période que les images, avec des improvisations d'Auguste Varkalis au piano. Quelquefois, je parle dans mon micro pendant que je suis en train de monter, au présent, avec le temps qui a passé. Ce film est aussi mon poème d'amour dédié à New York, ses étés, ses hivers, ses rues, ses parcs. » - Jonas Mekas

   
2005 A letter from Greenpoint

 

Avec : Jonas Mekas et Benjamin Northover. 2h00.

In the winter of 2003, Jonas Mekas, moved out of his loft on Broadway, New York, where he had lived for the past 30 years. It was the place where he watched his children grow, and the art scene of Soho become what it was today. It was where Andy Warhol and Allen Ginsberg used to come by for film events and dinner. This film shows Mekas' transition in to a new life living in Brooklyn, and the adventures this entails. Discovering new friends, singing and dancing with his good friend Benn, and their adventures together. Mekas also faces what it is to live along again in Brooklyn, the place where he first lived when he arrived in New York as a misplaced person in 1947 after ww2. A film of Joy, friendship, wine, and song! (Tim North)

   
2006 First Forty

 

Quarante films courts, reprenant la matière des premiers films, réalisés pour Internet et installations vidéos.
   
2007 365 short films, one for each calendar day of the year 2007

 

 
   
2008 Lithuania and the Collapse of the USSR

 

4 hrs. 49 min., video
   
2011 Sleepless nights stories

Avec : Marina Abramovic, Ken Jacobs, Patti Smith, Louise Bourgeois, Amy Winehouse, Harmony Korine, Yoko Ono, Louis Garell. 1h54.

Jonas Mekas insomniaque erre dans son son nouvel appartement à 4 heures déplorant une vie emballée dans des boîtes en carton. Puis s'épanouit un journal itinérant nocturne, au hasard de rencontres avec des inter-titres, références littéraires dactylographiées, invocations de Dante, des Mille et Une Nuits et de haïku japonais...

   
2011 My Paris movie

Avec : Henri Langlois, Philippe Garrel, Ken Jacobs, Barbet Schroeder. 2h39.

"Ce film est une lettre d’amour à Paris… une célébration de la ville. J’avais une vingtaine d’heures tournées, j’en ai gardées deux et demie après en avoir éliminé dix-huit ou dix-sept. Évidemment, j’ai par la même occasion effacé un certain nombre de bons souvenirs et de bons amis."

   
2011 My bars bar movie

 

1h26

   
2011 Correspondences: José Luis Guerin and Jonas Mekas

 

1h39

   
2011 Re: George Maciunas and Fluxus

 

1h27

   
2012 Out-Takes from the Life of a Happy Man

 

Film 16mm transféré sur video pour la Serpentine Gallery de Londres. 1h08.

« Dans ma salle de montage, il y a une étagère avec plein de boîtes de film qui remontent jusqu’aux années 1950. C’est du matériau lié à mon travail, de 1950 jusqu’aujourd’hui, mais qui n’a pas trouvé sa place dans mes films. En langage cinématographique, ce sont des chutes, des scènes coupées. Et elles sont toutes en train de s’effacer, doucement. Certaines ont déjà disparu. À l’occasion de mon exposition à la Serpentine, j’ai décidé qu’il était temps de rassembler tout ce matériau dans ce qui sera mon dernier film sur pellicule. Le résultat est ce que vous allez voir. Beaucoup d’images de ma vie de famille, de mes amis, de la ville, de la nature, de mes voyages en Lituanie. Toutes assemblées dans mon "ordre" hasardeux habituel. » Jonas Mekas

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