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Morceaux de conversations avec Jean-Luc Godard

2007

Voir : photogrammes
Genre : Documentaire

Avec : Jean-Luc Godard, Dominique Païni, Jean Narboni, Anne-Marie Miéville, Christophe Kantcheff, André S. Labarthe, Jean-Marie Straub, Danièle Huillet. 2h05.

Godard et André S. Labarthe discutent devant des étudiants du Fresnoy, Godard parle du rôle du cinéma, de ce qu'il peut apprendre aux gens, de ce qui le distingue de la télé réalité et développe son rapport à la science. Godard assiste à la présentation de son travail par Jean-Marie Straub. Danielle Huillet est dans la salle.

En janvier 2005, Jean-Luc Godard fait évoluer son projet en direction d'une exposition. Le Fresnoy devient coproducteur d'un film où l'on verra Godard au travail avec différents interlocuteurs choisis par lui. A Rolle, Dominique Païni est confiant : six salles sur neuf sont déjà prêtes. Il pense à une salle de cinéma au centre de l'exposition. Discussion à trois avec Anne-Marie Mieville sur Vrai faux passeport. Pourquoi Godard attribue-t-il un malus à tel plan avec Ava Gardner à tel autre de Sulaiman ou de Chantal Akerman, discussion autour de la théâtralité juste d'une petite fille dans un théâtre de la guerre ou de la représentation de la pauvreté.

Avec Jean Narboni, Godard discute du suicide ; celui qu'il envisagerait pour lui, de celui de Kirilov dans la Chinoise et la mort de l'Israélienne Olga russe d'origine française dans Notre musique. Dans For ever Mozart il citait aussi la phrase de Camus : le suicide est le seul problème philosophique vraiment sérieux. Jean Narboni fait part de ses doutes sur l'action terroriste la prise d'otage de Moscou au nom de la paix. Discussion sur la spécificité du peuple juif, sa différence ou non avec les Palestiniens

Retour au Fresnoy pour une visite par Godard de l'exposition de jeunes artistes. Maxime Thieffine avec qu'avec ses surimpressions, superpositions et incrustations, il superpose le champ et le contre champ afin de modifier la perception bien plus radicalement qu'au cinéma. On ne sait plus si on est face à face avec l'image ou derrière ou dedans. Les non-lieux d'espaces en Europe filmés par Anna Katharina Scheidegger qui interroge aussi la question de l'absence avec des questions écrites par SMS. Godard loue l'ingéniosité et habileté technique mais reproche le manque d'interrogation dont ils font preuve vis à vis du monde. Il regrette que l'histoire soit déjà toute là dans el dispositif. Ce sont des installations autonomes qui peuvent fonctionner sans le spectateur et sans mot fin. Pour Labarthe, c'est un retour à Edison avec un cinéma en boucle. Godard revendique la nécessité de filmer avec le sentiment de la première fois ou, aujourd'hui pour lui de la dernière fois. Ce Comprendre et ressentir s'oppose à la pure jouissance de l'électronique, des lettres de l'eau. Le dispositif parait un peu gratuit et ne dit pas d'où il vient. Il marque comme une haine, une méfiance, une peur du réel. Godard aurait aimé quelque chose qui expliquerait "c'est comme ça que le Fresnoy fonctionne". Là, le dispositif esquive le rapport au réel, il n'y a que des moments qui sont réussis où l'on voit du réel. Apres des rapprochements avec les différences en peinture, Bougereau contre Goya, Godard s'amuse avec les noms différents dont on désigne les copies standards à l'étranger : maried print, answer print, nul copie, copie campione. Il rappelle que le tube cathodique s'appelait l'iconoscope pour son concepteur aujourd'hui on n'a plus que des petites icônes d'ordinateur qui marquent aussi une forme de présence du religieux

Avec Jean Narboni, il explique les différences entre les sourires allemands et russes en dessous admiration exaltation contre regards plus personnels pas de regard allemand

En mai 2006, Jean Luc Godard présente au centre Pompidou une exposition sous forme de maquettes, d'écrans vidéo et d'évocations scénographiques, vestiges du projet initial non réalisé. Godard visite l'exposition avec Christophe Kantcheff, responsable des pages culture et critique de cinéma à l'hebdomadaire Politis en commençant par la salle avant-hier avec ses maquettes. D'une jeune fille qui passe avec une caméra numérique, Godard s'étonne qu'elle regarde l'écran avec deux yeux. Avant il fallait un eil dans le viseur au cinéaste comm un pinceau seuelment pour le peintre. Visites des salles hier et aujourd'hui. Godard dédaigne les critiques, même Scorsese qui s'affirme sur les cinéastes dans ses histoires du cinéma américain et italien. Godard affirme sa proximité avec les gens peut être connus mais pas reconnus comme le mathématicien Gallois mort a 22 ans ou Abel qui fit le voyage de Suède et ne fut pas même reçu à l'Académie des sciences pour ses résolutions des équations du troisième degré. C'est un ami, dit Godard au bord des larmes.

A partir d'octobre 2004, Jean-Luc Godard en dialogue avec Dominique Païni travaille à un projet de neuf films destinés au centre Pompidou et originellement intitulés Collage(s) de France. Le Fresnoy devient coproducteur en vu d'un échange entre ses étudiants certains de ses professeurs. Il s'agit déjà là du résultat d'un long processus dont la matière initiale était celle du cours que le cinéaste avait proposé au Collège de France et que cette prestigieuse institution avait refusé. La riposte de Jean-Luc Godard aurait ainsi constitué un regard critique sur le cinéma, la télévision et l'audiovisuel en général avec, on peut le supposer, une forte coloration polémique et politique. De cette production, Le Fresnoy-Studio national était partenaire, et la collaboration devait donner lieu à de nombreux échanges entre Jean-Luc Godard, les étudiants et diverses personnalités, choisies d'un commun accord.

Accompagné dans sa démarche par Dominique Païni, directeur du Développement culturel au Centre Pompidou, Jean-Luc Godard est passé, à partir de janvier 2005, du projet de neuf films à celui d'une exposition où le cinéma serait exposé et déployé dans les espaces d'un musée, selon un dispositif et une scénographie proches de ceux de l'art contemporain. D'abord pensé comme une simple salle de projection par Dominique Païni, le projet a pris la forme d'installations, projections, écrans plats, textes, éléments de décor et pièces de mobilier, ainsi que la présence de quelques œuvres de peinture empruntées aux collections du Musée National d'Art Moderne. Pour suivre désormais un travail qui n'était plus celui, traditionnel, du tournage et de la post-production de films de cinéma, Jean-Luc Godard a proposé au Fresnoy, c'est à dire à son directeur, le cinéaste Alain Fleischer de se rendre chez lui à Rolle, pour le voir au travail parmi ses installations techniques, comme on va filmer un peintre dans son atelier.

En avril 2006, Jean-Luc Godard présentait au Centre Pompidou une exposition qui était le vestige de celle proposée initialement avec Dominqiue Paini puisque le cinéaste avait décidé de rompre avec son héroïque commissaire pour affirmer pleinement son geste artistique.

Des propos de Godard avec les étudiants on pourra retenir "Le cinéma c'est ce qu'on ne peut pas voir autrement que par la caméra. Comme l'infiniment petit ne peut être vu qu'avec un microscope et les étoiles ne peuvent être vraiment vues qu'avec un télescope, le cinéma nous montre dans notre univers de l'infini moyen des choses, des animaux qu'on n'a pas vus". Ou bien encore : "Quand un garçon et une fille parlent, ce n'est pas ce qu'ils se disent qui est important. Chercher l'endroit unique où quelque chose se forme, ensuite suivre cet embryon. Montrer à sa bonne amie une photo d'elle qu'elle n'a jamais vue. Quand je te dis, "je t'aime", je suis comme ça ? Aujourd'hui on écrit tout de suite "et il dit, je t'aime", il n'y a pas besoin de caméra pour ça ! Et Godard d'insister à partir d'un essai vidéo qui lui a été montré" L'apparition d'une poule puis du gros œil d'une poule intéressant mais on ne sait pas ce qu'elle devient cette poule ?

Le but de son cinéma était de "filmer des garçons et des filles dans le monde réel et qui, voyant le film, sont étonnés d'être eux-mêmes et au monde". Dans la télé réalité, les acteurs ne pas étonnés d'être au monde et pas étonnés d'être eux-mêmes parce qu'absolument sur d'être eux-mêmes. Or la caméra n'est pas une certitude, c'est un doute. Le cinéma naît en même temps que la physique quantique et son principe d'incertitude.

Godard refuse la perche tendue par André S. Labarthe comme quoi le cinéma moderne serait celui de l'incertitude contre celui de la certitude, représenté par les studios. Godard défend l'ensemble du cinéma y compris celui des studios, de Zanuck et de la Universal des années 40. Il prend pour exemple le dialogue entre Ulmer et son producteur qui ne laissa à celui-ci seulement un garçon, une fille et une voiture, mais Ulmer en fit Détour dans sa volonté de faire quelque chose de bien contre le patron.

Jean Narboni pousse Godard sur un passage de Notre musique. Il y dit qu'en 1948 Le peuple juif marche dans l'eau, vers la terre promise et rejoint la fiction alors que Le peuple palestinien marche dans l'eau vers la noyade et rejoint le documentaire. Godard répond assez évasivement que la Palestine c'est la fiction des israéliens depuis les temps bibliques, qu'il travaille sur le champ contrechamp, qu'ils sont complémentaires et que l'important est de faire du mouvement, si possible pas trop faux. "Quand je ne sais pas quoi dire, c'est là que j'ai envie de parler" ajoute-t-il.. "Qu'est ce qu'être juif ?" Il ne le sait pas et a envie d'en parler. Jean Narboni lui suggère le premier titre prévu par Faulkner pour Les palmiers sauvages,"Si je t'oublie Jérusalem".

L'image d'Ici et ailleurs avec la succession des portraits d'Hitler et de Golda Mair. Ça reste rugueux pour Narboni, "non il n'y a rien à changer" dit Godard. "Hitler a prononcé une fois le mot Palestine" ajoute-t-il. Un texte en arabe sur un corps carbonisé ça fait analogie ça fait métaphore" réplique Narboni "chacun le prend pour lui. L'objectivité vient de la relation entre les images. Au contraire les images sont complètement subjectives" rétorque Godard "Tu induis par ton montage, il y une incitation" conclut Narboni pas plus convaincu par cette explication que par celle de Deleuze. Celui-ci dans l'Image temps s'évertue à prouver comme quoi dans ce cas le montage chez Godard au lieu de rapprocher, scinde et différencie.

 

Test du DVD

Editeur : Montparnasse, février 2010. Coffret 4DVD.

DVD 1 : Morceaux de conversations avec Jean-Luc Godard. DVD 2 à 4 : Ensemble et séparés- Sept rendez-vous avec Jean-Luc Godard. Entretiens avec Dominique Païni, André S. Labarthe , Jean Douchet, Jean-Michel Frodon, Jean-Claude Conesa, Nicole Brenez et Jean Narboni. Durée du film 1h58, durée totale : 9h30. 40 €.

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