Prologue : dans un talk-show de la télévision allemande des années 80 Johannes Leinert, hirsute et négligé, vient promouvoir son roman de science-fiction à succès, "La théorie du Tout". Le présentateur se montre incrédule quand Johannes tente de dire que c'est sa thèse, toujours refusée par les autorités académiques, qu'il a mise sous forme romanesque. Face au présentateur ironique, Il se rend ridicule en affirmant que les mondes parallèles existent rendant la réalité moins certaine qu’il n'y paraît. Sous les moqueries du présentateur et du public, Johannes s'enfuit non sans adresser un message à une certaine Karin, l'enjoignant de le retrouver.
12 ans plus tôt. 1962.
Dans les Alpes suisses; Johnny et Susi, âgés d'une dizaine d'années, jouent dans la neige quand un orage les oblige à se réfugier dans la grange d'un chalet de montagne. La porte bloquée par la tempête, ils examinent le fond de la grange et découvrent l'accès à une galerie souterraine. Comme ils allaient sortir, Susi est victime d'un éboulis.
La mère de Johannes, le presse d'accompagner le sévère Dr. Julius Strathen, son directeur de thèse, venu le chercher pour l'accompagner dans un congrès de physique dans les Alpes suisses. Elle espère qu’il sera le premier docteur de la famille et ne répondra pas aux avances de Minna, leur jeune voisine.
Dans le train que les mène dans les Alpes Suisse, Dr. Julius Strathen corrige avec un mépris non dissimulé la thèse de son étudiant, déjà agé de 32 ans. Lors d'un arrêt, monte à bord le professeur Henry Blumberg, un vieil ami de Strathen, avec qui il a fait ses études mais avec qui il est maintenant en froid. Là où Strathen reste sec et sérieux, Blumberg est comique, bedonnant et avenant.
En arrivant à l'hôtel, Strathen a la désagréable surprise de voir que la réservation au nom de son élève n'a pas été prise en compte. Henry Blumberg soudoie le réceptionniste pour qu'il trouve une petite chambre de bonne pour Johannes. Le scientifique iranien qui devait présenter une "théorie révolutionnaire de la mécanique quantique" est retardé, peut-être pour quelques jours mais Strathen décide de rester pour quelques jours de vacances studieuses.
Johannes se promène mais, surpris par l'orage, se réfugie dans une église où arrive bientôt une jeune française qui repart aussitôt. Le soir à l'hôtel, il est surpris de la voir comme la pianiste du trio de jazz qui se produit au dîner. Il la poursuit, la complimente banalement et elle lui révèle qu'elle le connait bien. Elle sait qu'il a failli faire brûler une forêt par imprudence étant plus jeune. Johannes se rapproche de Blumberg et lui fait lire sa thèse dans laquelle celui-ci pressent des potentialités révolutionnaires mais partage aussi l'avis de Strathen de démonstration encore insuffisante.
Le soir à l'hôtel, Blumberg qui a trop bu prend à parti Strathen lui reprochant son rigorisme à tel point qu'il a servi d'antihéros à Ernst Jünger dans un de ses romans et avec lequel il avait pourtant partager la prise de LSD. Irrité, Strathen renvoie à Blumberg à son passé de collaborateur nazi en ayant accepté de débusquer d'éventuelles traces de tradition juive dans une littérature qui serait alors à mettre à l'index. Mort de honte, Blumberg boit jusqu’à la déraison. Il est pris de panique dans l'ascenseur au point d'appuyer sur tous les boutons ;ce qui le conduit au sous-sol dans une galerie souterraine dont le fond du couloir laisse apparaître une boule de pierre, incandescence par moment.
Le lendemain, Johannes est convié par Strathen à le retrouver sur une piste de ski. Il croise Blumberg qui a décidé de quitter de l'hôtel précipitamment. Pourtant, rendu en haut de la piste de ski, Johannes le voit avec Strathen et Karin. Celle-ci s'élançant sur la piste, il tente de la suivre mais, maladroit, se cogne sur des arbres. Il se réveille à l'infirmerie du village où, lui dit-on, Karin l'a fait transporter. Il voit Johnny rendre visite à Susi, respirant difficilement. Il lui demande où il pourra trouver Karin. Sur le chemin ils découvrent Blumberg mort, un liquide noirâtre lui sortant de la tête
Les commissaires interrogent Johannes qui signale seulement avoir vu Blumberg à l'hôtel partir pour la gare. Il part chercher Karin avec l'aide de Johnny qui en échange veut qu'il l'écoute. Il lui raconte l'histoire du tunnel et de l'ascenseur mais Johannes ne l'écoute pas et part dans la chambre de Karin. Elle n'y est pas mais il découvre des lettres écrites racontant sa rencontre avec lui, des photos d’un homme qui lui ressemble et des formules mathématiques semblables aux siennes. Il est interrompu par Blumberg qui semble revenu des morts qui cherche ces documents. Il parvient à s'enfuir. Mais sur le chemin du retour il découvre Johnny mort, la tête maculée d'un liquide noirâtre. Il est de nouveau interrogé par la police.
Dans la nuit, Karin vient le retrouver et ils font l'amour. Au petit matin, elle lui promet qu'il sera célèbre après la publication de sa thèse et qu'il épousera Minna. Elle veut lui apporter la preuve qu'elle connaît tout de sa vie en lui racontant le cauchemar récurrent qu’il vient de faire; sa mère morte dans un éboulis en 1943. Mais Johannes lui révèle que c'est lui qui fut pris sous l'éboulis, pour preuve la photo de sa mère toujours en vie. Karen fuit précipitamment. Au téléphone Minna lui apprend que sa mère est morte.
Johannes tente de retrouver Karin et emprunte l'ascenseur menant à la galerie souterraine; il voit des hommes en chapeau gris passant de l'autre coté d'un tunnel. Alors qu’il s'apprête à le franchir avec Karin, elle sort une arme et le tue mais, pris dans le champ d'action de la porte temporelle, il s'en relève et voit partir Karin.
Il se réveille alors que la police a évacué l'hôtel car les gens se sont plaint de maladie de peau et un gisement d'uranium a été découvert. Johannes s'en étonne car l'uranium n'est que faiblement radioactif. Il rentre chez lui et a la surprise de découvrir sa mère en vie; c'est Minna qui s'est noyée.
Un épilogue raconte la suite de la vie de Johannes. Il ne devient jamais docteur car Strathen déjà sceptique sur la qualité de travaux ne peut admettre qu'en pleine soutenance il fasse allusion à leur expérience commune dans les Alpes suisses qui serait la preuve de sa théorbe l'uranium et l'orage violent en altitude créant des interférences de temps Johannes vit alors avec sa mère, connaît le succès avec son roman retourne dans les Alpes suisse où il revoit Susi, grandie, qu'il épouse. Son livre est adapté en film avec happy-end mais c’est un échec. Obsédé par Karin, Johannes néglige sa famille et Susi le quitte. Il reste seul, oublié, maudit, percevant une fois la mélodie de Karin sur son magnétophone.
Johannes Leinert a 32 ans et prépare un doctorat en physique. C'est un héros romanesque, génie et idiot à la fois, convaincu d’avoir rêvé sa grande idée de la physique, et de n’avoir plus qu’à la mettre en œuvre.
Thème classique du récit initiatique d'un prodige scientifique familier de tant de films. Karin Hönig en sait beaucoup plus sur lui qu’il n’en apprendra jamais sur lui-même. Tout cela reste caché derrière la façade de mystérieuse pianiste, de femme fatale. Le professeur Julius Strathen, le directeur de thèse de Johannes est un strict pragmatique, avec pour devise « tais-toi et calcule» (une citation qui est faussement attribuée au physicien Richard Feynman). Bien que tout les oppose, le professeur Henry Blumberg est un vieil ami de Strathen, avec qui il a fait ses études. Là où Strathen reste sec et sérieux, Blumberg est une figure dionysiaque,personnage comique bedonnant, avenant mais aussi parfois repoussant.
Le film laisse envisager plusieurs versions d’une seule et même histoire mais devient tragique car Johannes n'a qu'une histoire et d'autres décisions, expériences et réalités lui resteront à jamais inaccessibles. Pour lui, Karin est un fantôme venu d’un autre monde. Mais c'est bien plutôt lui qui est le fantôme, un mort-vivant, un faux revenant. Derrière la notion de destin se cache aussi la possibilité que nous évoluons dans un univers chaotique, où les notions de bien et de mal n’existeraient que dans nos significations humaines.
Le film fait référence à Hugh Everett, le physicien et mathématicien américain, dont la thèse de doctorat de 1957 constitue la base du concept du multivers actuel. On dit que le travail d’Everett a été montré à Niels Bohr (l’un des créateurs de la théorie quantique), qui contredisait directement son “interprétation de Copenhague” de la mécanique quantique, et Bohr ne voulait rien avoir à faire avec cela. Le modèle d’Everett supposait une réalité distincte pour chaque résultat possible d’un événement physique. Le “chat de Schrödinger” était une tentative de transposer les problèmes de mécanique quantique à l’échelle macrocosmique. Même après Everett, le chat de Schrödinger ne reste ni mort ni vivant. Car selon Everett, chaque résultat possible de l’expérience produit sa propre branche de réalité, son propre univers. En transposant aux biographies humaines, alors chaque décision, grande ou petite, que nous prenons, et chaque contingence qui nous arrive donne également naissance à un monde nouveau et alternatif.
Dans Matrix (1999), il n’y a pas d’échappatoire au système dans lequel notre temps et notre énergie sont lentement exploités par une race de cyber-entités supérieures. Et si nous parvenons à nous réveiller de ce cauchemar, ce qui nous attend est un monde brunâtre dans lequel nous sommes persécutés et condamnés à passer notre vie. Matrix, à bien des égards, fait mouche dans bien des existences modernes, et cela lui donne un poids qui a balayé toutes les utopies légitimes (comme l’humanisme joyeux de la série Star Trek). Comme le disait Mark Fisher (auteur incontournable dans le domaine de la critique sociale et culturelle), il est aujourd’hui plus facile d’imaginer la fin du monde que la fin du capitalisme. Nos refuges restent le cinéma, les séries télévisées et surtout les jeux vidéo. Alors que notre marge d’action dans le monde réel semble devenir de plus en plus limitée, nous nous trouvons capables de presque tout, dans les mondes et les histoires virtuels. Ce genre de détresse mentale, si nous pouvons l’exprimer de manière dramatique, trouve alors une expression adéquate dans la métaphore des multivers, qui a fait surface dans la franchise Marvel il y a des années. Cette expression est également “post-ironique”, soulageant notre unique vie (car fondamentalement, nous n’avons toujours qu’une vie à vivre) du fardeau de vivre la meilleure vie possible. Je pense également que depuis notre entrée dans le postmodernisme - avec sa culture de la citation, de la copie, du collage - on a l’impression que presque tout a déjà été dit et fait. Nous ressentons donc le besoin de nous déplacer ailleurs, comme si les écarts entre les mondes contenaient encore ce que nous recherchons tous : une sorte de sens, de connexion ou d’accomplissement
L’INTERPRÉTATION DE COPENHAGUE Il s’agit de l’interprétation standard de la mécanique quantique, essentiellement mise en forme par Niels Bohr en 1927 à partir des résultats obtenus par Werner Heisenberg et Max Born, quant à l’interprétation de la mécanique matricielle de Born-Heisenberg-Jordan et celle, ondulatoire, de De Broglie-Schrödinger. Elle est basée sur le principe de complémentarité de Bohr. Ce principe tire son inspiration de l’exemple de la théorie de la relativité, dans lequel la solution des contradictions de la mécanique newtonienne avec l’électromagnétisme de Maxwell a consisté à remettre en cause l’existence d’un temps absolu et d’une existence indépendante de l’espace et du temps. De la non-mesure d’un mouvement absolu et de l’existence d’une vitesse limite pour tous les signaux causaux dans l’univers, on en déduisait la vacuité du concept de mouvement absolu, et une fusion de l’espace et du temps en la géométrie de l’espace-temps de Minkowski.
LE CHAT DE SCHRÖDINGER Une expérience de pensée imaginée en 1935 par le physicien Erwin Schrödinger afin de mettre en évidence des lacunes supposées de l’interprétation de Copenhague de la physique quantique, et particulièrement mettre en évidence le problème de la mesure. Selon la mécanique quantique, deux réalités contradictoires peuvent exister en même temps : un atome intact et désintégré à la fois, un chat mort et vivant à la fois. C’est comme si l’univers se divisait en deux lorsque l’on ouvre la boîte : d’un côté, le chat est vivant, et de l’autre son sosie est mort