Riyad, capitale de l’Arabie Saoudite. Parmi un groupe d’écolières, Wadjda, paire de baskets noires aux lacets violets et jean sombre dépassant de son uniforme, est distraite. Ne sachant pas réciter le Coran comme le lui demande son enseignante, elle est punie à rester en plein soleil dans la cour. De retour chez elle, elle écoute de la musique pop anglophone dans sa chambre. Elle met en sachet des bracelets.
Le lendemain, sa mère va au travail en taxi avec d’autres femmes. En partant pour la madrasa, l'école coranique, la fillette rencontre son père, qui n'est pas revenu, à la maison depuis une semaine qui lui offre une pierre de lave. En chemin, Wadjda rencontre son ami Abdallah qui affiche le portrait d’un « moustachu » pour les élections municipales. Il lui dérobe son sandwich pour quelle fasse la course avec lui. elle gagne, il revient alors en vélo et lui vole son foulard avant de le lâcher dans le sable. Vexée, Wadjda se promet d’avoir un vélo pour le battre à la course. Al'école, Madame Hessa, la directrice de la madrasa, sermonne Fatin et Fatima parce qu’elles rient, puis Wadjda, tête nue. Au retrour, tête nue, Wadjda est apostrophée par des ouvriers dans la rue. Gentillement, Abdallah lui offre un nouveau foulard. Elle rêve d’un vélo mais « les filles n’en font pas » lui répond son ami. Restée seule, elle aperçoit un vélo vert fixé sur le toit d’une camionnette. Elle court à sa suite jusqu’au magasin où il est livré.
Wadjda demande à sa mère un vélo. Sa mère refuse de le lui offrir objectant que cela menacerait sa vertu comme le stipulent les autorités wahhabites. Recomptant fébrilement son argent de poche, elle confectionne plus de bracelets aux couleurs des équipes de foot du pays pour les vendre à ses camarades. A l'école, elle double ses prix. Mme Hessa surprend Wadjda tandis que Fatin et Fatima s’esquivent. Wadjda récupère le vernis à ongles bleu qu'elles ont abandonné à la hâte. Mme Hessa lui impose pour le elndemain de revêtir une abaya qui la designe dorenavant comme jeune fille nubile. .En classe, des fillettes parlent du « voleur » qui s’est introduit chez Mme Hessa. À la sortie, Abeer demande un service à Wadjda. Celle-ci accepte et négocie pour 10 ryals et négocie avec l'homme pour la m^me somme.
Wadjda tente d’amadouer le marchand de vélo pour quil ne le vende qu'à elle. Wadjda essaie une abaya maternelle pour le lendemain et parodie Mme Hessa criant « au voleur! » alors que sa sa mère accueille aussi cela avec humour (« on va pouvoir te marier alors ? »). Au téléphone avec sa sœur Leila, sa mère parle de la police des mœurs. Rentré, le père joue à un jeu vidéo.
Le sac de Wadjda est vidé sur le bureau de Mme Hessa. Bracelets et cassettes audio sont confisqués. Elle la met en garde : la police des mœurs a arrêté Abeer. Elle est aussi priée de changer ses « écrase-merdes » pour des souliers.
Son attitude imprudente déclenche l’ire maternelle. Wadjda barbouille en noir ses baskets. Ses parents ont de vifs échanges car la mère ne peut pas avoir de garçon. Wadjda accompagne sa mère au centre commercial pour acheter une robe. Cette dernière est contrainte de l’essayer dans des toilettes publiques. Wadjda offre une cassette audio de variétés au marchand en guise d’amitié. En classe, Mme Hessa expose les règles du concours de tartil ( récitation du Coran). Wadjda s’inscrit attirée par la récompense, 1000 ryals qui lui permettra d'acheter le vélo.
Wadjda achète chez le marchand un jeu de société interactif, le Coran facile. Elle échoue à chaque question. Sa mère congédie Iqbal, le chauffeur de taxi mais du coupse trouve confinée à lamaison. Abdallah accompagne Wadjda en ville pour trouver Iqbal. Le garçon menace de le dénoncer. Au retour, les enfants passent devant la maison d’un martyr. Wadjda déballe une tasse ornée d’une photo d’elle sur les genoux de sa mère, entièrement masquée par l’abaya. Elle entend sa mère téléphoner à son père puis à Leila.
Abdallah désire installer des lampions depuis la maison de Wadjda pour les élections. Sa mère refuse. À son insu, Wadjda l’y autorise, mais exige de faire du vélo en compensation. La mère de Wadjda parle avec Leila de son emploi à l’hôpital. Sur la terrasse, Abdallah ôte promptement les roulettes du vélo. Wadjda vexée, cesse de pleurer.
Au cours sur le Coran. Wadjda ne sait pas réciter convenablement comme Noura y excelle. Abdallah dispose les lampions tandis que Wadjda apprend à faire du vélo. Sa mère aperçoit avec mécontentement les suspensions en sortant de chez elle. La directrice convoque à nouveau Fatin et Fatima qu'elle a surprises dans la cour
Wadjda et sa mère font la prière de l’Aube. Wadjda dit avoir vu à la télévision des filles faire du vélo. Sa mère se fâche. Convoquée, Wadjda nie avoir vu Fatin et Fatima dans la courfaire quoi que ce soit de réphéhensible. Mme Hessa les exhibe devant les fillettes rassemblées et interdit « les fleurs, les lettres d’amour et de se prendre la main ».
Allongée sur le lit maternel, Wadjda admire ses ongles de pieds vernis en bleu. Wadjda est surprise par sa mère sur la terrasse et tombe de vélo. Abdallah en est chassé.
Réunion d’hommes dans le salon. Wadjda et sa mère mangent après leur départ. Un arbre généalogique de la famille ne mentionne pas la fillette. Vexée, elle y épingle son prénom.
Cours de Coran. Salma a été mariée. L’enseignante la félicite. Wadjda n’arrive pas à psalmodier. Salma excelle. Abdallah participe aux préparatifs des élections auxquelles son oncle se présente. Il offre à Wadjda un casque de vélo.
Chez elle, Wadjda gagne la partie du Coran facile. Avec sa mère, elles vont voir Leila à son travail à l’hôpital. La mère est choquée par son impudeur. Sur la terrasse, Wadjda parfait sa technique du tartil avec sa mère. En contrebas, on fête les élections.
Wadjda gagne le premier prix du concours. Lors de la remise du prix, fidèle à elle-même, elle annonce publiquement devant toute l’école vouloir s’offrir un vélo. La directrice, stupéfaite et déçue, reprend ses esprits, la prive de son prix en imposant un don aux frères Palestiniens. Attristée, la fillette repart en colère.. Wadjda lui rappelle effrontément l’histoire du « voleur ».Déçu pour elle, Abdallah avoue vouloir l’épouser un jour. Wadjda est félicitée par son père mais elle ne lui explique pas la raison de ses larmes. Le soir venu, sur la terrasse, Wadjda trouve sa mère, les cheveux coupés. Tristes, elles distinguent la fête du second mariage paternel. Après l’avoir félicitée, sa mère dévoile une surprise : le vélo.
Wadjda et Abdallah font une course ensemble, passant devant le marchand enjoué. Elle devance son ami avec aisance et sourit éprise de liberté.
Wadjda, premier film d'Arabie Saoudite, réalisé par une femme, est un plaidoyer pour un changement de société plus favorable aux femmes de ce pays. Elles sont en effet contraintes aux rebuffades, aux humiliations ou à sacrifier leur personnalité. La profusion de personnages bien définis qui incarnent chacun une façon d'être vis à vis de la thèse centrale participe à la qualité documentaire du film mais en marque aussi les limites.
L'Arabie Saoudite entre tradition et modernité
L'intrigue se situe aux seins de familles de la classe moyenne, à l’image de la mère de Wadjda ou de la sœur de celle-ci, Leila, qui travaillent. Leila refuse de se plier à la tyrannie d’un chauffeur de taxi qui se permet de hurler sur ses clientes. C’est une battante qui ne se satisfait pas de la vie telle qu’elle a été établie pour les femmes saoudiennes. Elle a engagé un chauffeur particulier, changé de travail se retrouvant en milieu mixte à l’accueil d’un hôpital. Elle s’est émancipée du regard des autres.
Ce n'est pas le cas de la mère de Wadjda qui renonce, sauf à la toute fin, à se couper les cheveux comme elle en a envie pour garder la protection de son mari. Celui-ci est soumis à la religion et la tradition. Il ne s’oppose pas à sa mère qui lui impose un remariage du fait de l'absence de descendance mâle et se détourne de sa femme dont il attend avant tout des services domestiques. Il se contente de cadeaux symboliques envers sa fille, la pierre de lave offerte en tant que porte-bonheur, sans chercher à connaitre la cause de son chagrin quand elle n'obtient pas l'argent pour le vélo.
Ce ton doux-amer a pour point d'orgue le papier sur lequel Wadjda épingle son nom sur l'arbre généalogique et qui est ensuite froissé par son père.
Un avenir porteur d'espoir est incarné par Abdallah, l'ami drôle et dévoué. Il se permet de délaisser ses amis en pleine partie de foot pour la fillette, lui offre un foulard et un casque de vélo et veut même l’épouser une fois adulte. Timide et courageux, il la défend face au mépris d’Iqbal en le menaçant.
Une intrigue trop tricotée pour emporter l'émotion
L'aspect documentaire du film est particulièrement frappant avec l'absence d'animation dans les rues où il n'y a que des hommes et des enfants, sans couples ni femmes, toutes en taxi. On voit aussi, en arrière-plan, une campagne électorale locale, la vie quotidienne des boutiquiers et des employés de la capitale saoudienne.
On évitera pourtant de comparer le film au néo-réalisme en particulier au Voleur de bicyclette (Vittorio de Sica, 1948). Chez le cinéaste italien, les personnages rencontraient dans leur recherche du vélo volé, des situations particulières, radicalement singulières et étrangères à leur préoccupation du moment. Elles les mettaient face à d'autres situations de misère qui n'entrainaient ni aide ni entrave au développement de l'intrigue.
Ici, au contraire, tout est tricoté au sein d'une intrigue symbolique. Si on est naturellement en empathie avec les progressistes, l'émotion reste contenue dans les rets de la signification dont est porteur chaque personnage. Interprétation touchante néanmoins de Waad Mohammed, notamment dans la dernière scène où alors que la course est à peine amorcée, Abdalllah disparait. Wadjda reste seule, souriante néanmoins face à un avenir incertain.
C'est cette dimension existentielle, dégagée de l'intrigue, que l'on éprouvait plus constamment et vivement avec Hors jeu (Jafar Panahi, 2006) ou, il y a plus longtemps, avec Le passager (Abbas Kiarostami, 1974).
Jean-Luc Lacuve, le 4 avril 2020.