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 Claude, Anna, Joyce et Lucia forment une "bande des quatre" qui 
    vit en communauté dans une grande maison de la banlieue parisienne. 
    L'une après l'autre, les quatre filles rencontrent un inconnu, Thomas 
    (Benoît Régent), qui emprunte à chaque fois une identité 
    nouvelle afin de les mettre en garde sur le danger que court une de leurs 
    amies, Cécile (Nathalie Richard), également élève 
    du cours. Depuis quelque temps, Cécile semble préoccupée, 
    plus intéressée par une mystérieuse histoire d'amour 
    que par ses cours de théâtre. Son amant serait-il la clef permettant 
    d'expliquer à la fois l'enquête de Thomas, le silence de Cécile, 
    mais aussi le secret qui semble peser sur Constance Dumas elle-même 
    ?
Claude, Anna, Joyce et Lucia forment une "bande des quatre" qui 
    vit en communauté dans une grande maison de la banlieue parisienne. 
    L'une après l'autre, les quatre filles rencontrent un inconnu, Thomas 
    (Benoît Régent), qui emprunte à chaque fois une identité 
    nouvelle afin de les mettre en garde sur le danger que court une de leurs 
    amies, Cécile (Nathalie Richard), également élève 
    du cours. Depuis quelque temps, Cécile semble préoccupée, 
    plus intéressée par une mystérieuse histoire d'amour 
    que par ses cours de théâtre. Son amant serait-il la clef permettant 
    d'expliquer à la fois l'enquête de Thomas, le silence de Cécile, 
    mais aussi le secret qui semble peser sur Constance Dumas elle-même 
    ?


 La Bande des quatre est sans doute l'un des films les plus évidents, 
    mais aussi les plus secrets de Jacques Rivette. Evident par son thème 
    explicite, qui reprend et résume toute l'oeuvre du cinéaste, 
    depuis son premier long métrage, Paris nous appartient : la question 
    du théâtre, autrement dit moins celle de la représentation 
    ou de la fiction que celle de la vérité même du cinéma, 
    observée à travers son double ou son frère ennemi. Dans 
    La Bande des quatre, le dispositif théâtral (le "documentaire" 
    sur un cours de théâtre dirigé par Constance/Bulle Ogier) 
    donne lieu à quelques scènes magnifiques dans lesquelles Rivette 
    explore le langage de certains de ses auteurs favoris, Marivaux ou Racine. 
    Mais ce théâtre est aussi un gynécée qui, comme 
    la maison en banlieue, deuxième décor du film, est un monde 
    sans hommes. Il y a seulement deux hommes dans La Bande des quatre : l'un 
    est un fantôme, celui d'un évadé en fuite qu'on ne verra 
    jamais, mais qui sera à la fois l'amant d'une des jeunes filles (Nathalie 
    Richard) et le "macguffin" de l'intrigue ; l'autre (Benoît 
    Régent) est un manipulateur universel (" On trouve tout chez cet 
    homme là, c'est la Samaritaine ! " s'exclame une des jeunes filles), 
    flic et voyou, menteur et honnête, cynique et amoureux et, jusqu'à 
    la fin de l'histoire, opaque. Mais surtout, l'homme est un intrus, et La Bande 
    des quatre raconte la manière dont, dans l'univers rivettien, les filles 
    conspirent à éliminer des hommes qui sont toujours de trop. 
    Ce film réussit ainsi une sorte d'équilibre miraculeux et gracieux 
    entre une fable politique (le film est dédié " aux prisonniers, 
    à celles et ceux qui les attendent "), un thriller balzacien (c'est 
    dans La Bande des quatre qu'on entend pour la première fois parler 
    du Chef-d'oeuvre inconnu, la nouvelle de Balzac qui servira de point de départ 
    à La Belle Noiseuse), un documentaire nervalien sur Paris et ses marges, 
    et une observation, digne de Marivaux, des différents âges de 
    la femme, et surtout des métamorphoses enchanteresses des actrices.
La Bande des quatre est sans doute l'un des films les plus évidents, 
    mais aussi les plus secrets de Jacques Rivette. Evident par son thème 
    explicite, qui reprend et résume toute l'oeuvre du cinéaste, 
    depuis son premier long métrage, Paris nous appartient : la question 
    du théâtre, autrement dit moins celle de la représentation 
    ou de la fiction que celle de la vérité même du cinéma, 
    observée à travers son double ou son frère ennemi. Dans 
    La Bande des quatre, le dispositif théâtral (le "documentaire" 
    sur un cours de théâtre dirigé par Constance/Bulle Ogier) 
    donne lieu à quelques scènes magnifiques dans lesquelles Rivette 
    explore le langage de certains de ses auteurs favoris, Marivaux ou Racine. 
    Mais ce théâtre est aussi un gynécée qui, comme 
    la maison en banlieue, deuxième décor du film, est un monde 
    sans hommes. Il y a seulement deux hommes dans La Bande des quatre : l'un 
    est un fantôme, celui d'un évadé en fuite qu'on ne verra 
    jamais, mais qui sera à la fois l'amant d'une des jeunes filles (Nathalie 
    Richard) et le "macguffin" de l'intrigue ; l'autre (Benoît 
    Régent) est un manipulateur universel (" On trouve tout chez cet 
    homme là, c'est la Samaritaine ! " s'exclame une des jeunes filles), 
    flic et voyou, menteur et honnête, cynique et amoureux et, jusqu'à 
    la fin de l'histoire, opaque. Mais surtout, l'homme est un intrus, et La Bande 
    des quatre raconte la manière dont, dans l'univers rivettien, les filles 
    conspirent à éliminer des hommes qui sont toujours de trop. 
    Ce film réussit ainsi une sorte d'équilibre miraculeux et gracieux 
    entre une fable politique (le film est dédié " aux prisonniers, 
    à celles et ceux qui les attendent "), un thriller balzacien (c'est 
    dans La Bande des quatre qu'on entend pour la première fois parler 
    du Chef-d'oeuvre inconnu, la nouvelle de Balzac qui servira de point de départ 
    à La Belle Noiseuse), un documentaire nervalien sur Paris et ses marges, 
    et une observation, digne de Marivaux, des différents âges de 
    la femme, et surtout des métamorphoses enchanteresses des actrices.
Jacques Rivette, Libération, 10 février 1989, entretien avec 
    Louis Skorecki
    « J'ai longtemps voulu filmer une histoire autour d'un cours d'art dramatique. 
    Plus récemment, j'ai eu envie de parler d'une femme qui serait professeur 
    dans ce cours en m'attachant à sa vie privée. C'est Jeanne Moreau 
    qui devait jouer le rôle. Je ne sais pas si elle s'est fâchée 
    ou quoi, mais elle a disparu à quelques semaines du tournage. À 
    ce moment, j'ai proposé le rôle à une autre actrice, tout 
    en étant certain, parce que le personnage était pensé 
    pour Jeanne, que cette actrice allait refuser. C'est exactement ce qu'elle 
    a fait. J'ai alors décidé de faire le contraire et de reconstruire 
    l'histoire à partir des élèves. (...) Chaque fois qu'un 
    personnage est seul sur l'écran, nous entrons dans sa tête. C'est 
    ce qu'il voit que nous voyons. Nous sommes avec lui. (...) L'une des plus 
    belles scènes de La Bande des quatre s'éclaire : la petite Portugaise 
    est seule dans sa chambre, d'horribles bruits de lutte et de mort déchirent 
    la bande-son. Lucie prie, fait des incantations rituelles, se recueille. Au-dessus 
    d'elle, soudain, le vacarme cesse. Une clé tombe dans la cheminée. 
    Plus de vampire, ils ont passé le pont, tout le monde peut dormir. 
    (...) C'est elle qui entend ce son terrifiant, nous sommes entrés dans 
    sa tête, elle avait peut-être envie de fantômes cette nuit-là. 
    (...) Celui de mes films qui ressemble le plus à La Bande des quatre, 
    c'est peut-être Le Pont du Nord. Une femme plus âgée essayait 
    d'en protéger une plus jeune; c'est le contraire ici mais il y a, encore, 
    la présence de Bulle Ogier. (...) La Bande des quatre, c'est une répétition, 
    ce n'est pas encore du théâtre. Le théâtre viendra 
    plus tard dans la fiction, quand on n'y sera plus, une fois le film terminé. 
    Le travail est toujours plus intéressant à montrer que le résultat. 
    Un chaudronnier dans un film de Rouquier, je peux le regarder trois heures. 
    Un chaudron, même si c'est le plus beau du monde, j'en ai fait le tour 
    en trois minutes. »
Jacques Rivette, Les Cahiers du cinéma, n°416, février 
    1989, entretien avec Marc Chevrie
    « Si on prend un sujet qui traite du théâtre de près 
    ou de loin, on est dans la vérité du cinéma. Parce que 
    c'est le sujet de la vérité et du mensonge et qu'il n'y en a 
    pas d'autre au cinéma : c'est forcément une interrogation sur 
    la vérité avec des moyens qui sont forcément mensongers. 
    (...) Le théâtre, c'est la version civile du cinéma, c'est 
    son visage de la communication avec le public; alors qu'une équipe 
    de film, c'est un complot, c'est complètement fermé sur soi, 
    et personne n'est encore arrivé à filmer la réalité 
    du complot. »