(1887-1986)
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Georgia O'Keeffe est l'une de ces figures altières et conquérantes qui ont forgé la mythologie américaine. Dès la fin des années 1910, elle est au cœur du premier art moderne aux États-Unis, dont elle contribue à l'émergence, puis à l'affirmation. Sa peinture s'inscrit très tôt dans la tradition du premier paysagisme américain, développant un sentiment fusionnel avec la nature dans la lignée du romantisme. O'Keeffe est la première femme à s'imposer auprès des critiques, des collectionneurs et des musées d'art moderne. Une consécration pour laquelle sa personnalité compte presqu'autant que son œuvre. Après des années d'immersion au sein de l'avant-garde new-yorkaise, il lui faut l'audace des « pionniers » pour s'installer au Nouveau-Mexique et affronter la solitude et la nature sauvage. Au début des années 1950, le « minimalisme » de ses tableaux lui vaut la reconnaissance d'une nouvelle génération d'artistes américains. Face à l'objectif des plus importants photographes de l'époque, elle cultive une image d'amazone, de Calamity Jane moderne, de sage orientale et prend place dans la légende américaine.
Series I, No. 4 | 1918 | Munich, Musée Lenbachhaus |
Series I, No. 8 | 1919 | Munich, Musée Lenbachhaus |
Series I White and Blue Flower Shapes | 1919 | Santa Fe, Georgia O’Keeffe Museum |
Inside Red Canna | 1919 | Collection particulière |
Skunk cabbage | 1922 | Santa Fe, Georgia O’Keeffe Museum |
Red, Yellow and Black Streak | 1924 | Paris, MNAM |
The Shelton with Sunspots, N.Y. | 1926 | The Art Institute of Chicago |
Palourde et moule | 1926 | Santa Fe, Georgia O’Keeffe Museum |
Abstraction white | 1927 | Santa Fe, Georgia O’Keeffe Museum |
Ritz tower, night | 1928 | Santa Fe, Georgia O’Keeffe Museum |
Grey Blue and Black-Pink Circle | 1929 | Dallas, Dallas museum of art |
Black Mesa landscape, New Mexico | 1930 | Santa Fe, Georgia O’Keeffe Museum |
Jimson Weed / White Flower No.1 | 1932 | Bentonville, Crystal Bridges Museum |
Ram's Head, White Hollyhock-Hills | 1935 | New York, Brooklyn museum |
My Front Yard, Summer | 1941 | Santa Fe, Georgia O’Keeffe Museum |
Black Hills with Cedar | 1942 | Smithsonian Institution, Washington, D.C. |
Pelvis with the distance | 1943 | Newfields, Indianapolis Museum of Art |
Black Door with Red | 1954 | Norfolk, Chrysler Museum of Art |
Sky Above Clouds - Yellow Horizon and Clouds | 1977 | Santa Fe, Georgia O’Keeffe Museum |
Après une enfance passée dans une ferme du Wisconsin, Georgia O’Keeffe vient à New York, en 1907, suivre les cours de l’Art Students League. Elle s’imprègne des idées de l’avant-garde en fréquentant la galerie 291, dirigée par le photographe Alfred Stieglitz, où elle découvre Rodin, Braque, Picasso, Matisse… À partir de 1911, elle enseigne les arts plastiques et le dessin publicitaire dans différents États, dont la Caroline-du-Sud et le Texas. Elle s’intéresse aux pastels organiques de Arthur Dove et explore un répertoire de formes géométriques et organiques, dans lequel elle exprime son « monde intérieur ». En octobre 1915, elle réalise une série de dessins abstraits aux motifs organiques qui rompt radicalement avec sa formation classique.
En 1916, son amie Anita Pollitzer fait découvrir ses aquarelles à Alfred Stieglitz. Celui-ci présente alors une dizaine de ses œuvres dans une exposition collective, puis organise, l’année suivante, sa première exposition personnelle à la galerie 291.
En 1918, l’artiste s’installe à New York, dont elle peindra des vues architecturales impressionnantes, pour vivre avec Stieglitz, qu’elle épouse en 1924. Pendant les mois d’été, le couple se retrouve dans la maison familiale de Stieglitz, sur les rives du lac George dans les monts Adirondaks. Fascinée par la splendeur des couchers de soleil sur le lac, Georgia O’Keeffe peint là une grande partie de ses tableaux de sla érie des « Paysages du lac George ». Ses paysages ne transposent pas une réalité ; ce sont des projections mentales dont les couleurs sont fondées sur une gamme de sensations chromatiques. Cependant, on y retrouve une intense notion d’espace, où cieux, terre et eau se confondent dans la flamboyance des orangés, des rouges et des violets, peints selon une technique fluide mais « précisionniste », les motifs étant toujours ramenés à leurs formes essentielles. Parallèlement à cette série d’œuvres abstraites, Georgia O’Keeffe concentre sa création sur des natures mortes de fleurs, célèbres pour leur cadrage photographique et monumental. Son iconographie de fleurs énormes, de crânes et de paysages désertiques du Nouveau-Mexique, où elle s’installe après la mort de Stieglitz, en 1946, reflète son sentiment cosmique et intime de la nature.
Georgia O'Keeffe a toujours cherché à incarner l'essence de la nature et les rythmes au-delà du visible, dans une quête qu'elle explique ainsi : « Ce sont des lignes et des couleurs mises ensemble pour qu'elles disent quelque chose. L'abstraction est souvent la forme la plus apte à représenter cette part d'intangibilité en moi que seule la peinture permet d'élucider. »
« Les hommes aimaient me décrire comme la meilleure peintre femme. Je pense que je suis l'une des meilleures peintres » disait-elle, alors qu'en 1945 le critique Clement Greenberg écrivait : « Son art à très peu de valeur intrinsèque. »