Le diable n'existe pas. Heshmat est un bon père de famille et un brave homme, qui rend service à sa voisine dont le chat est coincé derrière la chaudière, va chercher sa femme enseignante après son travail, puis sa fille à l'école, aide sa mère âgée, le tout sous fond de préparatifs pour un mariage auxquels ils sont conviés... Il se lève à 3 heures du matin pour rejoindre son lieu de travail. On le voit dans une petite pièce où il se prépare une collation. Des lumières rouges, puis vertes s'allument sur un panneau, Heshmat presse un bouton..., déclenchant la pendaison de plusieurs hommes en ouvrant la trappe sous leurs pieds.
Elle a dit : tu peux le faire. Pouya n'a pas de chance. Il fait son service militaire et a été affecté dans la prison où les conscrits prennent part aux exécutions des condamnés à mort. Il ne peut supporter cette idée, et il (ainsi que ses camarades de dortoir) passe une nuit blanche à essayer de trouver un moyen de ne pas "enlever le tabouret" sous le condamné pour l'exécution prévue au matin. Il en parle à plusieurs reprises au téléphone avec son amie, Tahmineh, avec laquelle il rêve de quitter l'Iran. Lorsqu'au matin, il doit accompagner le condamné sur le lieu de l'exécution, il se rebelle, dérobe l'arme du geôlier qui l'accompagne et arrive à s'échapper de la prison. Dehors, Tahmineh l'attend dans une voiture. Ils quittent la ville, en écoutant la chanson Bella ciao sur leur autoradio.
Le jour d'Anniversaire. Javad fait son service militaire, il a obtenu une permission et se rend dans la maison de Na'na, une jeune femme qu'il aime et dont c'est l'anniversaire. Il veut lui offrir une bague et la demander en mariage. La famille de Na'na est bouleversée car un de leurs amis proches, qu'ils hébergeaient depuis dix ans, vient d'être exécuté pour des raisons politiques. Javad est pris d'une violente émotion à la vue de la photo du disparu, s'enfuit dans la forêt et essaie de se suicider. Il avoue à Na'na qu'il a exécuté leur ami en se portant volontaire pour "enlever le tabouret" afin d'avoir une permission pour être là à son anniversaire. Na'na et Javad n'ont plus le cœur à fêter l'anniversaire, et Nana décide de rompre avec Javad.
Embrasse-moi. Bahram et sa femme Zaman vivent dans une campagne reculée de l'Iran, où ils pratiquent l'apiculture. Ils sont venus à l'aéroport chercher Darya, la fille d'un ami d'études de Bahram, qui vit en Allemagne. Darya étudie la médecine, Mansour, le père de Darya, et Bahram sont également médecins. Darya ne comprend pas pourquoi Bahram n'a pas le permis de conduire et a choisi cette vie et ne pratique pas sa profession de médecin, sinon occasionnellement pour rendre service à des villageois. Bahram est gravement malade ; il a souhaité que Darya lui rende visite avant qu'il ne meure pour lui apprendre qu'il est son père biologique. Il y a vingt ans, pendant son service militaire, il a refusé de collaborer à l'exécution d'un condamné à mort, et vit depuis dans cette maison isolée. Bahram attend le moment opportun pour lui faire cette révélation. Il a décidé qu’il l'entraînerait pour une partie de chasse au renard, que Darya se dit prête à tuer pour protéger les poules. Il lui montrera alors qu'il est mauvais de tuer. Mais Darya prend peur devant l'attitude rigide et butée de Bahram, bouleversé déjà rien qu'à la vue d'un fusil. Darya retourne précipitamment à la maison et lorsque Bahram, fatigué par la maladie revient, sa femme Zaman lu dit avoir tout révélé à sa fille. La mère biologique de Darya était partie en Europe rejoindre son frère, Mansour, sans savoir qu'elle était enceinte. Elle mourut avant que Bahram ne trouve un moyen de la rejoindre par des routes clandestines. Il décida alors de confier Darya à Mansour pour qu'il l'élève en Europe. Bouleversée par ces révélations et les mensonges, qu’elle trouve impardonnables de Mansour et Bahram, Darya veut repartir et rentrer en Europe. Sur le chemin de l'aéroport, Bahram est pris d'une nouvelle violente crise de toux due à la tuberculose. Darya descend et voit le renard sur le bas-côté tranquillement assis. L'animal est paisible et sa douceur se transmet à Darya qui comprend la beauté de la non-violence. La voiture ne redémarre pas vers l'aéroport.
Les quatre histoires sont reliées par un fil rouge : la façon dont on assume la responsabilité de ses actes dans un contexte totalitaire. Le fil romanesque se développe au cours des quatre histoires en comprenant comment le régime autoritaire implique ses citoyens dans les exécutions capitales. La pendaison civile est montrée à la fin de l'épisode 1, La pendaison militaire est annoncée comme l'enjeu dès le début de l'épisode 2. A la fin de l'épisode 3, elle se révèle avoir été exécutée quelques jours auparavant. L'épisode 4 pourrait être une suite, quarante ans plus tard, de l'épisode 2 car, contrairement aux épisodes impairs, les personnages ont refusé de participer.
Résister aux injonctions totalitaires, si c'est une idée séduisante, génère un coût obligeant à fuir le pays ou à vivre en reclus. Le certificat de service militaire est en effet demandé pour n'importe quel acte de la vie civile, de l'achat d'une maison à la simple assurance d'un crédit ou pour passer le permis de conduire. Ainsi, à l'épisode deux, succède l'épisode quatre où le personnage principal a dû renoncer à de nombreux aspects de la vie et, un temps, subir la réprobation de sa fille. Cette force de désobéir met en scène de beaux personnages, fiers d’avoir eu la force de désobéir et qui en assument les conséquences. Malgré tout ce qu’ils ont perdu, ils ont la sérénité de ceux qui se sont conformés à leur propre exigence morale.
Le personnage de l'épisode un qui donne son titre au film entier montre "la banalité du mal", le concept développé par Hannah Arendt. Le personnage n'a sans doute jamais réfléchi au sens de ses actes. Son métier de bourreau est probablement la seule façon qu’il a trouvée de subvenir aux besoins de sa famille. Le scénario de l'épisode trois est un peu trop tricoté. Il est hautement improbable que Javad aille jusqu'à tenter de se suicider et avouer sa faute à Na'na. C’est ce refus de la parabole morale, l'échec de la chasse au renard préméditée par Barham et la simple vision ensuite de l’animal au repos par sa fille, qui fait la beauté de l'épisode 4, empli de sérénité.
Jean-Luc Lacuve, le 9 décembre 2021.