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Pour toi, j'ai tué

1949

Genre : Film noir

(Criss cross). Avec : Burt Lancaster (Steve Thomson) Yvonne De Carlo (Anna) Dan Duryea (Slim Dundee) Esy Morales (Le chef d'orchestre) Meg Randall (Helen, la fiancée de Slade) Richard Long (Slade Thompson) Percy Helton (Frank). 1h27.

dvd chez Carlotta Films

Après deux ans d'absence, Steve Thompson revient à Los Angeles et retrouve sa place de chauffeur dans la Compagnie des Camions Blindés. Son ex-femme, Anna, s'est remariée avec un gangster notoire, Slim Dundee. Toujours amoureux d'elle, Steve ne peut s'empêcher de la revoir. Un soir, Dundee les surprend chez lui. Pour détourner les soupçons, Steve prétend être venu lui proposer une affaire : l'attaque de son camion le jour de la paye de l'usine Bliss. Intéressé, Dundee prépare minutieusement le coup mais Steve exige qu'il ne soit pas fait usage d'armes à feu...

Le hold-up a lieu comme prévu mais, malgré ses promesses, Slim abat Pop, le convoyeur et ami de Steve. Furieux, Steve riposte et blesse le gangster. Soigné à l'hôpital, Steve est devenu un héros car sa conduite a permis de sauver la moitié de l'argent. Pour se venger, Slim le fait enlever, mais Steve réussit à soudoyer son gardien qui le conduit chez Anna au moment où elle est sur le point de s'enfuir avec le butin. Survient Slim qui les abat tous les deux, tandis qu'au loin hurlent les sirènes de police...

Le film présente des analogies évidentes avec Les tueurs, grand succès de Siodmak réalisé deux ans plus tôt : même musique de Miklos Rosza, même scénariste, un héros interprété par Burt Lancaster et une femme fatale interprétée cette fois non plus par Ava Gardner mais par Yvonne de Carlo, et, enfin, une grande importance accordée au flash-back.

Pour toi j'ai tué est pourtant le chef d'œuvre de Siodmak : plus lyrique et implacable encore que Les tueurs ; plus fragile et tendu vers la tragédie sans les afféteries formelles des multiples flash-back.

Contrairement aux Tueurs tournés en studio, Pour toi j'ai tué présente aussi un aspect documentaire : les rues en pente du quartier Bunker Hill à Los Angeles et son funiculaire des anges ; les vêtements ouvriers de Burt Lancaster.

Mais c'est la trajectoire implacable de l'amour fou qui est perpétuellement soutenue par la mise en scène. Le hold-up est une décision improvisée par Steve pour éviter que Slim croit que la présence de Anna chez lui soit la preuve de l'adultère. Progressivement Anna prend conscience de la folie tragique de cet engrenage. Palos Verdes, évoqué dès la première séquence, petite maison sur la côte, devient le symbole du refuge aussi fragile qu'impossible.

Steve, Anna et Slim forment un trio tragique. Le titre français "Pour toi j'ai tué" ne peut s'appliquer qu'à Slim dont l'amour sincère signera également sa perte. L'obsession amoureuse et charnelle de Steve est due au fait qu'il ne peut oublier celle qui fut sa femme pendant de courts mois. Il est littéralement fasciné par elle, ne regarde qu'elle et semble la faire revenir comme une force de rappel lorsqu'elle s'éloigne. Anne est la plus fragile des trois, socialement dépendante, elle a bien conscience de devoir composer avec le réel et les éternelles rebuffades verbales de Steve et surtout les intimidations de sa famille la conduisent à accepter l'amour de Slim.

Dépouillement froid et sec de la dernière séquence : surgissement de la mort dans l'encadrement noir de la porte et brève évocation de la Pieta dans la position des corps morts de Anne et Steve alors que Slim, hébété, attend aussi la mort que lui réservera bientôt la justice.

Jean-Luc Lacuve le 20/08/2007

Test du DVD

Editeur : Carlotta-Films, aôut 2007. Nouveau master restauré, Version Originale Sous-Titres Français Format 1.33 respecté – 4/3 – Noir & Blanc Durée du Film : 1h27

Alalyse du DVD

Suppléments: Répétitions/Obsessions (20 mn) par Serge Chauvin, Maître de conférences en littérature et cinéma américains, revient sur la répétition comme figure chez Robert Siodmak et sur les motifs récurrents entre Criss Cross et Les Tueurs. Bande-annonce