La loi de Téhéran

2019

Genre : Film noir

(Metri Shesh Va Nim). Avec : Payman Maadi (Samad Majidi), Navid Mohammadzadeh (Nasser Khakzad), Houman Kiai (Hamid), Parinaz Izadyar (Elham, La petite amie de Nasser), Farhad Aslani (Le juge), Maziar Seyedi (Ashkan Misaghi), Ali Bagheri (Reza Moradi), Marjan Ghamari (Epouse de Reza Moradi), Yusef Khosravi (Le jeune Vahid). 2h14.

En Iran, la sanction pour possession de drogue est la même que l’on ait 30 g ou 50 kg sur soi : la peine de mort. Dans ces conditions, les narcotrafiquants n’ont aucun scrupule à jouer gros et la vente de crack a explosé. Bilan : 6,5 millions de personnes ont plongé. Au terme d'une traque de plusieurs années, Samad, flic obstiné aux méthodes expéditives, met enfin la main sur le parrain de la drogue Nasser Khakzad Alors qu’il pensait l'affaire classée, la confrontation avec le cerveau du réseau va prendre une toute autre tournure

Certains des plans de foules ont une incontestable puissance. Intégrés dans une narration à l'américaine qui valorise la course-poursuite et les gros plans sur les visages des acteurs, on s'interroge toutefois sur leur véracité documentaire. Existe-t-il des quartiers de Téhéran où des dizaines de drogués squattent des tuyaux en béton pour fumer du crack à longueur de journée ? Existe-t-il des séparateurs autoroutiers paysagés qui leur servent de refuge ? En cas de rafle, ces prisons sont-elles surchargées à ce point ?

Les figures secondaires du film disent que certains pères sont indignes, laissant leurs jeunes enfants aller en prison à leur place car ils risquent la récidive. Les juges cependant sont compréhensifs et humains. Tous ces à-cotés distraient de ce qui aurait pu être le cœur du film : la difficulté d'être flic en Iran. Nécessité d'être marié pour être nommé commissaire, suspicions généralisées des juges envers la police qui détruisent la solidarité entre collègues dès que  des soupçons de corruption pèsent sur l'un d'entre eux. Au final, domine le sentiment d'impuissance devant la montée en flèche, en quelques années, des accros au crack, passant de 1 à 6,5 millions de drogués. A mi-chemin, le film embraye soudain sur les malheurs du dealer qui était, en fait, un homme au grand cœur. Il est mortifié de voir que tout ce qu'il a donné à sa famille va lui être repris et qu'ils retourneront à leur misère. Puis retour à une scène spectaculaire d'exécution capitale.

A vouloir trop mettre de sujets dans son film, Saeed Roustayi finit par renvoyer dos à dos dealers et policiers mais, surtout, à trop tirer sur la corde du spectaculaire, il décrédibilise son discours social.

Jean-Luc Lacuve, le 30 aout 2021