Jeudi soir . Il fait nuit, Akira nage dans la piscine du lycée quand cinq filles, menées par Yasuko, arrivent et dansent sur la musique à fond. Les filles viennent l’observer et Akira ne sait que faire. Plus tard, Yasuko part chercher du secours quand elle croise Mikami et Ken qui font leur footing du soir et reviennent avec elle vers la piscine. Mikami fait du bouche à bouche à Akira, inconscient. Puis c’est le professeur Umemiya qui, ayant aussi été appelé au secours, constate que Akira a repris ses esprits. Akira raconte que les filles s’en sont d’abord prises à son maillot de bain avant de presque l’étrangler avec le cordon de la ligne d’eau.
Vendredi . Mikami vient chercher Rie au pied de son immeuble pour aller au collège. Elle s'excuse pour la veille de s'être laissé entraîner par Michiko et Yasuko. En classe, le professeur Umemiya a bien du mal à expliquer le théorème de Pythagore, Akira fait le clown avec des crayons dans le nez alors que Ken observe Michiko avec plus d’attention qu'il ne le faudrait. Sur la route, s’approchent de l’ecole une femme que tente de retenir sa fille alors qu'un homme à l’arrière les accompagne. C’est la mère de Junko qui vient faire un scandale dans la classe de Umemiya lui demandant quand il compte épouser sa fille, vu qu'il vit à ses crochets depuis plus d'un an et qu'elle aurait dépensé plus d'un million de yens pour lui. Son frère qui l'accompagne ainsi que Umemiya et le proviseur parviennent à la faire sortir de la classe et trouver un lieu pour discuter au calme.
c’est le midi, les professeurs sont partis déjeuner et ne reviennent pas. Mikami et Rie s’en vont. Trois filles discutent sur le balcon de l'incident, Yasuko, Midori et Yuri, angoissée à l'idée du décès prochain de sa grand-mère.
Au soleil couchant, Ken exécute un étrange ballet d'entrées et sorties répétées de chez lui.
Le soir, Umemiya reproche à Junko de ne pas avoir dit à sa mère que le million de yens c’était pour que s’en aille son ancien amant. Mais il reconnaît qu’il n’aurait pas dû la faire attendre pour l’épouser.
Chez les Mikami, celui-ci interroge son grand frère. Peut-on transcender sa propre espèce ? On dit que ce n’est que par la mort que l’on triomphe de son espèce. Les deux discutent alors de la place de l’individu par rapport à la société : qui est la poule et qui est l'œuf ? Rie revient de son achat de café en pleine conversation. Mikami dit, qu'après sa mort, il aimerait se réincarner en bouc et Rie choisit un oiseau des mers. Mikami part dans la nuit rejoindre Ken pour leur footing du soir. Mais c’est sur une chafaufade au-dessus de la misérable cabane de ken que celui-ci l’attend avec Akira. Ken raconte que Akira à vu Yasuko et Yuri s'embrasser en demandant instamment à celui-ci de ne pas en parler. Les garçons s'interrogent sur les relations lesbiennes; Ken assurant que c’est « le faire avec le doigt ».
Akira dit aimer Michiko. A Ken auquel on demande si lui aussi aime Michiko, se souvient : en cours de chimie il lui avait versé de l’acide dans le cou lui laissant une grande brûlure dans le dos. Elle s'était alors jetée dans les bars de Mikami. Ken en est désolé alors que son ami a déjà Rie comme petite amie. Mais Mikami réfute être avec elle mais aimer Kawai Naoko.
Chez elle, Rie range des petites cuillères tordues dans le bac à glace en pensant à la mort qui transcende l'espèce.
Samedi. Mikami vient chercher Rie chez elle. Mais celle-ci n’est pas réveillée et Mikami préfère partir seul. Rie s’en désespère mais hésite à s'habiller, va se plaindre de ne pas avoir été réveillée par sa mère dont elle découvre qu'elle a découché. Rie se déshabille dans le lit de sa mère et se masturbe en pensant à elle.
Yasuko, Midori et Yuri décident de sécher le cours de math. Michiko vient dire à Mikami qu'elle compte demander des comptes à Umemiya sur le scandale de la veille
10h30. Rie arrive en courant à l’ecole mais s’assoie devant l'entrée comme incapable d’y entrer. Le professeur arrive enfin, pretextant avoir aidé une vieille femme voulant se rendre à l’hopital ;
Michiko interrompt le cours d'Umemiya pour lui demander des comptes sur le scandale de la veille. Cela dégénère en bagarre générale sauf pour Mikami qui reste à l'écart observant les affrontements depuis son bureau. Akira s'approche de la fenêtre et voit la pluie tomber. Rie franchit les grilles du collège et s'enfuit sous la pluie violente. C'est le début du typhon et les élèves sont priés de rentrer chez eux.
16h20. Rie est devant Harajuku, station de métro dans l'arrondissement de Shibuya à Tokyo. Umemiya rentre chez lui en vélo. Ken regarde Michiko, attendant le retour d'Umemiya. S'installant derrière elle, assoupie, il prononce d'étranges paroles "Bienvenue à la maison. Bonjour, je suis rentré". Michiko a peur de lui mais reste bloquée derrière les portes désormais verrouillées. Elle est poursuivie de plus en plus violemment par Ken qui défonce une porte à coups de pied et la retrouve cachée derrière un bureau avant de lui déchirer ses vêtements. En voyant son dos nu qu'il avait balafré, il s’arrête et crie de désespoir. Mikami, attiré par le bruit, les surprend en train de pleurer au sol.
A Tokyo, Rie se fait offrir une robe rouge par un étudiant.
Michiko pardonne à Ken. Yasuko, Midori et Yuri reviennent du local théatre avec habits et perruques et ne veulent pas rentrer chez elles.
18h30. Sous une pluie violente, Rie revient avec l'étudiant, Kobayashi, dans le petit appartement de ce dernier. Il lui propose de se changer et lui prépare le café.
Mikami voudrait que Yasuko, Midori et Yuri rentrent chez elles. Michiko se moque d'inquiéter ses parents
Rie se dit angoissée d'une vie future où elle serait enfermée. Quand Kobayashi tente de se rapprocher d'elle, eleldemande à partir. Il voudrait qu'elle reste pour le dimanche mais Rie refuse tout en le remerciant.
Dans le bureau des professeurs où les collégiens ont désormais trouvé refuge, Mikami s'inquiète de l'absence de Rie après avoir téléphoné chez elle. Il téléphone à Umemiya lui déversant au passage sa haine devant sa vie étroite et conformiste à laquelle il veut échapper. Umemiya, réconcilié avec sa belle-mère et son oncle, n’y fait pas attention, saoul et en pleine séance de Karaoké
Dans le gymnase, les six collégiens dansent. Rie arrivée à la gare, apprend que la ligne Shinetsu pour rentrer chez elle est hors de service. Il est 22h49.
Au collège, une accalmie incite les six jeunes à continuer de danser dehors. Ils chantent ensemble "si demain il fait beau..". A Tokyo, Rie rencontre un couple affublé de sacs plastiques qui joue de l’ocarina. Elle s'enfuit sous la pluie, tombe et, trempée, chante "Si demain il fait beau..."
Les six jeunes tentent de dormir sauf Mikami qui installe un échafaudage de tables et de chaises devant la fenêtre. Au matin du dimanche, alors que le typhon s'est éloigné, il réveille les cinq autres et, prétextant qu'il faut pour une belle vie se donner auparavant une belle mort, se jette par la fenêtre. Les autres le retrouvent la tête dans la boue, les pieds bougeant un peu à la surface.
Lundi. Rie revient par le train et croise Akira. Ils vont ensemble vers l’école, fermée ce jour mais comptent profiter de la piscine. Pour Rie, sensible à la nouvelle maturité qu'elle peroit chez son camarade, les mares de boue qui réfléchissent le soleil lui font penser au pavillon d'or.
Typhoon club retrace durant cinq jours, du jeudi soir au lundi matin, le parcours de huit adolescents d’une même classe de dernière année de collège de la banlieu de Tokyo ; trois garçons, (Mikami, le studieux ; Ken, l’inquiétant; Akira, le bout en train) et cinq filles (Rie, l’amie de Mikami ; Yasuko, la cheffe de bande, Michiko, la jolie; Midori, la timide à lunettes ; Yuri, angoissée de perdre sa grand-mère). Six d’entre eux seront enfermés du samedi soir au dimanche matin dans leur collège durant le passage du typhon alors que Rie fuit à Tokyo et qu'Akira rentre chez lui.
Somai construit ce drame de l'adolescence en forme d'une succession de blocs de séquences, alternativement étouffantes ou d'une forte vitalité mais sans résolution dramatique. Par ses plan-séquences, il cerne au plus près l'étouffement d'une jeunesse corsetée par la société japonaise et dont les pulsions sont aussi violentes que le typhon qui les entoure.
Le plan-séquence figure majeure de l'épuisement
Somai incarne la difficulté à vivre des adolescents par de longs plans-séquences. Les plus notables sont ceux du cours de mathématiques du vendredi et la montée de l'échafaudage conduisant au suicide de Mikami le dimanche.
Le premier saisit les toits du collège avant de revenir par un travelling arrière vers le professeur Umemiya qui a bien du mal à expliquer le théorème de Pythagore. La caméra panote alors vers la droite pour saisir Akira qui fait le clown avec des crayons dans le nez alors que Ken observe Michiko avec plus d’attention qu'il ne le faudrait. Alors qu'Akira fait tomber les crayons en excès de son nez et se lève, Umemiya rentre dans le champ par la gauche et vient réprimander les élèves.
Le plan-sequnce du dimanche matin, où Mikami monte son échafaudage de chaises, s'apparente à un plan long : 4'40 pour montrer sa détermination à préparer son suicide. Commencée avec le vent strident du typhon, la séquence bascule dans le silence le plus complet sans même le bruit des heurts des tables construisant l'achaffaude. Mikami est seul au monde dans sa détermination mortifère.
Cette résolution finale vient après une longue série de scènes sans échappatoire pour les adolescents. Malgré leur énergie, rien ne semble leur permettre d'échapper à la prison sociale de l'âge adulte, celle promise par le professeur Umemiya à Mikami lui prédisant la même vie que lui dans quinze ans ou à l'étouffement que déclare redouter Akira chez le jeune Kobayashi.
Dès lors l'utilisation du champ contre-champ, qui dramatise artificiellement une séquence en introduisant un duel avec résolution en fin de séquence, est proscrit. Sans être aussi visibles que les deux plans-séquences cités, toutes les séquences en classe recourent au plan-séquence, celle de Mikami et Rye, le vendredi, ou la bataille rangée le samedi après l'intervention de Michiko réclamant des comptes au professeur Umemiya.
Le refus d'une résolution dramatique
Le refus de la résolution dramatique de la séquence autrement que par un épuisement des forces s'incarne aussi dans la longue séquence de la poursuite de Michiko par Ken. Celui-ci ne tente pas tant de la violer que de trouver avec elle le lieu d'une vie de couple ou de famille qu'il avait répété jusqu'à l'épuisement en rentrant dans la cabane où il habite avec son père, proférant un inlassable, "Bonjour, je suis rentré. Bienvenue à la maison. " Ken espère avec Michiko la vie de famille qui lui manque. Ses coups répétés contre la porte sont la traduction physique de cette obsession. La decouverte du dos brûlé de Michiko interrompt la mécanique de l'agression sexuelle. Ken constate sa cruauté passée, incompatible avec la vie rêvée qu'il souhaite avec Michiko.
Autre façon de refuser la dramatisation, sont les dangers qui menacent Rie dans sa fuite à Tokyo; Son imprudence à suivre dans sa chambre un inconnu qui lui offert une robe devient pour les spectateurs encore plus forte avec la découverte des armes et des photos militaires qui décorent l'appartement de Kobayashi. Enfin, sous la pluie, épuisée et tombée à terre, Rie s'accroche à un policier en plastique alors qu'une figure masculine s'éloigne alors prudemment à l'arrière-plan.
Rie se trouve en effet épargnée des dangers qui la menaçait comme par magie. Le montage alterné qui semblait opposer les dangers de la fugue à la protection des murs du collège se trouve donc déjoué. La chronologie qui s'affiche à écran faisant défiler les jours de la semaine puis les horaires du samedi s'arrête à 22h49, au moment où Rie et Mikami sont bloqués, l'une par l'absence de train, l'autre par sa decision du suicide.
Le flash-back, autre moyen de refuser le suspens, intervient pour décrire comment Akira a failli mourir, étranglé par le cordon de la piscine ; comment Akira a surpris Yasuko et Yuri s'embrassant et, troisième occurrence, comment Ken a versé de l'acide dans le cou de Michiko. Ces séquences sont teintées de fantastique (image glauque ou déformée, pruniers en fleurs).
Vitalité des corps
La dépense d'énergie corporelle est constante chez les jeunes filles qui dansent en arrivant à la piscine et qui chahutent jusqu'à la limite de l'imprudence fatale avec Akira, qui pourrait en mourir. Yasuko est la première à entreprendre le spectacle du samedi matin où les six adolescents finissent par danser nus sous la pluie. Les pulsions sexuelles se manifestent par les relations érotiques qu'entretiennent Yasuko et Yuri, assises côte à côte au collège, surprises allongées l'une contre l'autre par Akira, s'embrassant et s'endormant à proximité l'une de l'autre le samedi dans la salle de classe. Rie aussi est traversé de pulsions sexuelles. Elle se masturbe dans le lit de sa mère qui a découché et se projette peut-être dans la sexualité qu'elle lui imagine tout en restant une enfant murmurant un suppliant "maman". C'est cette récréation érotique qui la met en retard et la fait fuir vers Tokyo.
Mikami, en revanche, a toujours un cartable, un livre ou un crayon à la main. Il semble avoir investi toute son énergie dans la réflexion intellectuelle. Lorsque Mikami se précipite vers lui après avoir été brûlée par Ken, elle se jette à ses pieds mais il reste sans réaction, toute comme il n'avait jamais été plus loin que de prendre la main de Rie sur le chemin de l'école sans répondre à ses avances, même lorsqu'elle balance son corps sur la table de l'école. Il refuse d'ailleurs de se déclarer amoureux de l'une ou de l'autre, prétendant l'être de l'inaccessible Naoko Kawai, star pop de 22 ans. Il sera aussi le dernier à se déshabiller pour rejoindre le spectacle improvisé par Yasuko.
Des adolescents abandonnés à eux-mêmes
Autour de ces huit adolescents, gravitent le professeur Unemaya et sa compagne alors que les parents des jeunes élèves semblent absents : aussi bien la mère de Rie, jamais à la maison, que le père de Ken, alcoolique, ou le père de Mikami qui ne le convoque que pour le réprimander. Michiko refuse que l'on appelle ses parents pour les rassurer quand elle est bloquée. Cette situation traverse les classes sociales. Mikami est issu d'une famille riche ; Rie vit en immeuble et est élevée par sa mère et Ken vit dans une misérable cabane avec un père alcoolique.
Mais c'est Mikami, toujours plongé dans les livres, qui est le plus torturé, affrontant des problèmes existentiels. Chez lui, le vendredi, il interroge son grand frère : "Peut-on transcender sa propre espèce ? On dit que ce n’est que par la mort que l’on triomphe de son espèce". Les deux discutent alors de la place de l’individu par rapport à la société : qui est la poule et qui est l'œuf ? Mikami dit, qu'après sa mort, il aimerait se réincarner en bouc, première étape qui va le conduire au suicide. Ainsi, le dimanche matin, il interpelle les cinq autres collégiens bloqués avec lui. "Je vais vous montrer quelque chose de bien, levez-vous et regardez. J’ai compris pourquoi Rie est devenue bizarre, pourquoi vous êtes tous comme ça. J’ai compris : la mort précède la vie. La mort est la prémisse de la vie mais on ne nous a pas donné une mort digne qui permet d’avoir une vie digne. Alors je vais mourir sous vos yeux pour que vous viviez tous". Devenu ainsi une sorte de Christ rédempteur, il saute de la fenêtre en criant "Vive la mort"
Ce suicide est un échec : on doute même que Mikami soit mort. Il n'a peut-être heurté que de l'eau et de la boue. Ses amis pourraient peut-être le tirer de ce mauvais pas. Le plan de Mikami en poirier, la tête dans l'eau reprend toutefois celui, célèbre au Japon, du Complot de la famille Inugami (Ken Ichikawa, 1976) et indique donc la mort de l'adolescent.
Le complot de la famille Inugami (Ken Ichikawa, 1976) | Le suicide de Mikami |
Cette mort n'est pas bien digne et ne permettrait certainement pas la réincarnation souhaitée. L'échec de Mikami est plus patent encore. Le lundi, quand se termine le film, Rie revient de Tokyo et remarque qu'Akira a grandi, sorte de compliment qu'elle avait déjà fait à Mikami. Celui-ci, mort ou vivant, est oublié. Rie, tout à son enchantement, voit même dans son collège entouré d'eau une réplique du Pavillon d'or.
Le pavillon d'or, 1397 | L'image finale du collège des adolescents |
Comme souvent chez Somai, la magie intervient. Ainsi ici dans cette étrange scène ou Rie marchant seule dans une ruelle de Tokyo pluvieux, trouve son chemin momentanément obstrué par un couple enveloppé de plastique avec un maquillage de Kabuki, jouant de l'Ocarina, se déplaçant de gauche à droite et de droite à gauche. Elle les interroge et leur seule réponse est que l'ocarina dont ils jouent est l'instrument du matin ; sorte de promesse que son avenir, pourtant menacé, se trouvera préservé.
Rie interroge le destin... | .. qui lui promet le retour du matin |
Jean-Luc Lacuve, le 6 juillet 2024, après le Ciné-club du 4 juillet