Accueil Fonctionnement Mise en scène Réalisateurs Histoires du cinéma Ethétique Les genres Les thèmes Palmarès Beaux-arts

Ce que cette nature te dit

2025

(Geu jayeoni nege mworago hani). Avec : Ha Seong-guk (Ha Dong-hwa), Kwon Hae-hyo (Kim Oh-yeong), Cho Yun-hee (Choi Sun-hee), Kang So-yi (Kim Jun-hee), Park Mi-so (Kim Neung-hee). 1h48.

1 - Venant de Séoul, Ha Dong-hwa, un jeune poète, dépose sa petite amie, Kim Jun-hee chez ses parents à Yeoju. Il est étonné par la taille de la maison. Jun-hee lui explique que son père en a dessiné les plans et l'a fait construire pour sa mère âgée, atteinte d'un cancer. Depuis que celle-ci est morte, il l'occupe avec sa femme. Jun-hee lui propose de jeter un œil rapide sur la maison mais à peine entré sur le parking, ils croisent son père, Oh-yeong, qui s'enquiert de l'identité du jeune homme. Il est le fils d'un avocat célèbre. Oh-yeong ne cesse de complimenter Dong-hwa sur le choix de sa voiture, un vieux modèle Kia de 1996, supposé très recherché. Il demande à faire un tour avec, ce que Dong-hwa ne peut lui refuser. Jun-hee l'invite à rester un peu plus, ainsi les présentations familiales seront faites. Elle l'avertit toutefois que sa sœur est à la maison et qu'elle sort à peine d'une longue dépression.

2 - Jun-hee sert du thé à Dong-hwa et lui dit que son père appelle sans doute sa femme, Sun-hee, pour l'avertir qu'ils dîneront à la maison. Dong-hwa est d'accord. Il entend la sœur de Jun-hee jouer du gayageum, dont elle apprend les bases depuis à peine deux mois. Oh-yeong offre deux paquets de cigarettes à Dong-hwa et l'invite à venir discuter dehors. Jun-hee, de son côté félicite Neung-hee de son jeu de gayageum. Entre visite aux chiens et aux poules, Dong-hwa explique qu'il n'a pour l'instant été seulement publié dans un magazine. La mère de Jun-hee écrit aussi des poèmes que son mari a encadré dans l'entrée. Elle a fait du théâtre avant de se marier et d'avoir des enfants. Oh-yeong le félicite de sa légère barbe, très nette, qui s'accorde bien à l'idée qu'il se fait d'un poète.

Neung-hee se demande si la visite du fiancé de sa sœur est formelle puisqu'elle le connaît depuis trois ans déjà et envisageait de se marier avec lui. C'est toujours le cas répond Jun-hee mais ils vivent au jour le jour et ne sont pas prêts. Mais qui est jamais prêt, répond sa soeur.

Dong-hwa  s'incline devant l'arbre mémorial dressé pour la  mère de Oh-yeong. Celui ci s'enquiert de savoir si son hôte aime le beaksuck et va chercher du makgeolli dans une remise.

3 - Ils discutent de Jun-hee qui n'a jamais posé problème à ses parents. Il venait là avec sa mère et aime le coucher de soleil. Dong-hwa admire le paysage et sort ses lunettes, qui lui vont bien, apprécie Oh-yeong. Dong-hwa explique qu'il s'en est longtemps passé, aimant la vision flou que générait sa myopie. Il  écrit quelques notes sur la piété filiale. Exalté par la deuxième bouteille de makgeolli, Oh-yeong explqiue que l'amour filial est la plus pure expression de l'amour. Il propose que  Dong-hwa, Jun-hee et Neung-hee  aillent déjeuner tous les trois en attendant le retour de la mère à 18h00 vers Shilleuksa ou the Sejong The great tomb.

Dong-hwa a trop bu pour conduire et donne des indications à Jun-hee avant d'embarquer Neung-hee avec eux.

4 - Ils arrivent au restaurant où la nourriture est bonne et Dong-hwa mange de bon appétit. Jun-hee lui demande de se restreindre au vu du repas du soir. Son père aura probablement préparé du beaksuck. Neung-hee le félicite pour sa moustache. Dong-hwa rappelle que ce sont les occidentaux qui ont imposé un visage imberbe. Il gagne sa vie en filmant des mariages. Elle veut aussi savoir ce qu'il aime chez sa sœur. Il répète qu'elle est un ange et si, au début de leur relation, une dizaine de points de désaccord les séparaient, ils ne sont plus aujourd'hui que de deux ou trois et vont s'effaçant. Ce que confirme Jun-hee. Neung-hee est surprise car sa sœur a toujours été , peu encline au compromis. Extrêmement décidée au point de faire renvoyer sur le champ par son père un prétendant, frappé par sa beauté lors d'un concours de danse, lorsqu'il se présenta à son domicile. Dong-hwa fume une cigarette en compagnie de Jun-hee attendant  Neung-hee, partie aux toilettes.

5 - Sur le bord du lac, Dong-hwa se dit content de sa conversation avec Neung-hee qui les a rapprochés comme frère et sœur. Jun-hee lui confirme que sa sœur fut autrefois très joyeuse et brillante. Elle parle japonais, chinois et anglais. Neung-hee, revenue de passer de nouvelle serviettes pour protéger son pantalon blanc du sang menstruel, ilss regardent tous trois une première pagode. Mais seul Dong-hwa en apprécie la simplicité et s'éloigne pour prendre des notes. Neung-hee interroge sa sœur sur l'aspect introverti de son fiancé.  Jun-hee répond qu'il aime la méditation, ce qui n'en fait pas un fainéant pour autant, refusant l'argent que pourrait lui donner son père. Ce qui l'intéresse, c'est de poursuivre la beauté sa vie entière. Neung-hee rappelle que la poésie ne pourrait être qu'un hobby, ainsi que la pratique leur mère.

6 - Dong-hwa discute avec Jun-hee devant un grand ginkgo. Il s'enthousiasme sur la nature; elle incite à méditer sur l'éclosion d'une graine et ce qu'elle devient ensuite. Bien sur, on a besoin de connaissances pour vivre dans le monde. Mais que sait-on vraiment ? Sait-on pourquoi nous sommes nés. De la naissance à la mort, les choses arrivent tout simplement, on ne sait pas le pourquoi. Aussi ardemment qu'on tente d'en percer le mystère, on ne sait rien. Il convient de juste sentir les choses profondément et en être reconnaissant. Jun-hee lui demande d'être moins affirmatif : croit-il détenir la vérité ? Ses propos ne seraient-ils pas un renoncement à comprendre ?

Neung-hee, qui s'était éloigné près du pavillon d'entrée, offre un carnet pour prendre des notes à Dong-hwa. Les stupas du temple proviennent d'un autre endroit et on ne connaît pas les noms auxquels ils rendent hommage s'étonne Dong-hwa. Le monument existe toujours alors qu'on ne sait plus à qui il rend hommage. Jun-hee avance que cela le rend plus universel. La mort donne du sens à l'existence. Le père téléphone indiquant que sa femme est rentrée et qui pourraient venir dès 17h30 ou 18h00.

7 - La famille mange le copieux cheonggye préparé par Sun-hee. Celle-ci rappelle qu'elle fait partie du cercle littéraire de la ville. La conversation dérive sur le maison, comment Dong-hwa s'est incliné sur la tombe; puis pour son père qui passe souvent à la télé et dont il est devenu indépendant depuis 3 ans. Il a une sœur aînée et une plus jeune. Ils ne veulent pas rater le coucher de soleil à 19h40, dans une demi-heure. Ils décident d'y aller et il se promettent de retourner pour voir la lune qui plaît encore plus à  Jun-hee.

8 - Au retour, la conversation tourne autour de la vieille voiture de Dong-hwa. La mère, Sun-hee, aimerait qu'il en achète une neuve, plus sûre. Neung-hee sous-entend que son père pourrait la lui payer. Jun-hee soutient sa vie sans excès. Sun-hee n'approuve pas de vivre avec le strict minimum. la mère demande pourquoi tant de gens travaillent si dur. La sœur, Neung-hee, en rajoute sur le père, possible recours financier alors que Sun-hee le trouve beau. Interrogé Dong-hwa dit écrire quand il est empli d'émotion devant une chose étrange ainsi quand il s'est agenouillé devant l'arbre mémorial ou lorsqu'il regarde le grand ginkgo et qu'il établit une connexion entre les deux arbres. Ilse dit prêt à reciter l'un de ses poèmes; ce quil fait difficilement dans les brumes de l'alcool : "Les fleurs éclosent, elles éclosent la nuit. Quand les fleurs éclosent, tout s'illumine. Ce n'est pas effrayant. Les fleurs éclosent, elles éclosent la nuit. Quand les fleurs éclosent, tout s'illumine. Et ce n'est pas effrayant". Comme la sœur trouve ça court, il lui demande comment elle peut savoir ce qu'il ressent et lui reproche d'avoir dit que son père est derrière lui, chanceux qu'il soit là, comme un gosse de riche. Ivre, il s'écroule sur la table et Jun-hee doit le conduire au lit sous le regard consterné de la famille.

Plus tard dans la nuit, Sun-hee et Oh-yeong, guitare à la main, discutent. Pour le père, seulment un sur mille de ceux quise prétendent poète parviennent à en vivre. Il doute que ce puisse être Dong-hwa. Sun-hee approuve, trouvant sa technique défaillante. A la terntaine, il devrait avoir trouvé sa voie. Il suit une voie trop extrême. Sun-hee pense qu'il n'a jamais rencontré de vraies difficultés. Oh-yeong le pense prétentieux et poseur de se croire poètealors quil est vraisemblablement destiné à vivre aux crochets de son père. Il ne s'est pas assez battu pour être poète. Il n'est pas digne de leur fille, même sils reconnaissent que c'est à elle de prendre sa décision. Oh-yeong, suspecte que sous ses aspects calmes, il fait peut-être preuve de performances sexuelless. Tosu deux concluent que le fils n'a aucune qualité du père

Dong-hwa s'est réveillé, seul dans un lit, la nuit. Muni d'une faible lampe, il emprunte le peit chemin de terre pour regarder les fleurs et grimper sur la montagne jusqu'au banc voir la lune. Il semble faire une chute en rentrant.

Au matin, il s'apprête à partir. Jun-hee lui dit au revoir. Il lui explique son escapade dans la nuit sur la montagne sans réveiller personne. Il lui demande de prévenir ses parents qu'il a été appelé d'urgence à Séoul.

En panne au carrefour de Yeogang, il appelle un garagiste. Il pense qu'il est peut-être temps de vendre sa voiture.

Il s'agit d'un portrait ironique de Hong Sang-soo qui se moque de ses méthodes de tournage tout en exaltant la poésie frémissante de son art. C'est un conte triste sur la fin de la post-adolescence d'un jeune homme qui voudrait vivre de presque rien et qui est rattrapé par le regard des autres, la naïveté qui le maintient dans une poésie purement sensorielle et, finalement, la panne de sa voiture.

Il n'est probablement pas innocent que la Kia d'occasion de Dong-hwa date de 1996, soit l'année du premier film de Hong : Le jour où le cochon est tombé dans le puits, il y a près de trente ans. Même si Hong est passé au numérique, il reste fidèle à ses méthodes de cinéma légères, en longs plans fixes avec tout au plus un zoom mais sans champ-contrechamp et sans éclairages artificiels.

Il fait ici l'éloge du poète n'ayant besoin de presque rien et surtout pas d'une belle-famille qu'il a réussi à éviter depuis trois ans et qui voit surtout en lui le fils d'un avocat célèbre. Le père, la mère et la soeur cherchent assez naturellement à savoir si son talent permettra à leur fille de vivre confortablement. Cette belle famille a de nombreux talents : le père joue de la guitare, la mère est poète à ses heures et la sœur parle trois langues tout en m'initiant au du gayageum. Mais l'ensemble ne constitue pour eux que des hobby alors que Dong-hwa est pleinement imprégné des sensations qu'il ressent et dont tend à rendre compte sa poésie. C'est ce qu'il explique au chapitre six lorsqu'il discute avec Jun-hee devant le ginkgo, vieux de 600 ans et né d'une simple graine. De la naissance à la mort, les choses arrivent tout simplement, on n'en sait pas le pourquoi. Aussi ardemment qu'on tente d'en percer le mystère, on ne sait rien. Il convient de juste sentir les choses profondément et en être reconnaissant. 

Jean-Luc Lacuve, le 26 décembre 2025

Retour