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Julie (en 12 chapitres)

2021

Festival de Cannes 2021 (Verdens verste menneske). Avec : Renate Reinsve (Julie), Anders Danielsen Lie (Aksel), Maria Grazia Di Meo (Sunniva), Herbert Nordrum (Eivind), Hans Olav Brenner (Ole Magnus), Lasse Gretland (Kristoffer). 2h08.

Prologue. Julie, bientôt 30 ans, espère beaucoup de ses études de médecine qui lui permettront de mettre en œuvre ses brillantes études passées. Elle découvre toutefois que la chirurgie "c'est du travail manuel" et s'oriente vers la psychologie. L'un de ses professeurs devient son amant avant qu’elle s'aperçoive que c'est photographe qu'elle veut être. Julie prend pour nouvel amant un photographe plutôt déjanté. Dans une soirée, Julie rencontre Aksel, 44 ans, un auteur de bandes-dessinées en passe de devenir célèbre avec son personnage du Lynx. La séduction est immédiate. Pourtant Aksel préfère rompre immédiatement estimant qu’ils n'ont pas les mêmes projets. Repoussée, Julie tombe sur le coup amoureuse d'Aksel et emménage chez lui.

Chapitre 1 : Les autres. Julie et Aksel sont invités pour une semaine de vacances chez les amis de ce dernier. Julie se sent en décalage parmi ces couples installés. Elle refuse toujours d'avoir un enfant comme le veut Aksel.

Chapitre 2 : Infidélité. Aksel est fêté pour la sortie de son dernier album alors qu'il a abandonné le personnage du Linx. Alors que la soirée s'éternise, Julie rentre seule et se faufile dans une soirée de mariage où elle flirte avec Eivind. L'un et l'autre se livrent beaucoup mais refusent d'être infidèles.

Chapitre 3 : La fellation à l’ère #metoo. Julie écrit un court texte sur le paradoxe d'aimer être baisée dans la bouche à l’ère #metoo et reprend sa confidence faite à Eivind d'aimer une queue un peu molle afin d’avoir la maitrise pour la rendre plus ferme. Aksel l'encourage à publier son texte sur un journal en ligne. Le texte recueille vite d'abondants commentaires élogieux. Aksel en fait la promotion aux mère et grand-mère de Julie réunies pour son anniversaire. Le père de Julie est absent.

Chapitre 4 : Une famille à soi. La visite chez le père de Julie s'avère catastrophique. Il lui offre comme cadeau le même vêtement de sport que celui de sa belle-fille et donne des excuses dérisoires de son absence à l'anniversaire.

Chapitre 5 : Une question de timing. Eivind rencontre Julie dans sa librairie. il est en compagnie de sa femme, Sunniva, adepte du yoga vert. Il revient lui dire qu’il ne pense qu'à elle. Le matin, Julie s'aperçoit qu'elle n'aime plus Aksel. Le temps semble se figer et elle court voir Eivind. un regard suffit à l'assurer de ce nouvel amour et elle retourne annoncer à Aksel qu'elle veut le quitter. La séparation blesse celui-ci.

Chapitre 6 : Le plateau de Finnmark. Eivind et Sunniva campent sur le plateau de Finnmark. Le matin, Sunniva s'approche d'un renne et pleure et le caressant. C'est une histoire qu'Evind aimait raconter avant sa rencontre avec Julie.

Chapitre 7 : Un nouveau chapitre. Eivind et Julie emménagent ensemble.

Chapitre 8 : Le cirque narcissique de Julie. Une expérience de champignons hallucinogènes s'avère éprouvante.

Chapitre 9 : Le Lynx bousille Noël. Julie voit Aksel passer à la télévision où il est pris à partie par une féministe. Ses réponses maladroites et assurées sur un art pulsionnel dégagé de toute responsabilité sont d'un autre âge.

Chapitre 10 : Le malaise dans la culture. Julie se découvre enceinte. Elle apprend d’Ole Magnus qu’Aksel est atteint d’un cancer du pancréas incurable.

Chapitre 11 : Positif. Julie voit Aksel. Ils  se remémorent les jours heureux et leurs discussions d'avant. Julie ne sait pas si elle doit garder son enfant. Aksel lui affirme pourtant savoir qu’elle sera une bonne mère.

Chapitre 12 : Tout à une fin. Julie en prenant sa douche, constate qu'elle a fait une fausse couche. Elle quitte Eivind dont elle n'a pas supporté le jugement creux sur un brouillon de texte trouvé dans la poubelle.

Epilogue. Julie est photographe sur un tournage. Elle conseille une actrice débutante pour sa séance de photo. Elle aperçoit Eivind qui est retourné avec sa femme avec laquelle il a eu un enfant. Julie rentre chez elle, seule. Sur son ordinateur, dans son appartement lumineux, elle travaille ses photos.

Douze chapitres pour Julie comme autant de manières de pouvoir repartir à zéro ; de détruire pour pouvoir créer à nouveau. Comme rarement, la séparation n'a été ausculté avec autant d'âpreté, de regrets assumés, de beautés reconnues mais devant être abandonnées pour renaître. Ses séparations amoureuses permettent à Julie de trouver à nouveau des moments de grâce où tout devient possible. Joachim Trier fait ainsi scintiller en plus jeune et plus moderne les scènes de la vie conjugale (Ingmar Bergman, 1972) tout en assumant l'épiphanie de l'adolescence devant un monde nouveau telle que vue par les ralentis de Gus van Sant dans Elephant. Ce sont ici les arrêts devant les paysages urbains, à l'aube ou au crépuscule, où Julie semble assumer une vie pleinement au présent parmi ceux avec qui elle choisit de vivre.

Julie a des regrets de n'avoir pas pu vivre pleinement son amour avec l'âme sœur qu'était Aksel. Mais continuer sans amour aurait signifié sacrifier sa liberté, sa vitalité à toujours pouvoir repartir. La rupture avec le père, renfermé et pas aimant, est plus longue à se dessiner mais est aussi nette que celle de rompre avec la lignée de ses aïeules qui ont toutes subi une palanquée d'enfants.

Le chapitrage agit comme un effet de distanciation. Il perturbe le déroulé romanesque mais permet d'être sensible à la volonté d'ausculter les rouages de l'amour, de la vitalité de l'être, de la fidélité à soi-même qui, toujours, demandent à être toujours remis en jeu.

Jean-Luc Lacuve, le 15 octobre 2021.

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