Sur un ferry reliant une petite île au continent américain près de New York, un 4x4 immobilisé gêne la sortie des autres véhicules. Plus tard, le corps de son occupant est retrouvé sur l'île.
Il s'agissait de Mike McAra, un écrivain chargé de rédiger les mémoires de l'ancien Premier ministre britannique Adam Lang dont il était très proche. Pour achever son travail, Rhinehart, la prestigieuse maison d'édition qui l'employait se résout à faire appel à un écrivain qui n'a à son actif qu'une biographie du magicien Costello et qui ne connaît rien au milieu politique. Le nouveau nègre n'est d'ailleurs pas enchanté de ce travail mais la somme offerte (250 000 dollars)par John Maddox le ptaron de Rhinehart à New York et la pression de son agent littéraire, Nick Ricardelli, le convainquent de partir le soir même de Londres pour rejoindre la petite île de Martha's Vineyard (Massachusetts) dans la résidence hyper sécurisée de Old Haven où Adam Lang se ressource avec ses proches durant sa tournée aux USA. A peine le nègre a-t-il quitté les locaux de la maison d'édition qu'il est agressé et délesté d'un manuscrit indigeste qu'un des avocats d'Adam Lang, Sidney Kroll, lui avait confié.
A peine arrivé, le nègre est confronté à la polémique politico-judiciaire qui fait la une des journaux télévisés : L'ancien ministre britannique des Affaires étrangères, Richard Rycart, accuse Lang d'avoir autorisé l'enlèvement et la torture de ressortissants britanniques par les services secrets américains, au nom de la lutte contre le terrorisme. Lang risque d'être poursuivi par la Cour pénale internationale à moins qu'il ne reste aux États-Unis. De plus, les relations entre Ruth, la femme d'Adam, et Amelia Bly, l'assistante de L'ex Premier ministre, sont tendues car devenues rivales aussi bien professionnellement que sentimentalement. Ruth revele au nègre que c'est elel qui a suscuté sa candudature, ayant aimé sa biographie du magicien. Elle lui propose de l'accompagner à l'aéroport pour accueillir son mari. Le negre rejoint ensuite son auberge, "monacale" où il devra résider un mois, le temps de réécrire le manuscrit. Le nègre est consterné par l'écriture desséchée de son prédécesseur et aimerait y introduire des éléments dévoilant davantage de l'intimité de Lang. Ainsi, au lieu de l'arbre généalogique de Lang, il voudrait débuter par ce qui a motivé son entrée en politique. D'autant plus qu'Adam lui révèle que c'est par amour pour Ruth, qui distribuait des tracts en 1974, qu'il est entré en politique. Lang se montre d'abord reticent à se devoiler mais apprecie le ton franc du nègre. Ruth et Amelia le laissent aussi rédiger le communiqué de presse qui répond aux attaques de toutes parts que doit affronter Adam Lang. Avec la pression de l'actualité, John Maddox, le patron de Rhinehart, somme le nègre de finir en quinze jours.
Le soir, le nègre rejoint son hôtel où il est pris à parti par un anglais qui le traite de connard lorsqu'il dit ignorer où se trouve la résidence des Lang. Au matin, il doit quitter rapidement son hôtel, envahi de journalistes.
La cour pénale internationale ouvre une enquête pour crime de guerre contre Lang, accusé d'avoir ouvert la voie à des tortures par l'eau contre des activistes britanniques. Lang, contrairement à ce que lui conseille Ruth, décide de se réfugier à New York.
Le nègre se retrouve seul dans la grande maison des Lang et entreprend de vider les affaires de McAra. Collée derrière un tiroir, il trouve une pochette contenant des photos de Lang, jeune acteur d'une troupe de Cambridge, mais aussi une coupure de journal évoquant la distribution de tracts par Lang et Ruth, daté de 1974 et sa carte de membre du parti travailliste datant de 1971. Au dos d'une des photos, des noms et un numéro de téléphone. Le nègre appelle le numéro et découvre qu'il appartient à Richard Rycart.
Le nègre décide de partir à la découverte de l'île, préférant le vélo au 4x4 dédié aux invités que lui conseille pourtant chaleureusement le serviteur des Lang. Le nègre n'a en effet que le temps de faire quelques tours de roues quand la pluie se déchaîne. Il trouve refuge dans une baraque délabrée où un vieil homme lui apprend que le corps de McAra n'aurait jamais pu être retrouvé là où il le fut s'il était tombé du ferry. Une de ces voisines a d'ailleurs vu des lumières ce soir-là sur la plage. Elle ne pourra toutefois rien dire car, depuis une semaine, elle est dans le coma après une mauvaise chute dans les escaliers. Le nègre se rend alors sur la plage où se promène Ruth, excédée par le départ de son mari avec sa secrétaire.
Ruth raccompagne le nègre chez elle. Mortifiée par le départ de son mari, elle assiste à sa déclaration lors de son arrivée à New York : accueilli chaleureusement, il grimace pourtant plus qu'il ne sourit. Le nègre est maintenant convaincu que Lang est un espion à la solde des Américains qui l'aurait recruté en 1971 et il fait part de des doutes à Ruth au sujet de la mort de McAra. Ruth révèle que Lang et McAra s'étaient disputés la nuit avant la mort de ce dernier.
Troublée et bouleversée, Ruth fait intrusion dans la salle de bain puis dans la chambre du nègre et se glisse dans son lit. Au matin, le nègre décide de regagner son hôtel pour y travailler plus au calme. Il prend cette fois-ci le 4x4 dont le GPS lui indique une route qu'il trouve incohérente. Il finit par comprendre qu'il s'agissait du trajet choisi par McAra le jour de sa mort.
Il rejoint ainsi le continent pour atteindre, en pleine forêt, la résidence de Paul Emmett à Belmont. Emmett nie bien connaître Lang, malgré plusieurs photos où il apparaît à côté du couple. Lorsque le nègre lui affirme que le GPS prouve que McAra lui a rendu visite la nuit de sa mort, Emmett le nie et devient évasif.
Quelqu'un suit le nègre sur le chemin du retour vers Martha's Vineyard. N'ayant personne d'autre vers qui se tourner, le nègre demande de l'aide à Rycart à New York. Le nègre recherche des liens entre Emmett et un entrepreneur militaire ainsi que la CIA. Rycart révèle que McAra lui a donné des documents liant Lang à de soi-disant "vols de torture", dans lesquels des suspects terroristes ont été placés dans des jets privés pour être torturés en vol.
Rycart affirme que McAra a trouvé de nouvelles preuves, dont il a parlé dans les "débuts" du manuscrit. Les deux hommes ne peuvent cependant rien trouver dans les premières pages. Le nègre affirme que Emmett était un agent de la CIA quand il a rencontré Lang, tandis que Rycart raconte comment les décisions de Lang en tant que Premier ministre ont uniformément profité aux intérêts américains. Rycart a enregistré leur conversation, ce qui oblige le negre a poursuivre à ses côtés et trahir Adam Lang. Celui-ci vient le chercher en jet privé pour retourner sur leur île.
Dans l'avion, le nègre confronte Lang et l'accuse d'être un agent de la CIA recruté par Emmett. Il lui révèle aussi que McAra informait Rycart car il soupçonnait une manipulation de la CIA. Arrivé à l'aéroport d'Old Haven, Lang est assassiné par un homme dont le fils est mort "dans l'une des guerres illégales de Lang". L'assassin, celui qui l'avait interrogé le premier soir à son hôtel, est abattu par les gardes du corps de Lang. Le nègre est invité à terminer le livre pour une publication posthume.
Lors de la soirée de lancement du livre à Londres, le nègre est invité par Amelia Bly qui lui apprend incidemment qu'Emmett, qui discute avec Ruth, était le professur de celle-ci lorsqu'elle était boursière à Harvard. Comme le nègre lui remet en cadeau ironique le manuscrit, autrefois si bien gardé qu'il a retravaillé, elle lui apprend que c'est la CIA qui tenait à ce dispositif de sécurité y voyant une menace pour ces intérêts dans "les débuts du manuscrit". Comprenat que c'est dans "les debuts" et non "le debut" que se trouve la clé du mystère, le nègre souligne chaque début de paragraphe et lit le message codé que McAra avait caché dans son manuscrit original : "La femme de Lang, Ruth, a été recrutée comme agent de la CIA par le professeur Paul Emmett de l'Université de Harvard." Le nègre passe une note à Ruth révélant sa découverte. Elle déplie la note et en est dévastée. Elle voit le nègre lever son verre à son encontre. Le nègre quitte la fête et alors qu'il traverse la rue, une voiture accélère dans sa direction et un bruit sourd se fait entendre. Les témoins réagissent avec horreur... Les pages contenant le manuscrit accusateur de McAra se dispersent dans le vent.
The Ghost Writer est l'adaptation de L'Homme de l'ombre de Robert Harris, habile thriller d'espionnage dans lequel Polanski a introduit quelques-unes unes de ses obsessions mais sans aller jusqu'à imposer un point de vu capable de ralentir l'habile mécanique du film, parfois haletante, mais dépourvue d'émotion.
Un habile film d'espionnage
Le livre est basé sur la rumeur qui courut, en septembre 2006, selon laquelle Tony Blair pourrait être poursuivi devant une cour de justice internationale avec, pour seul moyen d'échapper à la justice, l'exil aux Etats-Unis.
Robert Harris, longtemps journaliste politique au Sunday Times, avait soutenu Tony Blair jusqu'en 1992 avant de changer d'opinion après les élections législatives de 1997 qui l'ont porté au pouvoir. Il lui reproche alors d'être plus à droite que Margaret Thatcher. Lorsqu'il fait son bilan, il ne voit pas une seule de ses initiatives qui n'ait pas été orchestrée en faveur des Etats-Unis : "On a bien soupçonné Harold Wilson, Premier ministre travailliste dans les années 1960 et 1970 d'être à la solde du KGB. Pourquoi ne pas lui imaginer un successeur acquis à la CIA ?" s'est demandé Robert Harris. Puis, constatant que la femme de Tony Blair était encore plus à droite que son mari, lui est venue l'idée du scénario.
Du style au service d'une psychologie de surface
Le domestique qui s'acharne à remplir une brouette de feuilles mortes en plein vent rappelle la connivence du cinéaste avec le théâtre de l'absurde. Le lieu où échoue le nègre nous ramène à son obsession du huis clos : Il s'agit d'une luxueuse villa vitrée, coupée du monde, nichée sur une île, ghetto symbolique où se retrouvèrent nombre de ses personnages, réfugiés ou cernés sur un bateau, dans un appartement, dans une maison ou un château.
Que cette villa soit au bord de la mer renvoie à ce thème récurrent de l'eau, que Polanski associe à la menace, au mal, à la mort. Autant de motifs auxquels on pourrait ajouter la soumission, le mélange d'attraction et de répulsion, l'équivoque entre le bien et le mal et entre le mal (dont une femme est l'instrument sinon l'orchestratrice, héroïne fourbe du film noir) et le sexe.
La question politique dans le film est perçue à partir des écrans de télévision, ce qui met mieux en valeur cette maison isolée. Les retors sont les Américains, laissés hors champ
Le nègre est défini comme un jeune homme pas spécialement candidat aux embrouilles qui, tel un Cary Grant hitchcockien plongé dans un infernal imbroglio avec la mort aux trousses, remonte ses manches et s'accroche. Mais Polanski n'est pas Hitchcock et le personnage ne semble travaillé par aucun passé, aucun traumatisme, aucun désir, pour être tout aussi lisse qu'Adam Lang. De plus, les ressorts dramatiques relèvent davantage de la surprise que du suspens : La révélation que Ruth est un agent secret, l'assassinat de Adam Lang ou celui, final, du nègre.
La première grande scène du film, la confrontation entre Adam et Ruth, n'arrive qu'après une demi-heure de voyages en tous genres. Et ceux-ci vont ensuite continuer à remplir le film : poursuites en voiture, poursuite en bateau, en vélo. On abandonne le personnage du père de la victime en Irak pour la séquence virtuose d'un joli passage de bout de papier de main en main : la technique vient au secours du manque d'implication dans les sentiments.
Jean-Luc Lacuve, le 26 mars 2019.