1963. McMurphy, 38 ans, est transféré du pénitencier dans une clinique psychiatrique. Cinq fois arrêté pour combats avec violence et condamné pour viol sur mineure, consente d'après lui, il doit être évalué par le docteur Spivey. Celui-ci devra dire si McMurphy simule un dérangement mental pour échapper au travail carcéral.
McMurphy est interné dans une section de dix-huit malades dont les soins sont surveillés par l'infirmière Ratched. Celle-ci a ordonné de façon très stricte la vie de ses patients : distribution de médicaments au son de la musique classique, gymnastique et groupe de parole se succèdent. Y participent principalement huit malades. Il y Lared, intellectuel et homosexuel refoulé qui souffre de l'infidélité réelle ou supposée de sa femme qu'il ne peut satisfaire. Il y a Martini, débile léger, Billy le bègue, suicidaire, incapable de se défaire de l'autorité de sa mère et Chesswick, obséquieux et souffrant de peurs paniques. Autour d'eux, il y a Mancini, l'aphasique, un ancien général et un ancien tennisman perdus dans leur monde et surtout L'indien, un imposant chef de tribu que tous croient sourd et muet.
McMurphy s'oppose vite par sa trop forte personnalité aux méthodes répressives de l'infirmière Ratched. Il demande à baisser le niveau de la musique, refuse de prendre ses médicaments et entraîne les autres à demander d'allumer la télévision pour la diffusion de la coupe des clubs. Ratched, sûre de son autorité, autorise un premier vote, où McMurphy n'obtient que trois voix. Le lendemain, il en obtient neuf mais Ratched clôt la séance avant que l'Indien ne fasse basculer la majorité. McMurphy triomphe quand même en mimant sa réaction de spectateur enthousiaste.
Le lendemain, après un mois d'internement, Murphy est convoqué devant le docteur Spivey et deux autres psychiatres qu'il ridiculise. Le surlendemain, il transforme l'habituelle sortie en bus en grande partie de pêche en mer. Au retour, il est sévèrement puni et condamné aux électrochocs. Il parvient néanmoins à organiser par la suite une partie fine avec des prostituées afin que Billy ait sa première expérience sexuelle. Il pense s'échapper mais, pour avoir un peu trop tardé, est repris par les gardes. Alors que Ratched persécute moralement Billy pour l'empêcher de reprendre son autonomie, McMurphy tente de l'étrangler. Une lobotomie le transformera en légume, avant qu'un détenu ne l'étouffe par pitié.
Le film souffre de nombreux défauts. La radio annonce que la finale de la coupe des clubs de baseball se déroule en 1963. La charge contre l'establishment psychiatrique est ainsi amoindrie par le fait qu'il ne s'agit pas d'une situation contemporaine au tournage du film (1974). Cela laisse supposer que l'usage des méthodes barbares que sont les électrochocs et la lobotomie peut appartenir au passé. Par ailleurs, la perversité morale dont fait preuve Ratched, qui persécute moralement chacun de ses malades pour les dominer, est un ressort dramatique un peu excessif et répétitif.
Il n'en reste pas moins que la rage de liberté dont a toujours fait preuve Forman se retrouve pleinement ici. Face au docteur Spivey, compassé et fragilisé par sa vanité par trop apparente de pécheur de saumon ; face aux autres psychiatres et à l'infirmière, tous coincés dans leur idéologie de l'ordre et du calme à tout prix, McMurphy propose une solution libératrice à certains traumatismes. L'indien reste aussi une figure inoubliable des traumatismes sociaux que, faute de mieux, on demande à la psychiatrie de guérir.
Le casting est la qualité première du film. Nicholson, énergie du visage, du langage et des gestes toujours en action est l'interprète idéal pour une thérapie de l'action qui dépasse le simple behaviorisme par l'investissement affectif dont il fait preuve. La séquence de match de baseball à la télévision éteinte où celle-ci ne reflète que les actions que mime McMurphy et celui du visage des autres patients, interloqués, est l'une des plus belles du film.
C'est le producteur, le tout jeune Michael Douglas, qui proposa le scénario à Forman et lui permit ainsi de connaître enfin le succès après huit ans passés aux Etats-Unis et l'échec public du beau Taking off (1971). Le film rafla cinq Oscars dont ceux du Meilleur film, Meilleur acteur et Meilleur réalisateur.
Jean-Luc Lacuve, le 26/06/2011.