Un jeune professeur de biologie quitte Prague pour venir enseigner
au fin dont de la campagne tchèque. Un exil que personne ne s'explique,
pas plus ses proches restés à la capitale, que ses nouveaux
voisins, intrigués de voir ce jeune urbain débarquer loin
de tous ses repères.
Il dégote une petite chambre chez l'habitant, attisant rapidement
l'intérêt d'une fermière du coin alors que les regards
du jeune homme glissent, presque malgré lui, vers les formes
plus viriles du fils de 17 ans de cette dernière...
Interprété
avec justesse et sensibilité, Country Teacher aborde subtilement
les thèmes de la différence et de l'acceptation de soi.
Sans parti pris ni jugement, Bohdan Sláma confronte ses personnages
à leurs contradictions. Entre amour et amitié, ils tentent
d'oublier leur solitude.
Après Something Like Happiness, le réalisateur
continue son renouveau d'un cinéma tchèque trop peu présent
sur la scène internationale. Il s'accompagne de l'acteur phare
tchèque, Pavel Lika, déjà présent
dans ses deux premiers films.
Entretien (source : dossier de presse)
Quel est le point de départ de Country Teacher ?
Deux amis m'ont parlé de leurs histoires qui se ressemblaient
: l'un était tombé amoureux d'un homme hétérosexuel
; l'autre, une femme, était amoureuse d'un homme gay. Tous deux
souffraient d'avoir été rejetés. C'est de là
qu'est née la situation de base du film : une femme désespérément
amoureuse d'un homme, lui-même désespérément
amoureux du fils de cette femme. Comme une chaîne d'amours non
partagés, non réciproques. Il y a six ans, j'avais quitté
Prague pour un petit village à une centaine de kilomètres
de la capitale. La beauté des paysages et la qualité des
rencontres que j'y ai faites m'avaient donné envie de faire un
film dans cette région : il m'a semblé évident
que Country Teacher devait se dérouler là. Nous avons
besoin alternativement de ville et de campagne. C'est comme le yin et
le yang. Il faut les deux pour se sentir entier.
La nature tient une place importante dans le film, à la fois
par la beauté de la lumière et des décors et par
la place symbolique que prennent les animaux. Comment définiriez-vous
son rôle ?
Il fallait que l'image soit la plus belle, la plus harmonieuse possible,
pour créer un contrepoint avec la situation tragique dans laquelle
se trouvent les personnages. Quels que soient nos problèmes,
la beauté de la création nous entoure et nous aide à
développer la conscience de soi. Pour inscrire les personnages
dans cet environnement, j'ai essayé de privilégier les
plans-séquences : ils permettent à la situation d'accumuler
de l'énergie et de l'émotion. Cela ne rend pas le travail
plus facile ! La différence entre les hommes et les animaux est
minime. Pendant trois ans, j'ai été gardien de chevaux.
En les observant, j'avais remarqué à quel point il était
important pour chaque animal de faire partie du troupeau, de la communauté.
L'homme est pareil. Il a besoin des autres, parce qu'il ne trouve le
bonheur qu'en fonction de sa position vis-à-vis d'autrui.
L'instituteur fait cours sur les escargots, qui portent sur eux
l'histoire de leur existence, et sur les abeilles, qui renoncent à
leur sexualité. Pouvez-vous préciser le rôle métaphorique
de ces espèces dans le récit ?
Je laisserai à chaque spectateur le soin d'interpréter
les leçons de l'instituteur ! Ce qui me semble le plus important,
c'est quand il explique à ses élèves que chaque
créature a un rôle et que remplir ce rôle est le
don le plus précieux que chaque individu puisse faire à
la communauté.
Le film montre de manière récurrente la solitude des
personnages. Conclut-il à l'impossibilité de l'amour ?
D'abord, je veux préciser que la quête d'amour des personnages
n'a au fond rien à voir avec leur orientation sexuelle. Elle
est la même pour tous. Dans la vie, le grand amour ne se présente
pas toujours. L'amour peut prendre des formes très diverses,
aussi diverses que le sont les individus, et chaque relation a une valeur
en soi. Il est parfois difficile de l'évaluer, parce que cela
nous force à accepter des choses que l'on comprend mal, à
pardonner même quand nous nous sentons trahis. Nos personnages
ne trouvent peut-être pas un grand amour romantique, mais ils
peuvent trouver une amitié plus profonde, qui les renforce, qui
les aide à mûrir et à pardonner. La capacité
à pardonner est l'une des plus grandes facultés de l'homme.
Elle peut donner un sens à la vie.
La scène du " viol " était-elle centrale
dans le scénario ?
Centrale, je ne sais pas. Elle n'existe pas sans ce qui l'a précédé.
Et je ne crois pas que l'instituteur attende quoi que ce soit en retour
du jeune Lada, c'est un geste impulsif. Je savais que ce serait une
scène délicate à tourner, il fallait qu'elle soit
tendre et cruelle à la fois. Trop crue, ou maladroite, elle pouvait
déstabiliser le film tout entier.
Pouvez-vous nous parler des acteurs que vous avez choisis ?
Pavel Lika, qui joue l'instituteur, est très connu en République
Tchèque. Il a été l'interprète principal
de mes deux précédents films, mais je n'étais pas
sûr qu'il soit le choix idéal pour celui-ci. Mais il est
devenu le personnage tel que je l'imaginais, de façon plus émotionnelle
que rationnelle : il s'est laissé absorber par son rôle,
a gardé une concentration de tous les instants, et a donné
au personnage la vérité et la profondeur que j'espérais.
Zuzana Bydovská, qui joue la mère de Lada, est une
célèbre actrice de théâtre, qui n'avait pas
travaillé au cinéma depuis longtemps. J'ai écrit
le personnage pour elle. Ladislav edivý, qui joue Lada,
n'est pas un acteur professionnel. Nous avons rencontré plus
de 2000 garçons de son âge, et c'est lui qui me paraissait
convenir le mieux. Enfin Tereza Voríková, qui joue
sa petite amie, est un des espoirs du cinéma tchèque :
nous avons eu la chance de la choisir avant qu'elle ne devienne connue.
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