(Il Ginocchio di Artemide). Avec : Dario Marconcini, Andrea Bacci. 0h26.
Endymion : Écoute, passant. Comme à un étranger je peux te dire ces choses. Ne t'effraie pas de mes yeux de fou. Tu vois ce mont ? C'est le Latmos. Je l'ai gravi tant de fois dans la nuit, quand il faisait plus noir, et j'ai attendu l'aube entre ses hêtres. Pourtant il me semble ne l'avoir jamais touché.
L'étranger : Qui peut dire avoir jamais touché ce près de quoi il passe ?
Endymion : Je pense parfois que nous sommes comme le vent qui court impalpable. Ou comme les rêves de celui qui dort. Tu aimes, étranger, dormir le jour ?
Endymion, humblement convaincu de son irrémédiable solitude va ainsi appeler le sourire de la bête sauvage qu'il sait sa seule compagne. Cette bête qui pour revenir lui ordonne de ne plus jamais se réveiller est une partie de la déesse nature, Artémis Endymion aspire à lui toucher le genou. L'étranger, un dieu voyageur, Hermès sans doute, lui laisse entendre que son souhait sera exaucé.
Le film commence par quatre minutes de noir sur Le chant de la terre de Gustav Mahler, interprété par Kathleen Ferrier. Réalisé en juin 2007 par Jean-Marie Straub pour la première fois sans Danièle Huillet, décédée en 2006, cette introduction musicale est une sorte de tombeau qui lui est dédié.
Cette adaptation de La bête sauvage, deuxième conversation des Dialogues avec Leuco de Cesare Pavese (1947), prolonge De la nuée à la résistance et Ces rencontres avec eux adaptés des mêmes dialogues. Le choix de celui-ci avait été décidé avec Danielle Huillet. Il est d'autant plus important que Pavese l'avait désigné comme une sorte d'autoportrait avant de se suicider en disant : "Si vous voulez savoir qui je suis, lisez La Belva".
Dans la mythologie Endymion est l'amant de Séléné dont il aura cinquante filles. Séléné obtient pour lui qu'il conserve sa beauté dans un sommeil éternel dans une grotte du mont Latmos en Carie. Séléné était parfois confondu avec Artémis. C'est elle qu'évoque le texte de Pavese.
Le film est dédié à Barbara et la féminité y est très présente. Le choix du titre en est une indication évidente. Mais il ne fait que signaler ce qui est déjà présent dans le texte de Pavese qui évoque féminité et jupes courtes.
Le film se clôt par cinq panoramiques. Les quatre premiers aboutissent à un monument élevé dans les années 90 par le maire de Buti à la mémoire d'italiens qui avaient d'abord collaboré puis étaient devenus partisans avant d'être exécutés juste avant la fin de la guerre.
Le dernier plan finit par cadrer un petit chemin sinueux qui monte dans la forêt.