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Guy Debord

(1931- 1994)
7 films
   
   
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Histoire du cinéma : Pensée et cinéma

Pour Debord, le cinéma pourrait être le moyen privilégié d'attaquer la société du spectacle qu'il dénonce. Il pourrait s'agir d'en détourner les images pour en faire des armes contre elle-même. Dans In girum, il dénie pourtant à l'image la possibilité de prouver quoi que ce soit. Elle ne peut convaincre que les convaincus, chacun y trouvant la preuve de ce qu'il pense déjà.

Le cinéma est plus simplement un moyen de continuer ce qui fait la vraie vie : la révolte, la révolution, l'amour et l'amitié. Sa mise en scène n'est pas donc destinée au cinéphile. Elle est un combat qui s'adresse au spectateur politique qui a compris son message." Je ne fais pas de film pour ceux qui ne comprennent pas, ou qui dissimulent, cela. "

La mise en scène repose principalement sur le détournement des images. Ces détournements sont des gestes politiques qui produisent de l'énergie. A l'exception notable des extraits élégiaques des Enfants du Paradis, des Visiteurs du soir ou des Enfants terribles dans la partie centrale de In girum, le sens des extraits est détourné de celui voulu par le metteur en scène pour en faire les instruments d'une lutte en cours vers la révolution.

Debord politique

Le concept de spectacle constitue la synthèse personnelle opérée par Debord entre son vécu et un certain nombre de concepts essentiels dans la tradition marxiste : notamment ceux d’idéologie, d’aliénation, de fétichisme de la marchandise ou encore de réification.

Le concept de spectacle renvoie aux sociétés industrielles modernes, capitalistes ou socialistes, et à leur asservissement de plus en plus absolu à l’économie. Celle-ci se développe dès lors pour elle-même. Pour imposer sa tyrannique loi, elle ne cesse de se mettre en scène comme souverain bien, et comme le seul possible, en une version moderne parfaitement totalitaire de l’illusion religieuse. Dans ce sens, le spectacle, ce ne sont pas que les images (par exemple télévisuelles, comme on le croit parfois), mais c’est beaucoup plus l’idéologie qui rend de telles images et bien d’autres possibles. C’est l’idéologie coïncidant avec un fétichisme généralisé de la marchandise, l’idéologie fonctionnant comme un principe d’aliénation, de captation des individus et de la vie réelle dans des apparences et des représentations :

« Le spectacle en général, comme inversion concrète de la vie, est le mouvement autonome du non-vivant . » Thèse 2

Source fondamentale d’aliénation, le spectacle est alors aussi à l’origine de la solitude et de la séparation qui caractérisent les sociétés modernes (Thèses 25 et 29). Il est un principe d’interruption du dialogue, il remplace la véritable communication entre les individus par le monologue élogieux qu’il tient sans interruption sur lui-même (Thèse 24), il s’impose là où il parvient à dissoudre la communauté et le sens critique qui l’accompagne.

« La critique qui atteint la vérité du spectacle le découvre comme la négation visible de la vie ; comme une négation de la vie qui est devenue visible (Thèse 10). »

 

Biographie

Né le 28 décembre 1931. Son père meurt de tuberculose en 1936. En 1939, il quitte Paris pour Nice puis Pau et Cannes. En 1945 sa mère épouse Charles Labaste.

Au printemps 1951, Guy Debord rencontre les lettristes au festival de Cannes. Il passe son bac en juin et s'installe à Paris.

Le 30 juin 1952 a lieu la première projection de Hurlements en faveur de Sade. En automne, l'Internationale lettriste, fondée en été avec Gil J. Wolman, rompt avec Isidore Isou. En 1953, Guy Debord se marie avec Michèle Bernstein. En 1954, premier numéro de Potlatch, rencontre avec Asger Jorn. En 1957, Rapport sur la construction des situations et sur les conditions de l'organisation et de l'action de la tendance situationniste internationale. Fondation de l'Internationale situationniste a`Cosio d'Aroscia (Italie). 1960 : Préliminaires pour une définition de l'unité du programme révolutionnaire, de P. Canjuers (pseudonyme de Daniel Blanchard, du groupe Socialisme ou Barbarie) et Guy Debord. En Septembre, Debord signe la Déclaration des 121. En Février 1963 : Debord rencontre Alice Becker-Ho, avec qui il vivra de 1964 à 1994.

En 1968, collaboration des situationnistes avec le groupe des Enragés de Nanterre, création du Conseil pour le maintien des occupations. En Juin, les situationnistes s'éxilent en Belgique. 1969 : douzième et dernier numéro de L'Internationale situationniste. 1971 Debord rencontre Gérard Lebovici. 1972 Debord divorce de Michèle Bernstein , mariage avec Alice Becker-Ho avec qui il vit essentiellement a`Florence. Dissolution de l'Internationale situationniste.

1983 les films de Guy Debord sont programmés sans interruption au Studio Cujas, racheté par Gérard Lebovici. 5 mars 1984 assassinat de Gérard Lebovici. Avril : interruption définitive du`programme Guy Debord au Studio Cujas.

1992 : début de la réédition des livres de Guy Debord chez Gallimard. 30 novembre 1994, Guy Debord se suicide.

9 janvier 1995 soirée télévisuelle Guy Debord, son art, son temps, sur Canal Plus.

Interdits de projection par leur auteur en 1984, les films de Guy Debord font en 2001 l'objet d'une première sortie mondiale de l'ensemble à l'occasion de la Biennale de Venise. En 2005, Carlotta les distribue en salles et Gaumont propose une édition DVD.

Bibliographie : Fabien Danesi, Le cinéma de Guy Debord (1952-1994), Edition, Paris-Exprimental, 2011.

Filmographie :

1952 Hurlements en faveur de Sade

Avec les voix de Gil J. Wolman, Guy Debord, Serge Berna, Barbara Rosenthal, Isidore Isou. 1h04

film composé de séquences d'écran blanc, durant lesquelles sont énoncées par quelques voix off des phrases provenant du Code civil ou de textes d'auteurs, alternant avec des séquences à écran noir silencieuses.

   
1959 Sur le passage de quelques personnes à travers une assez courte unité de temps
   
   
1961 Critique de la séparation
   
   
1973 La société du spectacle
Avec la voix de Guy Debord. 1h30.

Le film reprend 88 des 221 thèses des neuf chapitres du livre La société du spectacle, de Guy Debord paru en novembre 1967. elles sont énoncées dans un nouvel agencement qui va de pair avec la disparition de leur numérotation : à la fragmentation initiale se substitue une continuité due à leur énonciation. La voix de Guy Debord, blanche, précise et posée, relie l'ensemble des images détournées à travers la description clinique du fonctionnement de cette société.

   
1975 Réfutation de tous les jugements, tant élogieux qu’hostiles, qui ont été jusqu’ici portés sur le film « La société du spectacle »
  Comme l’indique ce long titre, l’enjeu est bien, ici, parallèlement au commentaire d’un certain nombre de points de l’actualité politique (du programme commun de la gauche française à la révolution portugaise), d’attiser le conflit recherché avec le film précédent. La Société du spectacle privait les spectateurs d’images gratifiantes. Avec son nouveau film, Debord va plus loin en les privant non seulement d’images, mais aussi de tout droit de regard sur ses films.
   
1978 In girum imus nocte et consumimur igni

« Voici par exemple un film où je ne dis que des vérités sur des images qui, toutes, sont insignifiantes ou fausses ; un film qui méprise cette poussière d’images qui le composent (…). Oui, je me flatte de faire un film avec n’importe quoi ; et je trouve plaisant que s’en plaignent ceux qui ont laissé faire de toute leur vie n’importe quoi. » Réfutation de tous les jugements..., oeuvres cinématographiques complètes, p. 212).

« Ceux qui disent qu’ils aiment ce film ont aimé trop d’autres choses pour pouvoir l’aimer ; et ceux qui disent ne pas l’aimer ont, eux aussi, accepté trop d’autres choses pour que leur jugement ait le moindre poids », Ibid., p. 163-164.

«Ils cherchent à déguiser en un simple désaccord sur une conception du cinéma ce qui est, en vérité, un conflit sur une conception de la société ; et une guerre ouverte dans la société réelle », Ibid., p. 169.

   
1995 Guy Debord, son art, son temps
  téléfilm, de Guy Debord et Brigitte Cornand, Canal Plus
   
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