Une péniche au fil de l'eau Trois occupants : Gudule, une jeune fille chargée des besognes domestiques, son père et son oncle, Jef. Ayant fait une mauvaise chute dans la rivière, le père se noie : sa fille se retrouve aux prises avec l'oncle, une brute qui la martyrise et tente même de la violer. Elle s'enfuit avec son chien dans les bois avoisinants. La Fouine, un bohémien, qui vit avec sa mère La Roussette dans une roulotte, la recueille. Elle vole des choux avec La fouine puis s'amuse avec lui et son chien. Mais celui-ci renverse Justin Crepoix, un riche paysan qui roulait en vélo. La fouine évite une correction grâce à Georges Raynal, le fils d'un propriétaire terrien de Pont-en-Brie, qui passait par là et qui s'émeut de la beauté de Gudule. Lorsque La fouine s'en va braconner sur les terres de Justin, s'en est trop pour ce dernier qui saccage le matériel de pêche de La fouine. Alors que Justin va s'en venter de ses dérisoires exploits au café du Bon coin, La fouine se venge en incendiant ses bottes de foin. La fouine et sa mère s'enfuient avant que n'arrivent les paysans, amis de Justin, en colère. Ils ne trouvent que Gudule dans la roulotte et l'injurient pendant qu'ils incendient tous les biens des bohémiens. Gudule fuit à nouveau. À bout de forces, elle s'évanouit au pied d'un arbre. Son sommeil est troublé par un cauchemar, où l'oncle Jef et Justin réapparaissent encore plus menaçants que jamais.
Georges Raynal, la recueille au matin. Il l'héberge, la soigne et la défend vaillamment contre les entreprises de l'oncle brutal, revenu effectivement sur les lieux et qui tente de la compromettre en lui soutirant de l'argent. Sa bonne foi sera heureusement reconnue, l'oncle maîtrisé et jeté à l'eau, permettant au jeune couple de couler des jours heureux.
Premier long-métrage de Jean Renoir, La Fille de l'eau, mélange mélodrame, néoréalisme, farce et surréalisme. Le film oscille d'une extrémité à l'autre, du drame à la comédie lumineuse, du naturalisme à une photographie très stylisée, du charme romantique à l'humanité la plus crue.
La jeune épouse de Renoir, Catherine Hessling, joue l'orpheline Gudule. Elle était le dernier modèle du père de Jean Renoir et il la met en scène dans une campagne idyllique qui aurait pu être un sujet pour son père. Le scenario a été écrit par l'ami intime de Renoir, Pierre Lestringuez (qui apparaît également dans le film dans le rôle de Jef), inspiré par des feuilletons américains, le mélodrame français et les contes de fées traditionnels. Le récit simple et un peu absurde est magnifié par le traitement de Renoir.
Renoir a été influencé par l'avant-garde de l'époque, en particulier par Abel Gance et Jean Epstein, adoptant et modifiant certaines de leurs techniques cinématographiques expérimentales. C'est notamment le cas dans l'utilisation du montage rapide utilisant une série de plans d'échelles différentes dans une succession rapide, pour créer une impression de brutalité nue et de panique lorsque Jef essaye de violer Gudule ou plus tard, quand Justin incendie la caravane des gitans.
Remarquable aussi le cauchemar de Gudule où, sous la pluie et avec la fièvre, elle est assaillie par des visions qui mettent en uvre des superpositions d'images, des surimpressions, des ralentis, du défilement inversé, des batraciens rendus géants dans des maquettes réduites, des miroirs déformants.
La Fille de l'eau a été restauré en 2005 par la cinémathèque française et studio canal à partir d'un contretype 35mm sur support de sécurité. Cet élément établit par Henri Langlois comporte des intertitres en anglais ; les intertitres en français n'ont pu être retrouvés. La restauration a donc consisté à traduire et adapter les textes anglais afin de composer un nouvel intertitrage puis à numériser le contretype pour traiter l'image.