New York. Leonard plonge depuis la jetée d'une plage, anéanti par le départ d'une femme qu'il revoit dans un flash-back rapide alors qu'il s'enfonce dans l'eau. Il est cependant vite repêché par des passants et s'en va, trempé et piteux, rejoindre l'appartement qu'il habite chez ses parents.
Ceux-ci ne semblent pas surpris devant cette nouvelle tentative de suicide et lui conseillent de prendre ses pilules, surtout ce soir où vont venir les Cohen qui ont décidé de racheter leur boutique de nettoyage dont ils seront eux-mêmes actionnaires.
Leonard a tout juste le temps de se sécher qu'arrivent les Cohen, père, mère, fils et fille. Celle-ci, la belle Sandra, ne semble pas insensible au charme de Leonard et accepte bien volontiers de le suivre dans sa chambre pour voir les photos noir et blanc qu'il prend des paysages urbains. Leonard lui révèle que le seul portrait de jeune femme qui décore sa chambre est celui de son ancienne fiancée avec laquelle il devait se marier avant d'apprendre qu'ils ne pourraient jamais avoir d'enfant ensemble, du fait d'une maladie génétique rare possédée en commun. De son côté, Sandra lui révèle qu'elle souhaitait le voir, charmée de sa première vision de lui, dansant gentiment avec sa mère.
Les deux jeunes gens sont rappelés à table et il est convenu que Leonard prendra les photos de la prochaine cérémonie religieuse en l'honneur du jeune fils des Cohen.
Un peu plus tard, Leonard rencontre Michelle, sa jolie blonde de voisine dont il tombe immédiatement amoureux. Le lendemain, alors qu'il a rendez-vous avec Sandra, il suit Michelle en métro. Puis le soir l'accompagne dans une boite à la mode où Michelle fait un malaise. Il apprend alors, consterné, qu'elle un amant, un homme marié, Ronald Blatte, un avocat, patron de la boite où elle travaille .
Le double jeu sentimental de Leonard lui est imposé par les circonstances et la rapidité du chassé croisé amoureux empêche tout sentimentalisme ou appesantissement de la mise en scène. Ainsi de cette belle scène où Leonard a acheté le disque de l'opéra Hänsel et Gretel (Engelbert Humperdinck, 1891) après avoir été renvoyé chez lui par Blatte et Michelle. C'est sur cet air romantique qu'arrive alors Sandra. La musique embarque inévitablement Sandra et Leonard dans une aventure amoureuse sincère bien qu'induite par la pensée de Michelle.
Les deux jeunes femmes ont chacun leur espace. La plage pour Sandra ; c'est là qu'elle offre les gants à Leonard et les toits pour Michelle. Celle-ci n'est hélas pas la fille d'à côté, simple, dont rêve Leonard (regard sur le couple dans le trajet en métro) et qu'il croit voir vraiment de sa fenêtre lorsqu'elle lui affirme avoir rompu avec Blatte.
Ces deux espaces féminins s'opposent d'une part au danger que représente l'infini de la mer, et d'autre part aux espaces confinés de l'appartement de la laverie ou du bureau de Cohen père. Belle opposition aussi, toujours magnifiée, entre un New York des quartiers pauvres (photos noir et blanc) et celui de Rockefeller place (ralenti).
Leonard est un personnage complexe, fragilisé par son histoire d'amour brisée, pouvant se permettre la légèreté sociale du fait de la situation de ses parents mais toujours lucide, prévenant et décidé. Le jeu final sur la bague et le gant, l'une jetée puis finalement reprise après que l'autre ai été ramassé, est la belle conclusion de ce film, toujours en quête d'ailleurs mais sensible à la douceur des êtres.
Jean-Luc Lacuve le 16/12/2007