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Anne avocate pénaliste reconnue, spécialisée auprès des mineurs victimes de violences sexuelles, vit bourgeoisement dans un foyer recomposé, aux côtés de son mari, Pierre un homme d’affaires préoccupé par un contrôle fiscal, et de leurs deux filles adoptives, Serena et Angela. Avec l’arrivée des vacances, Pierre installe dans leur grande maison son fils Théo, 17 ans, jusque-là élevé par sa mère, soudain débordée par la violence leur fils face à un professeur dans un lycée de Genève. Pierre n’a pas beaucoup connu son fils mais il espère pouvoir s’en rapprocher. Théo, rebelle à toute forme d’autorité, fume dans sa chambre, joue aux jeux vidéo, laisse traîner ses affaires et rejette avec mépris les conseils de son père qui souhaiterait qu’il révise pendant les vacances. Pierre est absorbé par ses affaires et Anne s’accommode des relations glaciales avec cet adolescent sans gêne, à la toison bouclée et qui déambule souvent torse nu.
Alors qu’Anne a invité sa sœur, Mina, esthéticienne dans un salon de beauté, à déjeuner à la maison, elle découvre que son appartement a été cambriolé. Son sac a disparu. Un peu plus tard, alors qu'elle met un pantalon de Théo à la machine à laver, elle y découvre un porte clé appartenant à Théo qu'elle avait ramassé et mis dans son sac en oubliant de le lui remettre. Elle lui présente la preuve du cambriolage qu'il a commis promettant de ne pas le dénoncer s'il fait l’effort de s'intégrer à la famille.
Theo accepte et convainc Anne de se laisser tatouer trois points noirs dans le creux du bras. Un soir Theo rentre avec la belle Amanda, une jeune fille de son âge, qu'il entraine dans sa chambre. Anne en est affectée.
Theo accompagne Anne, Serena et Angela pour une baignade en rivière, où il se chamaille dans l’eau avec Anne puis reviennent dans la splendide lumière du soir en écoutant musique dans la Mercedes décapotable.
Quand Pierre revient, il invite des amis à la maison et Anne, qui s'ennuie accepte de suivre Theo en ville acheter des cigarettes. Elle se serre contre lui sur sa trottinette et glousse d’aise en conversant avec Theo et sirotant ses bières. Pierre lui reproche sa désinvolture vis- à-vis de leurs invités mais lui pardonne bien vite.
Un soir que Pierre est parti, Anne rend visite à Théo dans sa chambre qui lui montre une série sur son téléphone avant de l’embrasser ; elle se laisse aller à faire l’amour avec lui mais lui demande de ne plus jamais recommencer et d’en garder le secret.
Mais l’été aidant et la séduction de Théo faisant le reste, ils font l'amour une seconde fois plus longuement. Theo devient imprudent et, durant la fête d’anniversaire de Serena, Mina les surprend. Du coup, Anne insiste pour que Theo cesse de l'approcher afin de sauvegarder sa vie de famille mais se laisse aller à un dernier baiser d’adieu.
Pierre prend une semaine de vacances pour la passer dans leur chalet avec son fils. Anne le vit mal et cherche à téléphoner à Pierre dès le premier soir. En revenant de conduire les filles à leur leçon d'équitation, elle cherche fébrilement son téléphone et part dans le fossé. Elle rentre avec les filles en taxi et dit à Pierre, revenu bien plus tôt que prévu, qu'elle a cassé la boite de vitesses. Mais Pierre est perturbé et n’attend que le coucher de ses filles pour interroger Anne. Il est scandalisé : Theo lui a révélé sa liaison avec Anne. Celle-ci nie en bloc au point de donner mauvaise conscience à Pierre qui la croit quand elle dit que son fils est un monstre qui a voulu le séparer d‘elle pour se l'accaparer.
Le matin, Theo est convoqué dans le salon et sommé d’avouer qu'il a menti. Anne n’attend qu'une simple demande de pardon pour passer l'éponge. Mais Theo s'obstine et part avec l’opprobre de son père.
Theo veut rendre publique leur relation et Anne tente de le convaincre qu'il ne peut rien contre elle. Elle n’est pas sa mère, il n’y a donc pas inceste. Mais Theo s’obstine et Anne est convoquée chez son avocat. Celui-ci’ pas le même avis sur l’inceste et la menace de l'attaquer en justice si elle n’accepte pas l'accor de Théo. Anne cède.
Pierre et Anne fêtent Noël avec leurs deux filles et Mina qui voit Pierre offrir un somptueux bracelet à sa femme. Dans la nuit, Theo vient frapper violemment à la porte et Anne se lève pour lui ouvrir. Saoul, il se jette sur elle pour l’embrasser. Anne ne résiste pas longtemps et ils font l’amour sur le sol. Anne remonte se coucher à côté de Pierre et lui indique qu'il s'agissait de Théo. Pierre lui ferme la bouche quand elle va avouer.
L'été dernier reprend l'intrigue du film danois Queen of Hearts (May el-Toukhy. 2019), s'approche de celle d'Un moment d'égarement (Claude Berri, 1977, et Jean-Claude Richet, 1995) mais lesté de la faute de l'inceste. La belle-mère doit en effet assurer la même protection à son beau-fils que s'il était son fils. Ainsi, tout autant que la chute d'un bourgeoise emportée par son désir, le fim s'attarde sur les déreglements de Théo, adolescent blong et gracile, tout autant detestable que fragile.
Une chute programmée
Anne, sous le charme de Théo, se laisse tatouer le bras, toucher dans l’eau du lac, emporter par la chanson au soleil couchant dans la voiture, serrer sur la trottinette avant de s'allonger dans le lit de Théo, ce dernier étant toujours à l'initiative de leur rapprochement. On retrouve là l'intrigue de Un moment d’égarement où un quinquagénaire se laisse séduire par la fille de 17 ans, très entreprenante, de son meilleur ami ; le tout se terminait sans conséquence par un pugilat entre les pères. Ici il y a inceste, la belle-mère devant assurer la même protection à son beau-fils que s'il était son fils. Anne, ne pouvant prouver la part active de Theo dans leur relation, accepte de transiger avec l’avocat.
L'amour en fermant les yeux
Anne aurait préfèré que son mari se déclare fatigué plutôt que de lui faire l'amour et elle se raconte un petit scénario en fermant les yeux lorsqu’il la prend rapidement. Avec, Théo l’amour physique est pour elle une forme d’extase dénuée de sentiment, elle apprécie ce corps mince qu'elle tient entre ses bras et ferme les yeux à la manière de Marie-Madeleine en extase du Caravage dont Catherine Breillat s’est inspirée. Cette double expérience physique et mystique est orthogonale à la raison qui lui revient quand il s'agit d'éloigner le danger pour sa vie avec ses deux charmantes filles (très bien dirigées) qui déploient leur joie de vivre en toute innocence (le trampoline et la veillée de Noël)
Théo, déjà très perturbé avant de venir, s'enfonce dans le mensonge sans avoir plus personne à qui se raccrocher. Il est alors probable que, désorienté, sans repère, il ait dénoncé en s'effondrant sa relation avec Anne à son père dans le chalet comme celui-ci le raconte. C’est cette méconnaissance de la fragilité de Théo, par ailleurs détestable, qui est coupable. Pierre voudra peut-être entendre parler le lendemain matin plutôt que de s'enfoncer dans la nuit du silence.
La nuit du silence
Le premier plan du film cadre en gros plan le visage d'une adolescente violée qui craint de ne pas être reconnue comme victime. Son souffle est angoissé. Le conseil que lui donne Anne, filmée en plan large, avec le recul de la professionnelle, est de toujours dire la vérité. Pourtant, éblouie par Théo dans des gros plans qui relèvent plus du Tadzio de Mort à Venise (Luchino Visconti, 1971), testant avec aplomb sa séduction naissante, que du fier Envoyé de Théorème (Paolo Pasolini, 1968), elle oublie ce conseil. Elle oublie la souffrance de l'enfant détestable parce que mal aimé et s'abandonne à son seul désir. Théo, avec l'intransigeance de son adolescence, ne peut accepter ce mensonge. C'est lui qui revient à la charge. L'accord accepté par Anne est une nouvelle dérobade et il ne peut que frapper à la porte de sa maison, de son désir, jusqu'à ce qu'on lui réponde : la nuit du silence, dernier plan du film, ne peut que lui être insupportable.
Jean-Luc Lacuve, le 21 septembre 2023