Nina Childress, genoux serrés à l'arthotèque de Caen 6 février - 12 juin 2021 |
Genoux serrés, c’est le titre d’une exposition qui réunit, dans une salle toute repeinte en noir et sous la lueur de lumières noires, dans une semi-obscurité ainsi voulue par l’artiste Nina Childress, un ensemble récent de peintures phosphorescentes qui distille avec une liberté de style et une certaine irrévérence de formes, une série de portraits en jambe de stars aux parfums surannés.
Toutes les peintures de cette salle sont réalisées avec une acrylique phosphorescente étalée sur la toile de lin qui est ensuite obscurcie par un dessin à l'huile, noir. La lumière semble ainsi surgir du tableau pour aller vers le spectateur. Un pigment orange, qui se marie bien au pigment vert fluorescent, est utilisé sur certaines toiles ainsi que parfois des cheveux (1047, 1053,1055, 1060,1069).
Chacun des titres est précédé d'un numéro car Nina Childress catalogue ainsi ses œuvres depuis ses débuts.
Au fond de la pièce comme une grande peinture classique de portrait du type, The morning walk (Thomas Gainsborough, 1768) par exemple, c'est 1028-garde-corps (2019) avec, sur le côté droit, deux peintures en vis-à-vis : 1041-Genoux serrés (2020) et 1042-Bad Genoux serrés (2020)
A la vision romantique de 2019, jeunesse heureuse, avec le parc Monceau en arrière-plan s'oppose le diptyque de 2020. 1041-Genoux serrés retrouve la même pose que 1028-garde-corps mais difficile de ne pas pressentir le drame qui emportera bientôt Françoise Dorléac. C'est ce qu'exprime avec force dans 1042-Bad Genoux serrés, le volcan à l'arrière-plan, les corps et vêtements déformés, la cicatrice au cou de Catherine Deneuve.
Beaucoup plus léger et plein d'humour, le diptyque, 1059-Joues rouges (Rocketman) (2020), une photo de jeunes filles fans d'Elton Jones et, en face dans la pièce, sa réinterprétation "décorative", selon le mot de Nina Childress sous forme de signes avec 1060-Triangle/joues rouges (2020) où sont reconnaissables, le nez penché vers l'avant et les sourcils fournis de la jeune fille en bas à droite ; les sourcils hérissés de celle en bas à gauche; le nez pontu de celle en haut à droite et les grands yeux de celle en haut à gauche.
Et humour d'époque bienvenu : Phospho, barrière
Dans 1052-Sylvie tapisserie (2020) et 1053-Sylvie, la mèche 2020), Nina Childress revient au travers de l'emission du 3 octobre 1971, L'invité du dimanche, sur l'accident de Sylvie Vartan qui, pour cacher son visage tuméfié, lança la mode de la mèche sur le devant.
1017-Bad comédie française (2019) semble rendre évident la grosse tête de l'homme et le chagin de la femme de 1016-Comédie française (2019).
En entrant dans la pièce noire, le premier tableau qui fait face est 1048- Bush, bottes rouges (250 x 180, 2020), autre grande peinture en pied, comme 1028-garde-corps. Elle semble être sortie grandie de 1047-Bush,ongles rouges 2 (clown) (60 x 50 cm, 2020)
1069-Autoportrait clown phospho (2020) qui jouxte 1055-phospho, sale (2020) pourrait montrer la palette d'inspiration de Nina Childress, entre celle cherchée chez Bernard Buffet et sa série des clowns d'aller jusqu'aux rives de l'abstraction. Des cheveux entrent par ailleurs dans la composition des deux tableaux.
Autre jeu avec la lumière noire et les pigments phosphorescents, cette disposition dans une pièce où la lumière s'éteint toutes les 10 secondes de 1020-seldom (2019) laissant phosphorescent l'ancien cadre blanc du tableau mis dans un alignement en perspective avec 1021-Monochrome violet
1032-Bad brésiliens rend explicite le contenu sexuel latent de 1031-Brésiliens. Dans cette image, reprise probablement d'une émission télévisée de divertissement, les contours des personnages sont discrètement marqués d'un pigment fluorescent qui magnifie le caractère mal défini de l'image vidéo.
Jean-Luc Lacuve, le 31 mai 2021