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Mon âme par toi guérie

2013

Avec : Grégory Gadebois (Frédi), Céline Sallette (Nina), Jean-Pierre Darroussin (Le père), Marie Payen (Josiane), Philippe Rebbot (Nanar), Mélody Soudier (Lucie). 2h03.

Frédi, un homme corpulent d'une cinquantaine d'années, est élagueur dans le sud de la France. Il habite un mobil-home dans un camping avec d'autres marginaux, notamment Josiane et Nanar et leurs trois jeunes enfants. Frédi va fréquemment voir son père qui habite une baraque non loin de là. Taiseux l'un et l'autre, ils partagent quelques souvenirs et de nombreuses bières. Frédi vient de perdre sa mère. Cette dernière lui a transmis le don de guérir par apposition des mains mais il ne veut pas entendre parler. Il préfère chevaucher sa moto et retrouver ses potes au bar et les écouter parler. Au bar, il ne boit pas d'alcool. Ainsi lorsqu'une nuit la police l'arrête, il peut repartir. Sans doute conduit-il un peu vite mais il ne peut rien pour éviter un gamin surgit de nulle part à la poursuite d'un chien.

Frédi est assailli par un rêve étrange : poursuivi par ses amis en bord de mer et portant sa fille sur le dos. Quand, il se réveille, il a du mal à faire face à sa culpabilité : le gamin qu'il a heurté avec sa moto est plongé dans le coma. Comme si cela ne suffisait pas, son ex-femme lui confie leur fille, Lucie, triste et mal dans sa peau qui somatise sa douleur par des maux d'estomac. Puis, c'est son patron qui apprend qu'il a fait une crise d'épilepsie et qui le renvoie de peur qu'une crise ne le surprenne en haut d'un arbre. Frédi retrouve du travail comme homme à tout faire de la piscine d'un hôtel. Un jour, un homme fait une hémorragie abondante en cabine. Les mains de Frédi, posées sur son ventre, le sauve. Le don qu'il possède devient connu et le patron de l'hôtel lui demande de soigner sa femme, victime depuis longtemps de maux de tête atroces. Frédi pose ses mains... sur son cœur, à l'origine d'après lui de son mal. Il tente aussi, sans succès, de sortir du coma le gamin accidenté mais se heurte à la colère de la mère, en révolte contre les hommes apaisés par leur croyance en Dieu.

Comme forcé par le destin, Frédi accepte son don et en fait profiter ceux qui viennent désormais le voir, notamment une femme accompagnée de sa sœur victime d'un cancer. Dans le mobil-home voisin, c'est le drame : Nanar, son pote, a quitté Josiane pour une jeunette d'une vingtaine d'années et l'a laissée sans le moindre argent pour nourrir leurs trois enfants. Josiane, séduite par l'humanité de Frédi, en tombe amoureuse mais l'abandonne quand Nanar, penaud, rentre au bercail.

Un jour attablé à un café, Frédi croise une jeune femme étrange et fait instantanément une crise d'épilepsie. Il la retrouve plus tard dans un bar s'alcoolisant au champagne. Elle s'appelle Nina. Une troisième fois, il la retrouve et la ramène chez lui. Au matin, alors qu'il reçoit une femme médecin et sa fille leucémique, il comprend que Nina est tourmentée par une expérience passée avec un homme extraordinaire, responsable aussi de son alcoolisme. Nina est séduite par lui mais ne le rappelle qu'après de longues semaines alors qu'elle est au bord du suicide. Frédi découvre qu'elle habite une somptueuse villa baroque, écrin funèbre du peintre célèbre qui la prit pour modèle et pour femme à la toute fin de sa vie. Nina explique son silence par une cure de désintoxication. Frédi lui avoue ne comprendre plus rien à ce qu'il est. Il est à la fois dans le monde et à côté : des "trous noirs" hachent sa vie lorsqu'il s'abat au sol, terrassé par le haut mal épileptique. Plus rien pour lui n'assure le lien entre l'"avant" et l'"après". Mais lorsqu'une nouvelle crise le frappe, le trou noir ne se fait plus. Frédi et Nina font l'amour.

Pourtant, dès qu'il revient chez lui, Frédi a un mauvais pressentiment et c'est in extremis qu'il sauve Nina du suicide. Tout deux fuient la villa mortifère sur la moto de Frédi qui longe la côte d'azur sous le soleil.

Le film est adapté du roman du réalisateur, Chacun pour soi, Dieu s'en fout et prend pour titre un des derniers vers du poème Chanson d'après midi de Charles Baudelaire. En dépit de son décor très marqué et du thème paranormal du guérisseur, il ne s'agit ni d'un film sur la pauvreté ni d'un film fantastique. C'est l'histoire finalement plus banale et universelle du type seul au comptoir et qu'on ne voit pas en dépit de sa corpulence, de celui qui ne sait pas qui il est mais se cherche et finit par trouver la guérison en laissant venir le monde à lui et notamment les femmes qui pourront l'aider.

Des rêves mais pas de fantastique

L'efficacité du don de guérison n'est aucunement un enjeu du film. On ne saura d'ailleurs pas si le gamin sort ou non du coma. Cet intérêt pour le paranormal aurait pu s'appliquer si un personnage travaillait dans la recherche paramédicale mais il s'agit ici juste d'un type qui a un don. La guérison se fait par l'apposition des mains mais aussi par l'usage des mots qui bouleversent le champ de connaissance des gens. La femme qui souffre de maux de tête a besoin de s'entendre dire que c'est du cœur qu'elle souffre ; la malade du cancer souffre aussi de l'étouffante présence de sa sœur et la petite fille leucémique ressent peut-être que sa mère n'a pas le courage de retrouver son père.

La figure du père est aussi, comme souvent chez Dupeyron, importante. C'est toutefois le thème de l'enfance qui est le plus présent avec l'accident du gamin, le mal d'estomac de sa fille, Lucie qu'elle oublie avec le petit chien, la petite fille malade de la leucémie, les enfants de Josiane, le sourire d'enfant de Nina.

Plus basique encore le thème du plein et du vide, le trou noir entre deux moments d'existence, et la bière et l'alcool qui remplissent le vide de l'existence.

Voir aussi : François Dupeyron au Café des images le 29 septembre.

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