En 1986, le rondouillard Richard Jewell travaille comme commis aux fournitures dans un cabinet d'avocats. Il rencontre Watson Bryant, le seul qui manifeste un peu d'intérêt pour son comportement observateur et ne se moque pas de lui. Richard Jewell quitte le cabinet pour être gardien de sécurité au Piedmont College, dans l'espoir de travailler enfin pour l'ordre et la sécurité. Il est toutefois contraint à la démission après plusieurs plaintes pour zèle excessif. Jewell emménage avec sa mère Bobi à Atlanta. À l'été 1996, il travaille comme gardien de sécurité aux Jeux olympiques, surveillant le parc du Centenaire de la ville.
Au petit matin du 27 juillet 1996, après avoir chassé des fêtards ivres lors d'un concert de Jack Mack et Heart Attack, Jewell remarque un colis suspect sous un banc. Prévenant aussitôt la police, il organise lui-même les premières mesures d'évacuation et d'éloignement alors qu'un expert en explosifs confirme que le sac contient une bombe. L'équipe de sécurité, y compris des policiers, l'agent du FBI Tom Shaw et l'ami de Jewell, Dave Dutchess, viennent alors à sa rescousse et éloigne les participants aux concerts en sauvant ainsi des vies. La chaine CNN et les autres medias font aussitôt de Jewell un héros.
Trois jours plus tard, le FBI n'a toujours pas trouvé l'auteur de l'attentat et se rabat sur Jewell. En tant qu'officier de police blanc, "en herbe", il correspond au profil des auteurs de crimes similaires, qui recherchent la gloire et l'attention en sauvant des gens d'une situation dangereuse qu'ils ont eux-mêmes causée.
Tom Shaw est approché par la journaliste Kathy Scruggs de The Atlanta Journal Constitution. En échange d'une faveur sexuelle, Shaw révèle que Jewell est soupçonné par le FBI. Le journal publie la révélation de Scruggs en première page, révélant l'intérêt du FBI pour Jewell en tant que suspect potentiel. Scruggs insiste particulièrement sur le physique de Jewell, le fait qu'il vit avec sa mère et ses antécédents professionnels. L'histoire devient rapidement une nouvelle internationale.
Jewell, initialement inconscient du changement dans la perception du public, est attiré par le bureau du FBI. Il coopère d'abord mais refuse de signer la reconnaissance qu'il a lu ses droits Miranda. Il téléphone à Watson Bryant pour être défendu. Bryant, désormais avocat indépendant mais un peu désœuvré, accepte d'autant plus volontiers qu'il avait apprécié que Jewell le contacte au moment où il croyait publier un livre dont il aurait été le héros.
Shaw et son partenaire Sam Bennet rendent visite au doyen du Piedmont College, qui renforce leur suspicion à l'égard de Jewell. Le FBI perquisitionne le domicile de Jewell et saisit des biens, y compris un arsenal d'armes à feu. Jewell révèle aussi à Bryant qu'il ne paie pas ses impôts depuis des années et a été arrêté une fois pour avoir outrepassé son autorité. Bryant réprimande Jewell d'être trop servile avec les policiers qui enquêtent sur lui. Jewell admet que son respect inhérent pour l'autorité fait que cela lui est difficile même lorsque les autorités essaient de le détruire.
Jewell et Bryant affrontent Scruggs, exigeant une rétractation et des excuses, mais elle s'en tient à son reportage. Toujours pas complètement convaincu de l'innocence de Jewell, Bryant et sa secrétaire Nadya, qui l'aime depuis longtemps, calculent la distance entre la cabine téléphonique et le site de la bombe, concluant qu'il est impossible pour quelqu'un de téléphoner de là après avoir découvert la bombe au moment center du parc. Scruggs et Shaw sont arrivés à la même conclusion, et le FBI change sa vision du crime pour inclure Dutchess qui serait le complice homosexuel de Jewell
Bryant organise un test de vérité polygraphique que Jewell réussit, levant le doute de Bryant sur son innocence. Bobi tient une conférence de presse et plaide pour la fin de l'enquête afin qu'elle et son fils puissent reprendre leur vie en main. Jewell et Bryant rencontrent Shaw et Bennet au bureau du FBI, et après quelques questions non pertinentes, Jewell se rend compte qu'ils n'ont aucune trace de preuves contre lui. Quand il demande ostensiblement s'ils sont prêts à l'accuser, leur silence le convainc de partir, ayant finalement perdu son respect pour les policiers.
Quatre-vingt-huit jours après avoir été suspecté, désigné comme "personne d'intérêt", Jewell est informé par une lettre officielle qu'il ne fait plus l'objet d'une enquête.
En avril 2005, Jewell, maintenant officier de police à Luthersville, en Géorgie, reçoit la visite de Bryant qui lui dit qu'Eric Rudolph a avoué l'attentat à la bombe du Centennial Olympic Park.
Un carton en forme d'épilogue informe que deux ans plus tard, le 29 août 2007, Jewell décède à l'âge de 44 ans de complications du diabète et de l'insuffisance cardiaque.
La volonté d'Eastwood de montrer que l'état et le journalisme peuvent broyer un individu est amoindrie par le fait que les deux représentants de ces "oppresseurs" : l'agent du FBI Tom Shaw et la journaliste Kathy Scruggs sont des vilains, dévalorisés dès le départ. Le premier a commis une faute professionnelle (il a échangé le nom d'un suspect pour une faveur sexuelle) qui le conduit à charger coûte que coûte le malheureux Richard Jewell pour transformer en vérité ce qui n'était que piste possible. La seconde est une mauvaise journaliste. Elle ne sait pas écrire et confie cette tache à un acolyte. C'est en revanche une redoutable enquiquineuse habituée à ce que rien ne résiste à son charme agressif. La règle hitchcockienne qui veut qu'un film soit réussi si les méchants le sont n'est ainsi pas respectée.
Les bons sont plus intéressants mais peu empathiques. Richard Jewell est un enfant obsessionnel de la sécurité, qu'il voudrait servir, mais qu'il ne fait que contrecarrer en importunant étudiants du campus et automobilistes de passage. Watson Bryant, en short et en tongs, possède la dégaine sympathique d'Humphrey Bogart. Il est affublé d'une charmante secrétaire qu'il finira par épouser. L'émotion est ainsi dévolue à la mère de Richard, Bobi, notamment dans son bouleversant discours face à la presse.
Formellement, l'élément le plus notable est le montage alterné entre les secondes qui défilent au chronomètre de la finale du 400 mètres et celles égrainées par Watson et sa secrétaire en reconstituant l'impossible parcours de Jewell du centre du parc aux cabines téléphoniques. Il est toutefois difficile d'être ému par le rapport entre la victoire de Michael Johnson sur 400 mètres que l'Américain a couru dans son style caractéristique, très raide, et ce parcours qui innocente Jewell. Au mieux y voit-on la recommandation hitchcockienne d'utiliser à fond le décor de l'intrigue. Eastwood a ainsi tenu à tourner à Atlanta et inclut les désormais mauvaises images télévisées de la cérémonie d’ouverture.
Reste l'amitié entre l'avocat et Richard qui partagent intelligence et humour même si leurs comportements et valeurs de départ sont très différents. Watson sait protéger Richard comme un enfant resté trop naïf et idéaliste pour se rendre compte qu’il doit sauver sa peau... mais qui apprendra. Ainsi, au piège mortifère de la caméra des agents du FBI, enregistrant dans l'ombre ce qu'ils espèrent être une renonciation à ses droits, puis au piège de l'enregistrement de la voix au téléphone dans lequel Richard doit répéter une phrase annonçant l'attentat à la bombe succède la belle séquence, en pleine lumière, où Richard dit leur quatre vérités aux agents du FBI. Watson n'a plus qu'à acquiescer.
Jean-Luc Lacuve, le 29 février 2020.
Le cas Richard Jewell a été écrit d’après l’article “American Nightmare : The Ballad of Richard Jewell” de la journaliste Marie Brenner publié en février 1997 dans Vanity Fair, et le roman “The Suspect” de Kent Alexander et Kevin Salwen.