4 sections compétitives : Compétition Internationale /// Compétition Française /// Compétition internationale Premiers Films /// Compétition internationale Courts métrages

ANDREA TONACCI : l’intégrale ; Rebelles à Los Angeles : un nouveau cinéma afro-américain / Hommage à Charles Burnett et rétrospective Hailé Gérima ; ING K – À l’œuvre ; Section thématique : Dé/montage(s); Hommage : Centenaire Jean Rouch.

Affiche du 39e festival du cinéma du réel
39 festival du Cinéma du réel 2017 du 24 mars au 2 avril

site officiel

Compétition internationale : 11 films. Le jury est composé de Tina Baz Legal, France-Liban (monteuse), Anne Georget, France (réalisatrice, présidente de la SCAM), Luciano Monteagudo, Argentine (critique)

Palmarès :

Grand Prix Cinéma du Réel : Maman Colonelle de Dieudo Hamadi (2017, République Démocratique du Congo)

Prix International de la SCAM et Prix des Bibliothèques et Prix de la Musique Originale : Dans l’intense maintenant de João Moreira Salles (2017, Brésil)

Prix de l'Institut français Louis Marcorelles et Prix des Jeunes – Cinéma du réel : Derniers jours à Shibati d’Hendrick Dusollier (2017, France)

Prix Joris Ivens / Cnap : ON THE EDGE OF LIFE (ALA HAFET ALHAYAT) de Yaser Kassab

Prix du Court métrage : NYO VWETA NAFTA d’Ico Costa

 

Les onze films en compétition.

A Yangtze landscape Xu Xin (Chine). 2h36.

Xu Xin, né au bord du fleuve Yangtsé, fait de ce cours d’eau un rail de travelling de plusieurs milliers de kilomètres. La douceur du voyage et la tonalité contemplative du noir et blanc sont d’emblée minées par un néon enjoignant sur un gratte-ciel du port de Shanghai : « Tu peux et dois obéir à la loi. » Surnommé sous Mao la Rivière Mère, le fleuve, à mesure que des cartons y épinglent des faits récents, se révèle synecdoque du pays. Des escales esquissent les portraits d’habitants esseulés

 

Exercices de mémoire Ejercicios de memoria de Paz Encina (2016 / Allemagne, Argentine, France, Paraguay, Qatar,1h10).

Le Paraguay, où Paz Encina a grandi jusqu’à ses 18 ans, a connu la plus longue dictature d’Amérique latine, de 1954 à 1989. Déjà en 1998, la cinéaste, dont le père était lui-même opposant au régime, avait entrepris de recueillir le témoignage de la veuve du dissident le plus célèbre du régime Stroessner, Agustín Goiburú, disparu en 1976. Ce n’est qu’en 2012, avec la maturité nécessaire à cet ambitieux « exercice de mémoire », qu’elle est revenue sur les lieux des exils successifs de la femme et des enfants du dirigeant du Movimiento Popular Colorado, le parti de résistance. « Et au milieu de cela l’enfance, ferment de tout. » Mêlant ses propres souvenirs d’enfance en voix off avec des témoignages rejoués, Encina tisse un canevas mémoriel riche et complexe qui ne se laisse jamais enfermer dans le passé historique. Son évocation de l’enfance et de son lien à la nature – forêt, rivière, rapport aux animaux, lenteur du temps qui passe dans la lumière de l’après-midi – invite à une réflexion sur la texture même du souvenir forgé à cet âge, la façon dont il s’attache parfois à un détail. Au début du film, une table dressée, comme désertée par une famille fugitive, semble attendre à jamais la fin du repas. Cette belle nature morte condense sans présence humaine la violence de l’exil, que des témoignages précis des Goiburú viennent corroborer. Mais son calme porte aussi l’étrange sérénité qui parcourt le film, alliant l’indifférence de la nature alentour à la suggestion d’une résilience enfantine. (Charlotte Garson)

Ghost Hunting de Raed Andoni (2017, France, Palestine, Qatar, Suisse, 1h34).

En 2009, dans Fix ME, Raed Andoni, atteint de migraines, filmait sa psychanalyse et laissait affleurer les causes de sa « prise de tête » : le conflit israélo-palestinien. Dans Istiyad ashbah, il imagine un dispositif pour faire émerger la parole de Palestiniens qui, comme lui et un quart de la population masculine, ont été détenus dans une prison israélienne. Acteurs, plombiers, maçons : les volontaires qui répondent à son annonce viennent préparer un film et avant tout construire son décor – la prison d’al-Maskobiya, ré-imaginée à partir de leurs souvenirs lacunaires puisqu’on leur y bandait les yeux. La construction donne à Andoni comme au petit groupe un « support » qui contourne la solennité du témoignage. Mais c’est le jeu de rôle et surtout l’inversion des rôles qui produisent de véritables moments de catharsis, comme lorsqu’un ancien prisonnier se laisse emporter par sa violence en jouant un interrogateur. Peu à peu, le cinéaste met aussi les hommes palestiniens devant l’impératif d’héroïsme qui les entrave implicitement. À mesure que les murs de la fausse prison s’élèvent, ceux du passé tombent et les participants évoquent leur vie amoureuse. Enfants et compagnes apparaissent même dans ce décor soudain plus vivant, remplaçant opportunément les fantômes exorcisés. (Charlotte Garson)

Luz Obscura de Susana de Sousa Dias (2017, Portugal, 1h16)

À partir de photos d’identité prises par la police politique portugaise pendant la dictature, Susana de Sousa Dias poursuit son travail commencé il y a quinze ans sur la possibilité de représenter une histoire refoulée, de rendre compte de tortures effacées. L’une des photos frappe tant elle sort du protocole judiciaire. Une mère tient son bébé sur les genoux. Son visage, de trois-quarts contrairement à la frontalité de rigueur, est flouté par le mouvement et à demi-caché par l’enfant. Ce punctum subjectif sur un document officiel contient la question centrale de ce film dont la bande-son est constituée des témoignages des proches d’un militant communiste assassiné : comment l’autoritarisme s’insinue-t-il jusque dans l’intimité d’une famille ? Les méthodes de la PIDE avaient la particularité de se fonder sur les valeurs salazaristes : la famille prévalant sur le citoyen dans l’organisation de la société, Alvaro, Rui et Isabel, les enfants d’Octavio Pato, étaient eux-mêmes photographiés comme prisonniers dans la cour ou au parloir. Fils de mères différentes, ils ne se rencontrent que tard dans leur enfance ; l’un ne « réalise que [s]on père existe » qu’à l’âge de 9 ans, l’autre n’a « jamais vu le bas de son corps » au parloir ; Isabel ne connaît sa mère qu’à l’adolescence. À mesure que d’autres figures émergent de l’ombre et que les archives d’État pallient ironiquement le manque de photos familiales, la cinéaste trouve une forme qui restitue au plus juste cette identité familiale généalogiquement, historiquement et physiquement fracturée. (Charlotte Garson)

Maman Colonelle de Dieudo Hamadi (2017, République Démocratique du Congo, 1h12)

La colonelle de police Honorine, cheffe de la brigade contre les violences sexuelles et la protection de l’enfance à Bukavu, s’apprête à faire ses adieux à une population de femmes et d’enfants, désemparée qu’elle soit mutée. À Kisangani, la maltraitance des enfants accusés par leurs parents de sorcellerie fait rage. Mais surtout, des femmes viennent témoigner d’exactions moins récentes. La ville a en effet été le théâtre en 2000 d’une « guerre des 6 jours » entre les armées ougandaise et rwandaise qui a coûté la vie à des milliers de civils et n’a jamais fait l’objet de procès officiels.

Martírio de Vincent Carelli (2016, Brésil, 2h42).

Quand en 1988, Vincent Carelli filmait au Mato Grosso do Sul la lutte des Guarani-Kaiowa pour la restitution de leurs terres, il ignorait que, vingt ans plus tard, la violence se serait aggravée et que les droits acquis seraient menacés sous la pression des lobbys de l’agrobusiness. De retour avec ses collaborateurs Ernesto et Tita, il fouille l’histoire coloniale. Les rares octogénaires qui ont survécu aux expulsions et aux meurtres sont la mémoire vive des vagues successives de persécutions.

 

Dans l’intense maintenant de João Moreira Salles (2017, Brésil, 2h07)

En mêlant des archives de Mai 68, des bandes amateur sur l’écrasement du Printemps de Prague la même année, et les images touristiques de sa propre mère en voyage en Chine l’année de la Révolution Culturelle, João Moreira Salles interroge la postérité des moments les plus intenses de l’histoire personnelle ou intime – comment vivre après leur fulgurante perfection ?

 

Paris est une fête - Un film en 18 vagues de Sylvain George (2017, France, 1h35).

Sylvain George traverse Paris en 2015 et 2016 avec un « mineur étranger isolé », selon la terminologie en vigueur. Ce splendide tourbillon en noir et blanc mêle les détails de monuments iconiques – statue équestre, obélisque ou grande roue – à l’existence dans les rues. « Aubervilliers : nos équipements améliorent votre cadre de vie » proclame un panneau municipal devant un groupe de sans-logis étrangers. Cette symphonie urbaine à la Dziga Vertov, rendue frénétique par l’état d’urgence en vigueur, ne choisit pas entre figuration et transfiguration du réel. Les fragments de choses vues s’interrompent par exemple pour faire entendre le récit succinct et déchirant de la traversée de la Méditerranée par le jeune Guinéen. L’ordonnancement du film en « 18 vagues » suggère des correspondances entre son histoire et la mémoire des deux garçons morts dans un transformateur à Clichy en 2005. Les événements, les hommes et les discours se juxtaposent, se heurtent et parfois s’entrelacent, révélant des liens de causalité. Le film revient en spirale place de la République, à la fois mausolée et champ de bataille dans les plans violents où des CRS piétinent les fleurs déposées en mémoire des victimes des attentats de 2015. Saisis dans plusieurs manifestations, slogans et gestes de révolte ne sont jamais réductibles à un contenu univoque. Le militantisme du Vigo d’À propos de Nice rejoint les cartons bleu-blanc-rouge du Godard des années soixante sans que ces fulgurances cinéphiles ne surplombent le réel. De vague en vague, le jeune Africain reparaît, racontant, fumant, slammant, attestant, comme le nom d'un café aperçu le suggère, que Paris trinque « à la Renaissance ». (Charlotte Garson)

Postcards from the Verge de Sebastian Mez (2017, Allemagne, 1h12).

Parti en Israël pour la première fois, Sebastian Mez a décidé d’y rester des semaines au lieu des quatre jours prévus tant les paysages lui évoquent des récits, l’encourageant à filmer. Les cinq chapitres du film, si le titre les désigne comme des cartes postales, sont tout sauf des chromos : à la lueur orange du prologue succède un noir et blanc très travaillé. La splendeur photographique du premier segment, « Au-delà des montagnes », est rapidement infléchie, comme chargée, par la présence massive d’un tank. Dans « Entre », le deuxième chapitre, le mur fait son apparition à mesure que le film s’approche de Jérusalem. Tendu entre la majesté paysagère de plans d’ensemble fixes et l’impureté des formats variés ou de la bande-son composite, Postcards from the Verge intègre de plus en plus à sa forme la division omniprésente : d’abord dans le récit d’un jeune Palestinien qui, repéré parce qu’il franchissait souvent les checkpoints, s’est vu proposer par les Israéliens de devenir informateur, puis par un détail, des douilles fichées dans le grillage d’un terrain où jouent des écoliers palestiniens. Pour finir, c’est le cadre cinématographique lui-même qui se scinde dans cette étude à la fois sensible et abstraite du conflit israélo-palestinien. (Charlotte Garson)

A Strange New Beauty de Shelly Silver (2017, États-Unis, 50')

Dans une luxueuse demeure entourée d’un jardin idyllique, nulle trace d’une présence humaine, même si une famille habite manifestement les lieux. Voix, sons et inscriptions en surimpression font sourdre une inquiétude dont l’origine ne cesse de se dérober. « Une maison peut sentir la douleur »... En jouant tantôt avec le dédoublement du cadre en vignettes sur fond noir, tantôt avec un sound design qui fait exister le hors-champ, Shelly Silver réintroduit de la mémoire dans cet espace, ne serait-ce que parce qu’une « maison est un subconscient... un corps... » Et si tout ce faste, ce confort, reposaient sur l’exploitation des autres ? Plusieurs voix off tiraillent le spectateur entre encouragement à l’épanouissement de soi et insistance d’une conscience qui ne saurait rester sourde au fracas du monde, aux « 7,5 milliards qui vivent sur cette terre ». Le film tire son « étrange beauté nouvelle », discrètement convulsive, de sa façon d’instiller dans ces intérieurs marmoréens une animalité de moins en moins facile à refouler. Les bois de cerf disposés dans un grand vase de pierre charrient le poids macabre de la chasse. Un passé rôde, « un loup à la porte », des cris, le souvenir de temps moins heureux où la guerre frappait au carreau. L’acuité des cadrages, focalisant notre attention sur un détail, métamorphose l’anodin en blessure – une statue sans bras, extirpée de son handicap de convention, porte la trace d’une vraie mutilation. De bribe en bribe, la sauvagerie – la nôtre – fait irrémédiablement irruption dans la civilisation, minant définitivement sa quiétude. (Charlotte Garson)

We the Workers de Huang Wenhai (2017, Chine, Hong Kong, 2h54)

De 2009 à 2015, Huang Wenhai suit le travail d’activistes et de juristes qui défendent non sans risques les droits des travailleurs dans plusieurs régions de Chine. Aussi endurant qu’eux, il alterne les moments publics avec les coulisses intimes dans les appartements de ceux qui, anciens ouvriers, sacrifient aujourd’hui leur vie familiale.

Vincent Carelli, le 24/03
les séances du 24/03
 
Quitter avec regret la cafet !
Quitter avec regret la cafet !
 
Salle 1 de Beaubourg
Salle 1 de Beaubourg
 
Cinéma 2 et petite salle
Régis Sauder
 
En compétition française
25/03
 
25/03
25/03
 
26/03
26/03
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