Dans une auberge de Tokyo, en 1936, Kichizo, le propriétaire, remarque la servante Sada Abe, lors d'un incident où elle manie le couteau de cuisine avec dextérité.
Il est attiré vers elle par un puissant désir sexuel, mais, au lieu d'être rapidement satisfait de ses relations, celles-ci ne font qu'aiguillonner son désir, et sa virilité, sans cesse sollicitée par Sada, est encore excitée par la présence des autres femmes de l'auberge : ainsi violera-t-il pratiquement une des servantes, puis une vieille geisha venue agrémenter les "entractes" du couple, et qui meurt sous son violent assaut imprévu : "J'avais l'impression d'embrasser le cadavre de ma mère", dira Kichi après.
Sada n'est d'ailleurs pas en reste, puisqu'elle fait l'amour au début avec un vieux mendiant, au grand scandale des autres servantes - mais elle fréquente aussi un notable impuissant et masochiste lorsqu'elle quitte Kichi, contre sa volonté.
Bientôt, l'emprise sexuelle de Sada est telle qu'elle dépasse très vite les limites "normales" pour satisfaire ses envies et, à plusieurs reprises, elle annonce à Kichi "qu'il va mourir", et feint de l'étrangler pendant l'amour. Au bord de l'épuisement physique total, et alors que Kichizo peut à peine l'honorer de sa virilité poussée à bout, Sada finit par l'étrangler, et coupe ensuite ses attributs virils avec lesquels elle se promènera trois jours durant dans Tokyo
Argos-film dirigé par Anatole Dauman avait déjà distribué en France La pendaison puis La cérémonie. Dauman propose à Oshima de produire un film érotique. Oshima accepte même s'il aurait préféré un film pornographique. Ce sera néanmoins le premier film de sexe avec de vrais actes de pénétration au Japon.
Oshima utilise le sexe pour critiquer la société. Le plan où Kichizo va voir Sada et croise l'armée, élevée au rang de symbole par le contrechamp avec des drapeaux, indique qu'aller voir celle qu'il aime est plus important.
Mais c'est aussi une histoire d'amour tragique. L'histoire de Abe Sada est très connue au Japon. En 1936 elle a coupé le pénis de son amant et est partie avec.
Le film devait être tourné secrètement pour échapper à la censure mais Oshima fait des déclarations dans la presse. Le film n'est toutefois pas inquiété durant son tournage car le plateau du studio de Kyoto est considéré comme territoire français et interdit aux journalistes. Toutes les bobines partent de Kyoto et, via Tokyo, sont développées en France au laboratoire LTC tous les trois jours. L'équipe ne verra ainsi jamais les rushes pendant les deux mois du tournage. Cette équipe est dirigée par Kôji Wakamatsu, qu'Oshima a désigné comme producteur exécutif, et qui a réuni son équipe autour de lui sauf le décorateur Jusho Toda.
Cinquante actrices, prises nues en photo, se succèdent pour le rôle et c'est Dauman qui décide d'engager Eiko Matsuda. Le rôle masculin supposait un sexe photogénique et Tatsuya Fuji, acteur de télévision célèbre, accepte un rôle qui avait été refusé par les grands acteurs japonais.
Le film est montré à la quinzaine des réalisateurs à Cannes. Il est saisi à la douane à Tokyo, dès son retour sur le sol japonais. Il sortira dans une version censurée avec des caches noirs. Le film sera attaqué par la censure lorsque sera publié, un peu plus tard, le scénario accompagné de quelques photos. Oshima sera finalement acquitté de l'accusation d'obscénité mais le film est, encore aujourd'hui, toujours montré au Japon avec les organes génitaux floutés. Le pénis coupé de la fin est toutefois montré en totalité.
Editeur : Arte Editions. Novembre 2009. Full HD 1920x1080
50i / Coul. / Mono / Nouveaux masters restaurés
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Avec L'empire de la passion. Suppléments : Le cinéma érotique "made in Japan" (2003, 15 mn). Sur le tournage, des interviews de Yusuke Narita, Yoichi Sai et Koji Wakamatsu (15 mn), Une interview inédite de l’acteur Tatsuya Fuji (2009, 17 mn), L’histoire du film : de nombreux documents inédits et des interviews exclusives des membres de l’équipe (2003, 38 mn), 6 mn de scènes inédites. Un livret de 44 pages en couleur. |