Route Irish

2010

Thème : Guerre d'Irak

Avec : Mark Womack (Fergus), Andrea Lowe (Rachel), Stephen Lord (Steve), John Bishop (Frankie), Geoff Bell (Walker), Najwa Nimri, Jack Fortune (Haynes). 1h49.

En septembre 2007, Frankie meurt sur la "Route Irish", la route la plus dangereuse de Bagdad. Fergus rejette l'explication officielle et, brisé par le chagrin, enquête depuis Liverpool où il est obligé de résider en attendant un procès pour violence envers des videurs de boite de nuit. Ceux-ci s'en étaient pris à un de ses amis, victime de guerre, aveugle.

Rachel, la petite amie de Frankie, en veut énormément à Fergus d'avoir entrainé Frankie en Irak. Fergus et Frankie étaient des amis d'enfance, extrêmement liés. Trois ans auparavant, Fergus (ancien des SAS, forces secrètes) avait persuadé Frankie (ancien para) d'intégrer son équipe d'agents de sécurité, à Bagdad, pour un salaire mensuel de 12.000 livres, non imposable. Frankie, galérant pour trouver un boulot avait ainsi accepté de "se faire du blé" dans cette guerre dont la privatisation va croissant.

Ensemble, ils avaient risqué leur vie dans une ville où règnent la violence, la terreur, l'impunité et l'avidité. Et puis Frankie était mort seul, asseyant vainement de joindre Fergus. Le jour de l'enterrement, une prostituée d'Ibiza remet un téléphone portable à Fergus. Sur celui-ci une vidéo lui apprend qu'un jour de septembre, Frankie n'avait pu empêcher, Nelson, une brute épaisse de tirer sur un taxi qui les suivait à vive allure. Frankie avait découvert dans la voiture une famille avec deux jeunes garçons criblés de balle. Il avait ensuite confisqué le portable d'un homme témoin de la scène.

Fergus est persuadé que Nelson a tué Frankie et que ses chefs, Walker et Haynes l'ont laissé faire. Frankie tue Nelson puis apprend qu'il était innocent. C'est Walker qui avait envoyé les témoins du drame du taxi, Frankie et trois autres mercenaires, sur des missions répétées à bord d'un véhicule dont il savait que le blindage était défaillant.

Fergus fait exploser une bombe sous le véhicule de Walker et Haynes, dit adieu au téléphone à Rachel et se suicide en se jetant dans la mer.

La faiblesse du film tient au même repli autarcique sur les ficelles du scénario que manifestait It's a free world (2007). Alors que Loach s'attaque à de grands sujets, ici la privatisation de la guerre, il se contente de forts peu de recherches documentaires sur l'irish road et les sociétés anglaises qui font commerce de la guerre.

Il était pourtant intéressant de développer un sujet sur la guerre d'Irak par, si l'on peut dire le petit bout de la lorgnette, celui d'un anglais ne quittant pas Liverpool. Le recours aux communications par Skipe, aux images d'archives vues sur Internet ou à la télévision sont plutôt bienvenus même si elles restent centrées sur les thèmes des boucheries des attentats et des exactions américaines dont de nombreux médias se sont déjà fait l'écho. Les séquences filmées en Jordanie sont aussi assez banales et la dangerosité de la route irish elle-même fortement simplifiée (voir plus bas).

Si l'Irak vu d'ici est néanmoins plutôt réussi, il n'en est hélas pas de même de l'analyse de la situation anglaise. En partant du postulat que les journalistes et les politiques étoufferont l'affaire, Fergus se condamne à jouer le rôle du justicier maudit, un peu comme dans Que la bête meure. Dans l'un et l'autre cas, le justicier meurtrier se condamne à disparaitre dans la mer. Si la complexité de la mise en scène de Chabrol et le sujet intime qu'il avait choisi s'accommodait bien d'une telle fin, elle apparait ici comme une facilité. Le scénario aurait sans doute gagné à moins jouer des ficelles du thriller qu'à étayer son sujet : qu'en est-il de la privatisation de la guerre ? Un point de détail m'a irrité. Lorsque le chanteur irakien donne son spectacle, on n'écoute pas son poème musical pour lui-même. Loach ne peut s'empêcher, via deux plans sur Fergus, d'y plaquer des images de guerre.

Jean-Luc Lacuve le 26/03/2010

La route de l'aéroport de Bagdad est un tronçon de 12 kilomètres reliant l'aéroport à la zone internationale, la zone verte, une zone fortifiée au centre de Bagdad. Il relie également les différentes parties de Bagdad à l'aéroport et relie les régions voisines les unes aux autres. Il est devenu important après l'invasion de l'Irak en 2003 et sa prise par les forces de la coalition. Cette route communément appelé par les militaires Main Supply Route (MSR) se subdivise en Route Aeros, la section avant dans et hors de la zone internationale, et Route irlandaise, qui s'étend à l'est de l'aéroport, puis s'oriente vers le sud (après le carrefour avec la route Aeros) à une jonction avec la route 1 (MSR Tampa).

Route Aeros et Route irlandaise
Point de contrôle

En raison du trafic militaire lourd avec des convois de grande envergure, la route de la zone internationale de l'aéroport a été extrêmement dangereuse dans les années suivant l'invasion. Les bombes de nombreux auteurs d'attentats-suicides attaquant les points de contrôle, les fusillades en voiture ou par des tirs à partir des zones des deux côtés des routes l'ont rendu célèbre. À la fin de 2005, après des patrouilles armées du 69e régiment américain d'infanterie, la route devient plus sûre et plus fiable.