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Exodus

1960

Avec : Paul Newman (Ari Ben Canaan), Eva Marie Saint (Kitty Fremont), Ralph Richardson (Général Sutherland), Peter Lawford (Major Caldwell), Lee J. Cobb (Barak Ben Canaan). 3h25.

Au cours de l'été 1947, plusieurs centaines de réfugiés juifs, en chemin pour la Terre Sainte, sont arrêtés par les Anglais et parqués dans des camps à Chypre. Ari Ben Canaann, un résistant, s’indigne de ces arrestations et prend la tête d’un périple à bord d’un vieux bateau, l’Exodus. Pour trouver la liberté les juifs venus d'Europe Centrale prennent place sur le paquebot "Exodus" pour tenter de rentrer en Israël.

Le blocus par les anglais dans le port de Chypre émeut l'opinion internationale. Enfin libéré, le bateau aborde à Gan Dafna, en Galilée. Une fois débarquées, les populations ont à lutter contre les Arabes. Deux organisations secrètes juives, la Haganah et l'Irgun, fomentent des attentats contre la domination britannique. L'attaque de la prison de Saint-Jean-d'Acre est organisée pour libérer certains agents des organisations secrètes.

Une dizaine de personnages évoluent au cours de cette histoire : Kitty Fremont, une jeune infirmière veuve qui fera cause commune avec les réfugiés; le bienveillant général Sutherland qui cherche à faciliter le départ de l'" Exodus"; le major Caldwell, farouche antisémite; le leader israélien Ari Ben Canaan, fils de Barak, et neveu d'Akiva, le chef de l'Irgun; enfin le jeune Dov Landau, farouche adepte de la violence.

Exodus est une adaptation du roman éponyme de Leon Uris (inspiré par des événements réels) par le scénariste Dalton Trumbo. C’est avec ce film que Trumbo sort officiellement de la liste noire, puisque son nom apparaît au générique, alors qu’il était contraint de travailler sous pseudonyme depuis qu’il avait été condamné en 1947 à onze mois de prison pour « activités anti-américaines », puis réduit au chômage et à la clandestinité tant que dura la terrible chasse aux communistes à Hollywood. La même année, quelques mois plus tard, Kirk Douglas accepte également de mentionner le nom de Trumbo au générique du film qu’il produit et interprète, Spartacus de Stanley Kubrick. La décision courageuse de Preminger correspond à ses idées libérales et à sa haine de la censure, politique ou religieuse, qu’il combattit tout au long de sa carrière, l’utilisant souvent à des fins publicitaires.

Exodus est la première grande fresque chorale d’Otto Preminger, dans laquelle la multiplicité des personnages, des opinions et des points de vue est censée restituer la réalité étudiée dans sa globalité et sa complexité – ici la naissance de l’Etat d’Israël.

Pour Olivier Père : "Preminger est le cinéaste classique par excellence, car son art méprise l’expérimentation voyante et met la maîtrise de l’écriture cinématographique au profit de l’évidence, du réalisme et de la dramaturgie. Exodus (le plus beau et le plus représentatif des chefs-d’œuvre de Preminger des années 60, par son ambition mais aussi son goût des grands sujets audacieux susceptibles de créer la controverse, ici le sionisme) s’écoule ainsi comme un long fleuve majestueux, épousant le thème du film sur l’amplitude de l’histoire qui draine les conflits et les destins personnels. Le film contient plusieurs morceaux de bravoure, et les plus mémorables ne sont pas forcément les plus spectaculaires, bien à au contraire. Pour une seule scène, Exodus mérite sa place au panthéon des grands films de l’histoire du cinéma : celle où le jeune Dov Landau (Sal Mineo), interrogé par un chef de l’Irgoun, finit par avouer l’inavouable : enrôlé de force dans les sonderkommandos à Auschwitz, il fut contraint de participer au processus de la solution finale contre son peuple et de servir de prostituée pour les soldats allemands. Un long plan fixe dans la pénombre, avec une tache de lumière qui éclaire le visage de Sal Mineo perdu dans l’écran large, la seule puissance de la parole pour évoquer l’horreur : une leçon de mise en scène qui vient rappeler que l’esthétique et la morale ne peuvent se dissocier, que ce soit dans un documentaire ou une superproduction hollywoodienne."

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