Sélectionnés
au Festival de Cannes à la Quinzaine des Réalisateurs, pour les uns,
et au Festival de Berlin pour les autres, ces films empruntant au cinéma
pink et à l'esthétique Nouvelle Vague ont marqué la fin des années 60
par leur propos violemment anarchistes et politiquement irrécupérables.
A la fin
des années 60, au Japon. Deux policiers mettent sur écoute
un étudiant soupçonné d'activisme. Mais celui-ci
semble se complaire dans l'oisiveté et les plaisirs de la chair,
ne quittant son appartement et ses compagnes qu'en de très rares
occasions...
L'érotisme
et le filmage des corps se fait froid et clinique, comme pour mieux
coller au comportement de son personnage principal, révolutionnaire
repenti se réfugiant dans un mode de vie qu'il fustigeait autrefois.
Les plans longs, sévères, austères, sans mouvements
de caméra inutiles, filment l'ennui et la médiocrité
du héros. En renonçant à ses rêves d'antan,
en acceptant le vieux monde qu'il rêvait naguère de dynamiter,
il en retrouve les servitudes et les tares. Ni un pleutre, ni un traître
mais un bourgeois profondément réactionnaire, sale type,
sale con, parfait macho, il trouve dans les pulsions de viol et d'asservissement
un dérivatif à ses pulsions activistes.
Alors que
des affrontements ont lieu dans les rues de Tokyo entre manifestants
et forces de l'ordre, un jeune activiste se dispute violemment avec
son frère policier. En tentant de s'interposer, la femme de ce
dernier tue accidentellement son mari.. Aussitôt elle perd la tête,
ressasse son remords et veut mourir elle aussi avant de succomber à
son désir pour son beau-frère avec qui elle est en cavale.
L'errance de ces deux amants sur les routes d'un Japon qui ne peut que
rejeter leur relation, se fait au travers de paysages les plus singuliers
du pays symbole de leur quête de pureté et de pardon...
Bien
que prenant toujours pied dans un contexte révolutionnaire, Koji
Wakamatsu laisse, le temps d'un flamboyant mélodrame, ses obsessions
contestataires pour s'attarder sur le récit d'une passion charnelle,
née dans le sang. Récit d'une passion dévorée
par la culpabilité où l'exaltation des corps est absolue,
c'est un film volcanique comme le désir et froid comme la mort avec
un assouvissement total et destructeur du désir physique.
Recherchés
par la police, un groupe d'étudiants révolutionnaires trouve refuge
dans l'appartement d'un jeune inconnu providentiel. Condamnés à vivre
entre quatre murs le temps que les choses se tassent, ils passent leur
temps à fumer, boire et faire l'amour
Présenté
à la Quinzaine des Réalisateurs lors du festival de Cannes en 1971,
Sex Jack montre les limites de l'action collective exacerbées par la
logique de fuite et d'attentisme pour laquelle ont opté les membres
d'un mouvement Contestataire, Wakamatsu semble suggérer que seule la
prise de conscience individuelle, affranchie de toutes formes de dépendance,
peut mener à la révolution
Une action
violente ayant tué la plupart des membres, une faction armée d'un groupe
révolutionnaire puissant dont il ne reste que quelques têtes dont le
chef, est victime d'un conflit interne. Considérée comme perdue par
le groupe révolutionnaire, les bénéfices de cette action sont récupérés
par une autre faction bien active. Les victimes sont laissées à leur
sort, et arrivent à comprendre que cette révolution voulue par le groupe
est une illusion. Ils décident alors de se lancer dans des attentats
individuels, reniant fermement les valeurs des révolutionnaires.
Wakamatsu est un anarchiste qui ne croit pas aux groupuscules révolutionnaires
porteurs d'une violence pire que l'ancienne, groupes toujours infiltrés.
Ce film prophétique annonce les attentats de Lod, de Munich de
Bologne. Il commence comme un film de Melville avec chanson, attente,
suspens mais jamais il ne fait de concession à la vie quotidienne. Jamais
on en verra les personnages ni manger, ni dormir, ni échanger de l'argent
mais toujours dans des comportements radicaux ayant partie liée à la
révolte, la violence, le sexe, la politique, tout ce qui pousse les
hommes à changer de vie. Dans ce concentré de pulsions antisociales
résonne la parole finale de l'anarchiste : " Le faux futur nous allons
le faire voler en éclat, même si on ne survit pas jusqu'au lendemain,
on se battra".

|