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Yella

2007

Genre : Fantastique

Avec : Nina Hoss (Yella), Devid Striesow (Philipp), Hinnerk Schönemann (Ben), Burghart Klaußner (Docteur Gunthen), Wanja Mues (Sprenger), Barbara Auer (Mme Gunthen), Martin Brambach (Docteur Fritz), Joachim Nimtz (Prietzel), Peter Benedict (Friedrichs Anwalt), Selin Bademsoy (La fille du docteur Gunthen). 1h29.

Yella revient chez elle, à Wittemberg en Saxe-Anhalt, par le train. Elle ferme le rideau avant de se changer quittant son chemiser rouge pour un pull noir. Elle arrive dans la gare déserte. Ben, son ancien mari, tente d'engager la conversation. Il évoque le passé. Elle le congédie.

Yella annonce à son père qu'elle a trouvé un bon travail à Hanovre chez un sous-traitant d'Airbus. Le matin du départ, son père lui pèle une orange et lui donne de l'argent enroulé dans un élastique.

A la place du taxi, c'est Ben qui sonne à la porte et se propose de conduire Yella à la gare. Il veut la retenir et l'impliquer comme avant dans son affaire. Elle refuse. Arrivé sur le pont, il fait plonger la voiture dans la rivière.

Yella, trempée au bord du fleuve, est réveillée au cri du corbeau et du vent dans les arbres. Elle récupère sac et valise et attrape de justesse son train. Elle pleure, s'endort, et se réveille brutalement au dépôt alors que les femmes de ménages ont fait le nettoyage des wagons.

Sur le chemin de l'hôtel, elle croise la bourgeoise famille des Gunthen dont elle envie le train de vie. A l'hôtel, le réceptionniste veut une avance pour la chambre qu'elle a louée. La carte bleue, trempée, ne marche pas. Heureusement, Yella découvre de l'argent enroulé dans un élastique que lui a laissé son père. Elle lui téléphone pour dire qu'elle est bien arrivée et le remercier pour l'argent.

Le soir alors que l'hôtel déroule une musique romantique, elle contemple le bilan de l'ordinateur de Philipp qui s'efface pour laisser paraître une vague hawaiienne. Philipp s'étonne qu'elle soit employée par Alpha Wings et semble bien connaître l'entreprise et son directeur du personnel, Schmitt Ott.

C'est Schmitt Ott qui, le matin, accueille Yella devant l'entreprise. Il lui demande d'aller chercher une sacoche de cuir oubliée dans son bureau. Il est en fait banni de l'entreprise et Yella dérobe la sacoche sous les yeux du chargé de la sécurité. Il n'y a donc plus de travail pour elle. Elle se rend bien compte que Schmitt Ott cherche à coucher avec elle. Elle fait arrêter le taxi.

Elle va faire sa valise lorsque Philipp lui propose de l'accompagner le lendemain, comme experte en bilan pour négocier une prise de participation dans une entreprise où un inventeur devrait presque certainement obtenir un brevet pour une pompe à injection de formule 1. l'entreprise a besoin d'argent pour produire en série. L'objectif de Philipp pour le prêt de 850 000 euros est d'acquérir 30 % des parts. Il donne des instructions à Yella. Elle devra regarder dans trois directions et glisser un mot à son oreille lorsqu'il prendra la pose du courtier bien connu des spectateurs qui ont vu les adaptations cinématographiques de John Grisham. Il renonce à lui faire porter des lunettes

Durant la négociation, Yella casse un verre. Un peu d'eau se répand sur le sol mais personne ne s'en aperçoit. Un bruit d'eau envahit ses oreilles auquel se superpose le cri du corbeau et le bruit du vent dans les arbres dehors.

L'hallucination disparaît mais Yella refuse de répondre à la pose du courtier proposée par Philipp. Elle se lance dans l'examen du bilan de la société. Les 80 00 euros immobilisés comme des logiciels ne valent à son avis pas plus de 2 000 euros. D'ailleurs ils ne figurent pas dans les investissements permettant une déduction fiscale. Ils ont été rachetés au Dissolve Group.

Finalement, Philipp obtient 35 % des parts de la société. Le soir, en rentrant, il la paie 1 000 euros.

Quelqu'un a visité son appartement laissé la télévision allumée et des restes de repas sur le lit. De sa fenêtre elle aperçoit Ben. Il surgit au bord du lac bruit d'avion porte sur la berge et l'abandonne. Yella aperçoit Philipp avec l'un des négociateurs. Il rentre la porte était ouverte. Philipp convainc Yella de ne pas faire sa valise et lui déclare : "j'ai encore besoin de quelqu'un qui m'accompagne".

En voiture, Klaus, le patron de Philipp, appelle pour ce plaindre de la faiblesse des 27 % obtenus. Philipp avoue qu'il fraude et lui explique que les lunettes qu'il a tenté de lui faire prendre étaient destinées à masquer le fait que, quand on lit, les yeux bougent, alors que les siens étaient fixes.

Lors de la négociation, ils rient de la pose du courtier prise par la partie adverse et l'ajournement sonne comme une victoire. Philippe demande à Yella de déposer 75 000 euros. Il y a 25 000 euros en trop. Alors qu'elle va les envoyer par la poste, le klaxon de Philippe retentit.

Yella lui explique le besoin d'argent de son mari expliquant le courrier. Elle appelle pour connaître les horaires des trains entre Hanovre et Wittemberg.

Il écoute Road to Cairo. Il lui dit que l'aéroport de DHL pour lequel Ben espère son contrat de technique de climatisation et de chauffage sera construit à Leipzig. Il la déculpabilise et la réembauche : Ce deuxième contrat dissimule sans doute le besoin d'argent pour payer des factures

La deuxième entrevue insiste sur l'idée à développer et pas le capital qui n'en est pas un.

Le soir, Philippe propose à Yella de l'amener à Dessau chez un fabricant d'accus. Elle téléphone à son père. Ben resurgit et veut devenir salarié installateur. Elle fuit. Mais lorsque Philipp la prend dans ses bras, le bruit de pas s'arrête et il n y a plus rein à voir dans le couloir.

Ils s'embrassent. Au matin il pèle l'orange comme le faisait son père.

Pendant que Philipp dort dans la voiture Yella fait un détour par Wittenberg. Il se met en colère. Elle erre dans les champs et se retrouve sur les lieux de l'accident près du pont et de l'arbre. Philipp qui la rejoint ne semble pas la voir. Le corbeau croasse.

Philipp ne veut pas d'une conversation avec le père de Yella. Il rêve d'autre chose. Il voudrait acheter en entreprise à Cork en Irlande qui possède un système de sécurité en cas de surcharge pour les perceuses à percussion qu'on trouve en quincaillerie. Ce système sous un nouveau packaging, il pourrait la vendre 800 000 euros pour éviter les fuites des puits de pétrole. Il lui manque encore 200 000 euros. "Veux-tu te joindre à moi ?" demande-t-il à Yella comme une demande en mariage

Troisième négociation : batterie pour des consoles de jeu faillite, brevet vendu aux américains nouveau brevet meilleur ou contrefaçon. Philipp va prendre 35 % mais sait qu'il sera viré. Yella demande à aller faire du shopping mais se poste devant la maison des Gunthen et y entre dès que la Jaguar arrive. Yella exige 200 000 euros de Gunthen pour ne pas faire passer la participation de 35 % à 45 %. Il refuse mais Yella menace de tout lui faire perdre en révélant aux Américains que son brevet pourrait facilement être attaqué pour contrefaçon.

Yella rentre le soir près de Philipp. Mais le lendemain Gunthen n'est pas à la négociation. Quand Philipp l'embrasse, elle voit Gunthen en noyé. Elle se précipite chez lui et demande à sa femme Barbara s'il y a un point d'eau. Du bruit résonne à ses oreilles et Philipp la fixe comme s'il la renvoyait. Elle prend le taxi, pleure…et se retrouve dans la voiture de Ben juste avant l'accident. La voiture plonge dans l'eau.

Les pompiers retirent la voiture de l'Elbe. Ben et Yella sont morts.

Comme tout film dont la fin dévoile un élément fondamental de l'intrigue, Yella doit être revu pour voir s'il résiste à son truc scénaristique. L'éventuelle déception du spectateur de s'être fait avoir par ce qui n'était en fait qu'un rêve pré-mortem devra plutot ici l'inciter à revoir le film pour être sensible au romanesque d'une situation où tout ce qui arrive à Yella ne doit rien au hasard mais est un appel, une demande de sa part pour échapper à la mort.

La construction du film en grands blocs de séquences (hôtel, voiture ou salle de négociation) n'est possible que parce que Yella les convoque et y exprime à chaque fois un sentiment fort. Cette convocation systématique d'un désir ou d'une peur rend non seulement très fortes chacune des séquences mais évite ainsi les scènes de transition ou les scènes utilitaires à l'avancée de l'intrigue. Succession de blocs statiques de pure émotion (certes avec l'habituelle rigueur allemande exempte d'épanchements inutiles), Yella a la suprême élégance de durer moins d'une heure trente. Comme si Christian Petzold voulait par là inciter les spectateurs à retourner voir son film, dont la beauté se perçoit encore une fois mieux lors de ces visions successives.

Une vie de fantôme

Comme le sixième sens ou Mulholland drive, le personnage qui prend en charge l'histoire est mort et revient donc tel un fantôme habiter le monde des vivants.

L'habilité du metteur en scène consiste à distiller des indices qui permettent au spectateur de percevoir que quelque chose ne fonctionne pas dans le monde dans lequel se meut le fantôme.

Ces indices sont ici au nombre de quatre : le motif de l'eau, celui du bruit du vent dans les arbres associé au cri du corbeau, les retours de motifs vécus avant l'accident, les incohérences du monde parallèle.

Le motif de l'eau est présent avec le verre brisé et le bruit de l'eau qui envahit les oreilles de Yella, associé, un peu plus tard au bruit du vent dans les arbres et au cri du corbeau. L'apparition en noyé de Gunthen et, plus subitement, avec l'inquiétante apparition de Ben autour du lac la nuit, le tableau bleu dans la chambre de Yella et peut-être avec la vue hawaïenne sur l'ordinateur de Philipp.
Ce motif n'est pas utilisé avec le même systématisme que dans Femme fatale de Brian de Palma où les débordements de l'eau venaient rappeler la jeune femme endormie dans la baignoire qui déborde

Le motif du bruit du vent et du cri du corbeau accueille Yella à sa sortie du train, revient au moment de l'hallucination et lorsque Yella erre près du lieu de l'accident après que Philipp se soit fâché.

Les retours des motifs vécus avant l'accident ; c'est le rideau mystérieusement tiré, le rouleau de billets, l'orange pelée, les 80 000 euros actualisé 2 000 euros pour la reprise des ordinateurs, logiciels de comptabilité et mise en réseau et les 25 000 euros dont Ben a besoin qui sont le montant en trop de la commission versée.

Les incohérences du monde parallèle sont celles qui vont jusqu'à inquiéter le personnage : la disparition de Ben poursuivant Yella dans le couloir ou Philipp ne voyant pas Yella lorsqu'elle se promène dans les champs. Presque toujours l'alternance de plans larges et de plans serrés souligne le frottement ou le décalage entre l'irréalité de la situation et la situation romanesque entre Philipp et Yella. Ainsi alors que Yella et Philipp sont très proches sur le tronc d'arbre près de l'eau, un plan large vient nous rappeler que c'est là où a eut lieu l'accident et qu'il est assez inconcevable que Yella n'en parle pas alors à Philipp. Le long plan sur l'eau du fleuve vient alors confirmer notre inquiétude sur l'irréalité de ce moment.

Le film est aussi parcouru par Road To Cairo, une chanson du folksinger américain David Ackles reprise ici par Julie Driscol, qui décrit l'impossible retour d'une âme errante dans sa petite ville natale. La chanson est d'abord entendue dans la voiture de Ben lorsqu'il attend Yella à la gare, une première fois derrière la vitre de sa voiture, une seconde fois lorsqu'il ouvre la fenêtre pour proposer à Yella de l'accompagner chez elle. La musique sera ensuite entendue beaucoup plus forte et donnée avec son titre par Philipp lorsque Yella vient lui rendre visite dans sa chambre pour lui expliquer qu'elle est poursuivie par Ben. Road to Cairo résonne encore une fois dans la voiture de Philipp lorsque Yella attend Gunthen pour tenter de lui extorquer 200 000 euros.

Autre indice d'un monde déshumanisé, les décors impersonnels et les cadres vidés du fourmillement des présences humaines. Certes Petzold triche un peu avec l'arrivée à la gare de Wittemberg, supposée être réelle avant l'accident et déjà déserte. Mais ce seront ensuite ces mêmes décors épurés qui surgiront du cerveau agonisant de Yella. On en remarquera la discrète beauté et plus généralement celle des couleurs et de la bande son lorsque précision et économie de moyen vont de paire. Ainsi le surgissement de Yella et de Ben hors de l'Elbe où leur voiture a plongé d'abord sur la bande son nous faisant anticiper et donc admettre leur apparition à l'écran. Ou l'inquiétant franchissement du mur du son au matin de l'accident repris au bord de l'étang à Hanovre pour justifier la fuite de Ben.

L'angoisse d'un retour au réel

Comme dans Mulholland drive, le rêve de réussite sociale et amoureuse de l'héroïne est mis à mal par la mort qui s'annonce et les souvenirs de ses échecs passés.

Les malheurs qui lui arrivent en cache certes un bien plus grand mais c'est cet acharnement au présent qui nous la rend proche : trempée, fatiguée, carte bancaire en panne, elle continue d'avancer.

Le réel revient sous la forme d'un reflux terrifiant vers le malheur lorsque le rêve de Yella tend vers sa réalisation. L'invite à dîner de Philippe dans la voiture est immédiatement suivi de l'annonce d'un mauvais pressentiment et du reproche des 25 000 euros qu'elle lui a dérobés. Le "je t'aime" enfin prononcé par Philipp, s'accompagne juste après de la vision de Gunthen noyé.

Le rêve de Yella

Ce que recherche Yella, c'est un amour qui va de paire avec la réussite sociale. C'est cet amour qu'elle appelle dans son rêve. D'où la sonate de Beethoven dans l'hôtel avant que n'apparaisse Philipp dans un flou romanesque. Puis de façon beaucoup plus invraisemblable, diegétiquement non justifié, lorsque, au dehors de l'hôtel après que Ben l'aie relâché, elle voit Philipp se faire remettre une grosse somme d'argent.

Yella appelle Philipp comme elle avait appelé la présence de son sac et de sa valise au début de son rêve. Les portes des chambres d'hôtel sont ainsi toujours ouvertes pour faciliter l'arrivée du fantasme.

Philipp convainc Yella de ne pas faire sa valise en lui déclarant : " J'ai encore besoin de quelqu'un qui m'accompagne". Et, après lui avoir expliqué le projet pour lequel il se bat, il lui demande "Veux-tu te joindre à moi ?" comme une demande en mariage

A l'image des adaptations de John Grisham (La firme) évoquées dans le film, mêlant vie professionnelle et vie privée, la relation d'employeur à employée vire facilement en relation amoureuse. Si celle-ci est rêvée heureuse avec Philipp, elle aura été conflictuelle avec Ben et sordide avec Schmitt Ott.

Le refus des échecs passés

Car, Yella, femme courage, est bien plus ambiguë que la surface lisse de son visage le laisse d'abord supposer.

Plusieurs indices incitent à penser quelle a certainement couché avec Schmitt Ott cherche à se débarrasser de cet emploi avilissant. Schmitt Ott l'appelle par son prénom et avec une grande familiarité lors de son arrivée le matin et la proposition d'aller manger des huîtres dans un hôtel connu pour offrir de belles chambres est certainement une réminiscence de choses vécues. Sa main posée sur le poignet de Yella est ressentie par elle comme une brûlure qui lui fait quitter le taxi. La culpabilité de cet emploi se marque aussi par son inquiétude qui lui fait demander à Philipp s'il pense qu'elle a obtenu son emploi grâce à ses jolies jambes, remarque qui lui a par ailleurs déjà faite Ben. Peut-être la forme de prostitution à laquelle elle s'est soumise expliquerait pourquoi elle se change dans la première séquence dans le train. Souillée, elle cherche à se débarrasser de son vêtement et en change intégralement. On la verra ensuite étendre avec soin son chemiser qu'elle vient de laver.

De même, le klaxon de Philipp alors qu'elle s'apprête à envoyer l'argent à Ben, est appelé par elle. Yella ne veut pas sauver son ancien mari. Tout juste essaie-t-elle de se donner bonne conscience en faisant semblant de s'intéresser à lui comme elle l'avait maladroitement fait dans la voiture. Elle n'attend en fait que d'être rassurée par Philipp qui lui ressort pour le désavouer le discours de Ben sur sa lâcheté de le laisser dans un monde en ruine. Et il n'est pas jusqu'au masochisme qui est convoqué avec la gifle que lui envoie Ben et qu'elle sublime en courant se réfugier dans les bras de Philipp qui se referment avec tendresse sur elle.

Le rêve du père dévoyé par le capitalisme ouest-allemand.

C'est ainsi la marchandisation des rapports humains que pointe Christian Petzold. L'imbrication des sentiments et du monde social.

Le père a certainement été un bon ouvrier dans l'ancienne RDA comme l'indique sans doute le petit fanion blanc chez lui et rêve d'une vie heureuse pour sa fille. Ce rêve est certainement celui que semble refuser Philipp en lui disant que la conversation avec son père ne l'intéresse pas si c'est pour s'entendre dire qu'il souhaite avoir une belle maison en banlieue avec garage et Jaguar et avoir des enfants.

Ce rêve est de parvenir à cette image du bonheur bourgeois qu'elle voit comme dans un flash lorsqu'elle arrive à Hanovre et découvre une Jaguar arrivant devant le garage, une belle maison et de laquelle sort le père avec sa fille accueillis par la mère. Ce fantasme incertain, d'abord situe près de la gare d'Hanovre, Yella va lui donner plus de force en le replaçant à Dessau lors de l'ultime négociation. On verra alors la même Jaguar arrivant devant la même maison et Yella tenter d'y entrer malgré le violent rejet de la femme de Gunthen qui lui lance un inquiétant "va-t-en". Ce rêve au-dessus de ses moyens, Yella le détruira en contraignant Gunthen, bon père (il répare la flûte de sa fille)et bon mari au suicide.

De même, Yella touche au bonheur lorsqu'elle voit Philipp peler l'orange avec les mêmes gestes (et le même couteau !) que son père. Philippe n'est d'ailleurs physiquement pas très éloigné de Ben. Du moins d'un Ben tel qu'il devait l'être du temps de sa bonne santé financière.

Le leitmotiv systématique des négociations est celui d'un capital qui n'a plus de valeur alors que seules comptent les idées va de paire avec la situation de Yella qui ne survivra tend que durera son rêve. Il évoque aussi l'idée que le passé est à l'Est alors que l'avenir des idées est à l'Ouest. Aller de l'avant va de paire avec la ronde de la valeur des choses : 80 000 euros qui n'en valent plus que 2 000 et qui en redeviennent à leur valeur de 80 000 euros dans une autre entreprise.

La phrase "c'est une pratique courante chez vous" énoncée par Gunthen renvoie à des comportements différents entre les deux Allemagnes.

La différence entre le fantasme de Yella et la réalité se marque dès l'accident. Tel qu'il est vu par Yella, la surface de l'eau est propre. Telle que nous la montre Petzold dans sa seconde version, une boite de Coca-Cola flotte à la surface. Le monde réel de l'ex Allemagne de l'est de contaminé par le plaisir facile et par les déchets.

Si le film n'atteint pas la qualité de Mulholland drive c'est probablement parce le monde des affaires en Allemagne n'a pas le glamour du monde des acteurs hollywoodien. Le film cache son intensité romanesque et la profondeur de sa réflexion derrière la plus froide des apparences. Subtil dans les répétions inquiétante des mêmes scènes, dans l'utilisation de la musique des sons et des couleurs, Yella décrit pourtant un monde bien plus proche de notre monde contemporain.

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