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L'interprète

2005

Genre : Drame social

(The Interpreter). Avec : Nicole Kidman (Silvia Broome), Sean Penn (Tobin Keller), Catherine Keener (Dot Woods), Yvan Attal (Philippe), Earl Cameron (Zuwanie), Jesper Christensen (Nils Lud), George Harris (Kuman-Kuman), Curtiss Cook (Ajene Xola), Lynne Deragon (l'ambassadrice américaine). 2h00.

Matobo, un pays d'Afrique australe. Simon Broome, le chef rebelle Ajene Xola, et Philippe un photographe ont un rendez-vous dans un stade de football abandonné Ils discutent de la façon dont le régime du président Edmond Zuwanie a impitoyablement exterminé la majeure partie de la population et intimidé les survivants jusqu'au silence. A leur arrivée au stade, ils découvrent que les informateurs sont des écoliers, qui indiquent à Ajene et Simon le chemin vers des cadavres laissés par l'appareil de sécurité de Zuwanie, tandis que Philippe est sommé de rester dans la voiture.

Les cris attirent Ajene et Simon sur le terrain, où ils sont rapidement exécutés par les écoliers, qui se révèlent être des enfants soldats embrigadés par la police secrète de Zuwanie. En entendant les coups de feu, Philippe sort de la voiture et se cache, prend des photos d'une voiture arrivant transportant des militaires et fonctionnaires du Matobo, puis s'échappe dans les environs.

Pendant ce temps, la sœur de Simon, Silvia Broome, travaille comme interprète pour les Nations Unies à New York. Africaine blanche née aux États-Unis d'une mère britannique et d'un père matoban blanc, elle a passé la majeure partie de sa vie à Matobo et est double citoyenne de Matobo et des États-Unis . Ses antécédents en font une recrue de choix pour l'ONU. Le chef de la sécurité de l'ONU, Lee Wu, la décrit avec ironie comme "étant l'ONU".

L'ONU envisage d'inculper Zuwanie, pour qu'il soit jugé par la Cour pénale internationale. Initialement libérateur, il est devenu au cours des 20 dernières années aussi corrompu et tyrannique que le gouvernement qu'il a renversé, et est maintenant responsable du nettoyage ethnique et d'autres atrocités au sein de Matobo. Zuwanie doit bientôt se rendre à l'ONU et présenter son propre cas à l'Assemblée générale, dans une tentative d'éviter l'acte d'accusation.

Une alerte à la sécurité causée par un détecteur de métaux défectueux force l'évacuation du bâtiment de l'ONU et, alors que Silvia revient la nuit pour récupérer des effets personnels, elle surprend deux hommes discuter d'un complot d'assassinat en dialecte Ku. Silvia s'enfuit du bâtiment lorsque les hommes prennent conscience de sa présence. Le lendemain, Silvia informe sa hiérarchie des mots entendus la nuit précédente, et signale l'incident à la sécurité de l'ONU; la cible du complot semble être Zuwanie lui-même.

La sécurité de l'ONU appelle les services secrets américains, qui chargent les agents de la "Division de la protection des dignitaires", Tobin Keller et Dot Woods, d'enquêter, ainsi que de protéger Zuwanie à son arrivée, ainsi que le chef personnel de la sécurité de Zuwanie, l'ancien mercenaire néerlandais Nils Lud. Keller, dont l'épouse a été tuée dans un accident de voiture causé par son nouvel amant, deux semaines plus tôt, apprend que Silvia a, dans le passé, été impliquée dans un groupe de guérilla Matoban, après que ses parents et sa sœur ont été tués par des mines posées par les hommes de Zuwanie. Silvia a même été la compagne d'Ajene Xola, l'un des deux opposants politiques de Zuwanie. Bien que Keller se méfie des non-dits de Silvia, les deux se rapprochent, en partie à cause de leur chagrin commun. Keller finit par la protéger des attaques contre sa personne.

Philippe appelle Silvia pour la rencontrer et l'informe de la mort de Xola, mais, incapable de supporter son chagrin, ment et dit qu'il ne sait pas ce qui est arrivé à Simon. Silvia tente d'obtenir des informations par l'intermédiaire de Kuman-Kuman, un ministre matoban exilé vivant à New York, pour finalement être presque tué dans un attentat à la bombe perpétré par Jean Gamba, que Philippe avait pris en photo dans la scène initiale.

Philippe est retrouvé plus tard mort dans sa chambre d'hôtel et Silvia apprend par la lettre qu'il lui a laissée que son frère a été tué avec Ajene Xola. Elle évite de justesse une tentative d'assassinat par Gamba (que Keller tue) et laisse un message vocal sur le téléphone de Keller disant qu'elle rentre chez elle. Keller considère que cela signifie qu'elle retourne à Matobo et envoie un agent pour l'intercepter à l'aéroport international John F. Kennedy.

L'assassin présumé est découvert et abattu alors que Zuwanie est au milieu de son discours à l'Assemblée générale, et le personnel de sécurité précipite Zuwanie dans une pièce sûre pour sa protection. Silvia, anticipant cela, s'est cachée dans la pièce sécurisée, confronte Zuwanie et a l'intention de le tuer elle-même. Keller détermine que le complot d'assassinat est une opération sous fausse bannière créée par Zuwanie pour gagner en crédibilité que ses rivaux sont des terroristes et pour dissuader les partisans potentiels de son retrait. Keller se rend compte que Silvia rentrer chez elle signifie aller à l'ONU et se précipite dans la pièce sécurisée, juste à temps pour l'empêcher d'assassiner Zuwanie. Zuwanie est inculpé et Silvia se réconcilie avec Keller avant de partir pour Matobo.

Sydney Pollack s'est beaucoup impliqué pour donner de la vraisemblance à son film, aussi bien par la le choix plique du pays africain soumis à la dictature, la langue Ku qui y est parlée et le tournage réalisé pour la première fois dans les bâtiments mêmes de l'ONU. Mais l'invraisemblable histoire sentimentale et le scenario trop alambiqué rendent l'ensemble artificiel, sans engagement, confi de bon sentiment, inutile.

Un réel effort de vraisemblance

La séquence d'ouverture a été tournée au Mozambique mais la République du Matobo est un État fictif évoquant le Zimbabwe : son drapeau, visible dans le film, est fortement similaire au drapeau du Zimbabwe ; l'emblème du MDC (l'un des principaux partis politiques zimbabwéens) est brandi par les manifestants; Edmond Zuwanie, président fictif du Matobo, est comme Robert Mugabe, le président du Zimbabwe, un ancien chef de guérilla devenu dictateur ; enfin le nom Matobo rappelle les Monts Matobo, chaîne de montagnes du Zimbabwe.

Le Ku est une langue fictive qui a été spécialement créée pour le film, à la demande de Sydney Pollack. Parlé dans le pays africain fictif du Matobo, le Ku a été fabriqué par le linguiste Said el-Gheithy, directeur du Centre for African Language Learning (« Centre pour l’apprentissage des langues africaines »), à Covent Garden à Londres. Le film en tire aussi des phrases symboliques : "Nous sommes kepéla. Cela signifie se faire face en étant chacun sur une rive" et un vieux fond de sagesse passe-partout ; choisir de se venger d'un crime par la mort de celui qui l'a commis c'est resté endeuillé toute sa vie par une double mort; pardonner c'est redonner une vie en acceptant l'injustice qui est  la réalité de la vie.

Enfin, le film est le premier à être tourné dans les bâtiments de l'ONU, dans les salles de l'Assemblée générale et du Conseil de sécurité. L’ONU a donné l'autorisation formelle aux producteurs du film en mars 2004 alors qu'une demande initiale avait été rejetée, contraignant la production à débuter la construction d'un décor dans un studio de Toronto qui augmentait considérablement les coûts. Sydney Pollack a approché directement le secrétaire général de l'époque, Kofi Annan, et a personnellement négocié l'autorisation de filmer à l'intérieur des Nations Unies. Le tournage avait lieu le week-end, les jours fériés ou la nuit afin de ne pas perturber le travail régulier de l'ONU. Les ambassadeurs à l'ONU avaient espéré apparaître dans le film, mais des acteurs ont été invités à jouer les rôles de diplomates.

Un film trop bien pensant

Annan a toutefois demandé que le film devait se montrer digne et honnête, reflétant le travail que fait cette Organisation. Du coup, tous deux opposant au régime, Kuman-Kuman et Ajene Xola sont exemptés de soupçons de massacres afin de simplifier les enjeux politiques. Mais le plus embarrassant reste le rapprochement sentimental sans intérêt entre Silvia Broome et Keller Tobin Keller et sans aucune sensualité ni magnétisme entre ceux qui les interprètent, Nicole Kidman et Sean Penn. Ne reste qu'une intrigue alambiquée ; tout ça pour ça.

Jean-Luc Lacuve, le 6 juin 2022.

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