Monsieur Verdoux

1947

Genre : Drame social
Thème : serial killer

Avec : Charles Chaplin, Mady Correll, Martha Raye, Marilyn Nash, Isobel Elsom, Allison Roddan. 2h02.

Employé de banque modèle, Henri Verdoux est licencié, victime de la crise, avec une femme infirme et un enfant à charge. Comme il a acquis une expérience certaine, il se lance dans la spéculation boursière : pour obtenir l'argent nécessaire, il épouse, parfois simultanément, des dames un peu mûres, mais point très futées dont il se débarrasse discrètement.

Cependant, il ne parvient pas à se défaire d'Annabella Bonheur, échoue avec Marie Grosnay..., se laisse attendrir par une jeune fille prête au suicide... Malgré tout, il réussit chaque fois à s'en sortir et continuerait si sa femme et son fils ne disparaissaient. Alors qu'il a facilement éliminé un inspecteur de la police pourtant perspicace, il se laisse arrêter et condamner à mort. Il boit le verre de rhum - parce qu'il n'en avait jamais bu - et auréolé de lumière, retrouvant la démarche dansante de Charlot, marche à la guillotine.

A priori, le vagabond et le tueur de femmes n'ont aucun point commun. Un examen plus attentif révèle que Verdoux conserve au moins deux caractéristiques de Charlot ; l'une anémiée et inutile, l'autre monstrueusement grossie.

Comme Charlot, Verdoux est un être sensible, doué de compassion, montrant à l'occasion un cœur gros comme ça. Il possède aussi le sens de l'adaptation sociale et la férocité de Charlot, si caractéristique des premiers courts métrages. En fait, il tend à la société un miroir : affairisme diabolique, extermination. "Von Clausewitz a dit que la guerre était l'extension logique de la diplomatie. M. Verdoux pense que le meurtre est l'extension logique des affaires" commentaire de Chaplin peu avant la sortie du film. Verdoux est le produit logique - et lucide- de la société et de l'époque où il vit.

Parce que Verdoux est lucide, qu'il se dédouble et se regarde agir, le film peut devenir comique, en particulier à cause de cette étrange sérénité que le héros manifeste dans ses crimes, à son procès et devant la mort. Sans doute se conçoit-il comme innocent et Chaplin parfois, n'est pas éloigné de partager ce point de vue.