Le sujet est tiré de la Bible, 1 Samuel, 16, 1-13. Claude peint le moment où le prophète Samuel, venu à Bethléem dans la maison d’Isaï, sacre David, le cadet des huit enfants de celui-ci : « Alors Samuel dit à Isaï : Sont-ce là tous vos enfants ? Isaï lui répondit : Il en reste encore un petit, âgé de quinze ans, qui garde les brebis […] Isaï l’envoya donc quérir, et le présenta à Samuel. Or il était roux, d’une mine aventageuse, et avait le visage fort beau. Le Seigneur lui dit : Allez, sacrez-le ; car c’est celui-là. Samuel prit donc la corne pleine d’huile qu’il avait apportée, et le sacra au milieu de ses frères. Depuis ce temps-là, l’esprit du Seigneur fut toujours avec David, qu’il remplit de force, de sagesse et de piété. » Le dernier chiffre de la date est presque illisible, probablement « 1643 ».
Claude représente la scène sous le portique monumental de la maison d’Isaï, orné de colonnes doriques, dont les métopes sont décorées de vases, de bucranes, de carquois en sautoir et d’un médaillon. La corniche est surmontée par une balustrade avec des statues de divinités antiques en amortissement, qui alternent avec des orangers en pots : on reconnaît Vénus, Cérès avec un épi de blé dans sa main levée et Apollon avec sa lyre. Claude confère ainsi une majesté antique à une scène de l’Ancien Testament. L’artiste va jusqu’à peindre un autel orné de pilastres, pour représenter le sacrifice cité dans la Bible : « Prenez avec vous un veau du troupeau ; et vous direz : Je suis venu pour sacrifier au Seigneur » (1 Sam, 16, 2). Mais, au lieu d’un veau, Claude a représenté un bélier.
Pour les figures de Samuel et de David, l’artiste s’est inspiré des personnages apparaissant dans la scène sur le même sujet dans le décor des Loges de Raphaël au Vatican (XIe Loge). Cette oeuvre est le dernier des sept tableaux peints pour le cardinal Angelo Giori, chambellan d’Urbain VIII Barberini. Le dessin correspondant à la composition dans le Liber Veritatis comprend en effet la mention « quadro faict per leminemo Sig Cardinale Giore » Le sujet pourrait faire allusion à l’accession de Giori au cardinalat en 1643 . Et pourtant l’oeuvre était considérée comme une copie dans l’inventaire Le Brun : « manière de Claude Le Lorrain » . C’est d’autant moins compréhensible que le pendant, Le Débarquement de Cléopâtre à Tarse , était bien attribué à Claude dans le même inventaire. En outre, l’oeuvre est superbe : subtile dans le coloris, monumentale dans la mise en scène. Seule la maladresse des figures pourrait expliquer ce jugement négatif, notamment la figure de David à la tête mal attachée au torse.
Le tableau a été restauré en 1965 puis en 1982. C’est une oeuvre particulièrement fragile.