En Inde, au XVIIe siècle. Hassan, un potier vivant dans le désert persan trouve Selima, une princesse, et l'élève avec son fils Shiraz. Sous son regard bienveillant, ils deviennent amoureux.
La belle Selima est enlevée par des marchands d'esclaves et vendue au prince moghol Khurram qui tombe amoureux d'elle. Cela bouleverse les plans de la courageuse dame Dalia qui rêve de devenir l'impératrice elle-même. Elle organise une rencontre secrète entre Shiraz et Selima. Ils sont surpris par Khurram qui condamne Shiraz à être piétiné par un éléphant.
Dalia se dénonce et Shiraz révèle le médaillon qui signifie la descendance royale de Selima. Selima et Khurram se marient. Selima reçoit le titre de Mumtaz Mahal lorsque Khurram succède au trône en tant qu'empereur Shah Jahan.
Lorsque l'impératrice décède dix-huit ans plus tard, Shah Jahan ordonne qu'un monument soit construit à sa mémoire tel que le monde ne l'a jamais vu. Le dessin choisi par l'empereur est celui de Shiraz qui est maintenant aveugle mais a créé ses "souvenirs en pierre".
Ce récit fictif de l'histoire du Taj Mahal est basé sur des mythes populaires. Les plus célèbres d'entre eux donneront Pukar (Sohrab Modi, 1939) et Mughal-e-Azam (K. Asif, 1960). Mais ce qui manque à Shiraz en termes de précision historique est plus que compensé par ses nombreuses qualités. Le travail photographique d'Emil Schunemann exploite pleinement l'architecture de style moghol et les costumes opulents évoquent la grandeur de l'époque. Pratiquement chaque plan du film est un tour de force scintillant d'une lumière et de textures magnifiques.
Ce flamboyant mélodrame mêlant action, envolées romantiques et scènes à portée ethnographique visait le public occidental de l’époque, friand de mélodrames orientalistes (une condamnation à mort par piétinement d’éléphant). Osten, qui a fait ses gammes sur les reportages d’actualité, cherche néanmoins l’authenticité : il tourne sur place, en éclairages et en décors naturels, avec une distribution exclusivement locale.
Pour garantir une certaine authenticité, les lieux de tournage ont été sélectionnés exempts d'influence architecturale européenne. Les maharajahs les plus riches - ceux de Jaipur, Udaipur et Mysore - ont été convaincu d'ouvrir leurs terrains de chasse, leurs écuries de chameaux et d'éléphants, leurs palais, leurs trésors et leurs armureries, de fournir les anciens costumes, bijoux. Les gardes d'élite princières et des centaines de figurants locaux ont été déployés pour les séquences de foule.
Il s'agit du second volet d'un triptyque produit par l'acteur Himanshu Rai après Le roman de Bouddah (1925) et avant La partie de dés (1929). Les trois films évoquent des thèmes indiens et en particulier les religions de ce pays. Le premier rappelle le bouddhisme en racontant les origines de Gautama Buddha. Le dernier fait référence à l'hindouisme en proposant une variation autour du thème de la partie de dés qui oppose les Pandava aux Kaurava dans le Mahābhārata. Shiraz quant à lui plonge ses racines dans l'Inde musulmane de l'empire moghol.
Dans la version restaurée par le British Film Institute en 2017, Shiraz est accompagné par une nouvelle partition musicale composée par Anoushka Shankar, la fille du musicien Ravi Shankar.
Jean-Luc Lacuve, le 31 mars 2020.