Les chasses du comte Zaroff

Après le naufrage du yacht de ses amis, Bob Rainsford, célèbre chasseur de fauves, est recueilli par le comte Zaroff, qui vit avec ses domestiques tartares dans un étrange château, à la pointe de l'île de Brank dans les Caraïbes. Rainsford y trouve deux autres jeunes gens naufragés récents eux aussi, Martin Trowbridge et sa sœur Eve.

La nuit, Rainsford et Eve surprennent Zaroff auprès du cadavre de Martin. Le comte explique alors sa passion : après avoir chassé tous les gibiers possibles, devenu blasé, il chasse les hommes qu'il attire dans son île en provoquant le naufrage des embarcations par de faux balisages. Il recueille ainsi les survivants et leur propose la "Chasse". Si le chassé parvient à rester indemne jusqu'au lever du jour il obtient la liberté... Rainsford accepte le défi et, muni d'un seul couteau, accompagné d'Eve, il fuit, opposant la ruse à l'habileté du maniaque armé d'un arc.

Zaroff a successivement déjoué tous les pièges tendus par Rainsford, il est parvenu à rejoindre le couple aidé par ses dogues. Ceux-ci attaquent Rainsford, lequel en tentant de se défendre fait une chute dans un torrent, quelques instants seulement avant l'heure fatidique fixée par Zaroff.

Mais, en réalité le jeune homme n'était pas mort, et malgré ses blessures, avait réussi à revenir au château. Là, une lutte violente l'oppose à Zaroff au terme de laquelle Rainsford parvient à le blesser mortellement à l'aide d'une de ses propres flèches acérées, maniée comme un poignard.

Pour sa forteresse gothique, ses marécages embrumés et sa forêt inextricable, ce film est devenu un classique du film fantastique. S'il relève bien de ce genre tout autant que de celui du film d'aventures c'est non seulement que son tournage est concomittant de celui de King Kong mais aussi parce que Schoedsack fait du raffiné comte Zaroff un fou devenu démon.

Réalisé par Schoedsack, le film est produit par Cooper sous le contrôle de Zelznick qui compte sur ces deux aventuriers pour relancer le studio. C'est le projet de King Kong qui mobilise alors l'énergie des trois hommes mais Schoedsack réussit à tourner celui-ci comme une sorte de banc d'essai. Les décors de l'île, l'équipe technique et l'actrice principale, Fay Wray, sont les mêmes pour les deux films.

Le film est centré sur l'affrontement entre Zaroff et Bob Rainsford. Rainsford déclare sur le bateau que la passion de la chasse annime tout autant l'homme que les grands prédateurs félins. C'est seulement la nature qui, séparant en deux chasseurs et gibiers, lui a donné la chance de faire partie des premiers sans jamais avoir à passer du côté des seconds.

Zaroff aprécie les écrits du grand chasseur qu'est Rainsford qui vont à l'encontre de la réputation négative et sanguinaire dont on affuble souvent les chasseurs. "La chasse ressemble au poker sauf qu'on y joue plus gros" est une formule que partage les deux hommes.

Si Zaroff a basculé dans la chasse du "most dangerous game" (titre original qui joue sur les deux sens du mot game : jeux et gibier), c'est à la suite d'une blessure de buffle qui lui a laissé une profonde entaille au front. La mise en scène, par ses cadrages et ses éclairages, suggère que le délire qui a suivi la blessure à atteint l'esprit du comte.

Le duel psychologique entre les deux hommes fait l'objet de la première moitié du film alors que la chasse, du départ quatre heure jusqu'au lendemain à la même heure, puis son épilogue occupent l'autre moitié. Fay Wray, presque aussi érotique que dans King Kong est très présente dans ces deux parties. Elle est l'enjeu du combat.

Le second plan du film, le gros plan sur la poigné de porte, est un flash-forward symbolique. Il anticipe la victoire apparente du comte, figuré tel un monstre après la chasse et sa blessure mortelle après le retour de Rainsford. Cette image sera également vue par Rainsford un peu plus tard sur la tapisserie du chateau.

Le film sort en France en 1934 sous le titre La chasse du comte Zaroff. Ce n'est que par la suite que "la chasse" deviendra "les chasses". Il a donné lieu à plusieurs remakes (A Game of Death de Robert Wise en 1946). Joël McCrea trouve là l'un de ses premiers grands rôles.

Jean-Luc Lacuve le 01/09/2009

	Editeur : Editions Montparnasse. Septembre 2009. Nouveau master restauré, version originale, sous-titres français. 10 €.
	Présentation brève mais riche d'informations de Serge Bromberg.

	Editeur : Wild Side Video, mai 2010. Master restauré. V. O. avec sous-titres français. 10 €.
	La collection VINTAGE CLASSICS de Wild Side Video offre aux films tombés dans le domaine public de très beaux masters restaurés constitués avec les meilleures copies existantes.