Prague. A.L. est vice-Ministre des affaires étrangères. Pourtant, malgré ses "états de service" et son passé irréprochable (en Espagne dans les Brigades Internationales, en France dans la Résistance, puis déporté dans un camp nazi) il est suspecté, surveillé, traqué : certains de ses collègues évitent de lui adresser la parole; au ministère des décisions sont prises sans même le consulter.
Un dimanche de janvier 1951, dans une rue écartée, deux voitures encadrent celle de A.L. Des hommes armés surgissent, l'entraînent, lui passent des menottes, l'aveuglent ; c'est un véritable enlèvement, non une simple arrestation.
Au secret pendant des mois, A.L. a parfois l'impression de devenir fou : le temps s'efface, il lutte contre le manque de sommeil, la soif, ses mains sont enchaînées. Il est soumis à des interrogatoires tantôt brutaux, tantôt insinuants. Tout son passé, tous ses actes, semblent avoir changé de sens. D'abord il nie tous les méfaits imaginaires dont on l'accuse, pensant que la vérité éclatera un jour. Mais au fil des semaines, des mois, sa résistance s'effrite car il comprend qu'il n'est pas la victime d'une erreur mais bien d'une machination judiciaire. Par épuisement, par désespoir et parce qu'on lui demande de rendre ce dernier service à la cause, il finit par avouer tous les crimes dont on l'accuse.
Dès sa disparition, sa femme a fait des démarches pour le retrouver, mais elle se heurte au silence des officines bureaucratiques. Très vite sa situation change : elle perd son emploi, ses enfants sont chassés de l'école. Lorsqu'à l'ouverture du procès elle apprend que son mari a avoué toutes sortes de crimes, elle le désavoue publiquement. A.L. ne sera pas condamné à mort. Après 1956, il sera réhabilité, retrouvera sa femme et ensemble ils reconstruiront une nouvelle vie
Dénonce les excès du Stalinisme d'après le récit autobiographique d'Arthur London, ancien vice-ministre des Affaires étrangères de Tchécoslovaquie.