À quelques jours du vernissage de son exposition, Lizzie s'attelle aux dernières sculptures qu'elle va présenter et tente d'affronter au mieux le stress qui l'envahit. Durant cette période anxiogène, son quotidien est perturbé par toutes sortes de problèmes. Jo, sa propriétaire et voisine, elle aussi artiste en cours d’accrochage qui lui loue son appartement-atelier pour un loyer modeste, retarde le remplacement de la chaudière. Lizzie ne peut ainsi avoir de l'eau chaude pour se doucher. Son chat a besoin de ses croquettes quotidiennes et s'est attaqué à un pigeon rentré chez elle. Lizzie a tenté de s'en débarrasser mais Jo l'a recueilli et s'est décidé à le soigner lui en confiant souvent la garde.
Lizzie s'inquiète aussi pour son père, Bill, qui se laisse envahir par de prétendus amis sans gêne qui squattent sa maison entre deux voyages. Son frère, Sean, va plus mal encore. Artiste d’abord prometteur, il s'est enfermé dans une paranoïa grandissante. Lizzie va le voir régulièrement pour éviter que son état empire. Elle est aidée par sa mère, Jean, responsable de l'école d'art où elle travaille comme graphiste pour réaliser les flyers et programmes des élèves ou des artistes en résidence, comme Marlene qui expose dans une galerie à New York.
Lizzie réussit néanmoins à sauvegarder des moments de création où elle sculpte des céramiques émaillées représentant des femmes en train de danser dans des postures les plus diverses. Eric, responsable du four à céramiques de l'école, se montre toujours conciliant, encourageant et surtout efficace : même une sculpture qui a reçu un coup de chaud donne un résultat intéressant.
Le jour du vernissage, les visiteurs sont nombreux. La famille est réunie mais, Bill Jean et Sean commencent à se disputer quand des enfants libèrent le pigeon blessé. Sean le ramasse et le laisse partir et l'angoisse s'envole avec lui. La vie va reprendre son cours normal.
Showing Up est un titre à plusieurs sens. C'est tout d’abord, le fait de se présenter sur son lieu de travail tous les jours. Ensuite, l’idée de se dévoiler dans sa création mais aussi de se montrer présent pour les autres, pour ses amis, pour les gens qu’on aime.
Showing up
Lizzie est harcelée par une précarité constante. Le geste de création doit sans cesse s’arracher aux nécessités et aux tracas envahissants du quotidien. La routine de l'artiste au travail est comme une respiration, loin du stress et des soucis. C'est là l'essentiel. Jamais il n'est fait état d'une inspiration géniale ou d'un regard critique surplombant qui viendrait affirmer la valeur artistique de l'œuvre. Les sculptures de Lizzie ne lui ressemblent pas du tout : ses danseuses sont expressives, amusantes et libres, leurs couleurs sont audacieuses et inattendues. Elles ont été réalisées par l’artiste Cynthia Lahti qui vit à Portland qui est une amie de longue date du co-auteur du film, Jonathan Raymond.
Les personnages ont des relations compliquées entre eux. Les tensions entre Jo et Lizzie ne les empêchent pas de respecter le travail de chacune et d’être présentes l’une pour l’autre. Lizzie répond aux sollicitations des autres et n'est pas enfermée comme peut l'être son frère ou son père qui a renoncé pour une retraite de désœuvré.
Un hommage à la créativité des écoles d'art
Le film est tourné au sein de l’école d’art de l’Oregon. Dans les années 60-70, les gens y venaient pour faire de la céramique. C’était une des plus grandes du Nord Pacifique, mais comme beaucoup d’autres en Amérique, elle a fermé. Grâce au Covid, les travaux étaient en pause, et le film a pu y être tourné avant qu’elle ne soit détruite. Tous les artistes qui jouent dans le film ont un lien avec cette école.
Le film est ainsi une forme d'hommage à ces écoles dans le droit fil du Black Mountain College dont l’idée était de mettre l’art au centre de tout enseignement pour développer une pensée créative. C'est le même élan que l'on voit dans l'école dirigée par Beuys à Düsseldorf telle que montrée dans L'oeuvre sans auteur ou du Programme d'Art Féministe au California Institute of the Arts (CalArts) crée en 1971 par Judy Chicago et Miriam Schapiro.
Jean-Luc Lacuve, le 7 mai 2023.